vendredi 27 juin 2008

BREAK ESTIVAL

Off pour un mois et demi à partir de demain.

Dans l'immédiat, un grand merci à celles et ceux qui ont la grande gentillesse d'honorer cette maison de leurs visites.

ROCK IT (PART 2)

La grande journaliste américaine Nikki Finke a consulté sa boule de cristal... euh pardon, ses box office gurus, qui lui ont prédit 5 jours à 115 millions de dollars US pour les débuts de Hancock (http://www.deadlinehollywooddaily.com/hancock-predictions-115m-over-july-4th/), avec Monsieur Independence Day Weekend (Nikki dixit) en personne, Will Smith.



Par ailleurs, pour celles et ceux que ça peut encore intéresser, la bande-annonce du nouveau James Bond, Quantum of Solace, précèdera Hancock en salles. La BBC en a montré un aperçu (http://www.youtube.com/watch?v=saYtmt4eWsE&fmt=18).

Merci à François Justamand, rédacteur en chef du site La Gazette du doublage et expert es 007 de classe mondiale pour l'info relative à ces images.

jeudi 26 juin 2008

BEHIND THE SOFA...

Félicitations au génial Behind the Sofa (http://www.behindthesofa.org.uk/) pour le fond d'écran de série télé le plus élégant, le plus drôle et le plus approprié de l'année 2008.

Behind the Sofa est un blog consacré à Docteur Who et ses séries dérivées (dont Torchwood). Sa spécificité est de traiter le sujet avec une lucidité empreinte d'un sens de l'humour très britannique. Cette semaine il annoncait la première partie du final de la saison 4 de Docteur Who (The stolen Earth, diffusé sur BBC One samedi 28) avec une image très amusante, celle du Docteur et de ses compagnons... derrière un sofa.

DERRIERE LE SOFA...

L'expression « Behind the Sofa» est née au Royaume-Uni à l'époque de la première version de Doctor Who. On disait alors que les enfants regardaient la série cachés « derrière le sofa » (pour les détails voir: http://thierryattard.blogspot.com/2008/06/torchwood.html), à la fois gentiment effrayés et complètement fascinés.

A la demande générale (et justifiée) le blog a fait de cette image un fond d'écran disponible aux tailles habituelles (http://www.behindthesofa.org.uk/2008/06/theyre-behind-t.html). Inutile de dire qu'il a immédiatement remplaçé le Docteur, Donna et le Dalek Suprême (« Donne le meilleur de toi-même, et tu trouveras... le Dalek Suprême ») sur l'écran de votre dévoué taulier.

In English: http://tattard2.blogspot.com/2008/06/behind-sofa.html

mercredi 25 juin 2008

CE N'EST QU'UN FILM, INGRID (EPISODE 2)

GSG9... UNE SERIE D'ELITE

La série GSG 9 : Die Elite Einheit (en vf GSG 9 - Missions spéciales) arrive en France sur W9, chaine de la TNT, à partir du dimanche 29 juin (http://www.w9.fr/cms/display.jsp?id=p2_934822). Espérons que M6 prendra ensuite le relais.

Cette remarquable série qui rappellera le style action concept (Alerte Cobra, Le Clown...) voire la série britannique MI-5 ( Spooks) raconte le travail et la vie privée des hommes du Grenzschutzgruppe 9, unité d'élite de la police allemande. Pour plus de détails voir l'interview de Friedrich Wildfeuer et Karsten Rühle, « showrunners » de GSG9 (http://thierryattard.blogspot.com/2008/05/friedrich-wildfeuer-karsten-rhle.html), entretien réalisé peu avant le tournage de la saison 2.

ROCK IT

Hancock, comédie d'action de Peter Berg (Columbia) avec Will Smith dans le rôle d'un super-héros un peu particulier, sort le 2 juillet 2008 aux Etats-Unis pile pour le week-end ô combien stratégique de la fête nationale américaine. Smith est attendu au tournant ne fut-ce que parce que l'idée du film comme sa bande-annonce laissent espérer un peu d'air frais dans une production américaine formatée, ainsi qu'un film d'un impact semblable à celui de Men in black, avec le même Will Smith (sorti il y a onze ans déjà!)

Mardi 24 juin Nikki Finke racontait sur son blog (http://www.deadlinehollywooddaily.com/mark-canton-wants-a-word-with-you/) que le critique de Variety Todd McCarthy avait comparé le film à Last Action Hero (http://www.variety.com/VE1117937497.html), ce qui n'est pas forcément un compliment aux USA (Last Action Hero demeure un film injustement sous-estimé), et elle soulignait que le film ne faisait que 92 minutes.

Votre humble serviteur se demanda alors en commentaire (Nikki Finke - que son nom soit sanctifié - ayant la gentillesse de tolérer l'insignifiante présence française de votre dévoué taulier), pourquoi diable tous les blockbusters doivent systématiquement durer près de trois heures... tant que Hancock ne doit pas trouver un anneau, ou jouer au poker avec un banquier terroriste au Montenegro (soupir).

Corollaire: l'excellent blog Forgotten Silver expliquait le 12 juin que le DVD Blu-Ray du Hulk avec Edward Norton contiendrait 70 minutes de scènes coupées pour un montage final de 114 minutes! (http://forgottensilver.blogspot.com/2008/06/hulk-70-minutes-de-scnes-coupes-en-blu.html). Ces chiffres laissent songeurs car dans l'absolu il y aurait eu assez de matériel pour faire deux films ou une mini-série pour la télévision (pas pour le même budget, bien sûr). Le grand Henri Maler expliquait en cours de philosophie, du temps où celui qui écrit ces notes était au lycée, qu'on pouvait dans sa dissertation faire en deux parties ce que l'on souhaite faire en trois.

Il y a parfois des moments où un revisionnage de Stephen Tobolowsky's Birthday Party (http://thierryattard.blogspot.com/2008/05/stephen-tobolowskys-birthday-party.html) est salutaire...

LES HEROS D'UN AUTRE HORAIRE...

Le 20 juin, Alain Carrazé, journaliste, auteur et spécialiste des séries télévisées, analysait (http://alaincarraze.blog.canal-plus.com/archive/2008/06/20/une-programmation-heroique.html#more) les raisons qui font que le 8 juillet TF1 diffusera la saison 2 de Heroes à un horaire bien moins prestigieux que la saison précédente.

Le taulier de cette maison, qui n'est pas fan de cette série, regardera la saison 2 rien que pour monsieur Stephen Tobolowsky (alias Bob Bishop). Il nous confiait aimablement au moment du tournage de ses scènes que lui-même ignorait alors si son personnage faisait partie des bons ou de méchants. Avec Stephen Tobolowsky c'est un peu comme si c'était toujours notre anniversaire.

samedi 21 juin 2008

CE N'EST QU'UN FILM, INGRID (LE BLOC-NOTES DU TAULIER)

NIKKI S'HABILLE T'-ELLE EN PRADA?

La journaliste américaine Nikki Finke tient depuis 2006 un blog, Deadline Hollywood Daily (http://www.deadlinehollywooddaily.com/), dont elle est propriétaire et qui fut d'abord une rubrique sur le business, la politique et la culture de l'industrie de l'Infotainment dans le LA Weekly.

Ce blog (en anglais) sur Hollywoodland se distingue des publications corporatives par la qualité de ses informations (très souvent exclusives) et de ses impressionnantes sources, par son ton sans concession, son irrévérence - pleine d'humour - à l'égard des studios et de ceux qui les dirigent, ainsi que par la pertinence de ses analyses, voire de ses prévisions. Lors de la récente grève des scénaristes, Deadline Hollywood Daily était même la première source d'informations en temps réel de toute l'industrie.

Notons que Nikki Finke fut correspondante d'Associated Press à Moscou et Londres, qu'elle a travaillé entre autres pour Newsweek, The New York Times, The Washington Post, Vanity Fair et Esquire. Elle a été plusieurs fois récompensée par la profession et son blog est aujourd'hui une force qui compte à Hollywood.

MAX MENACE LE GOUROU

La nouvelle adaptation cinématographique de la série télévisée Max la menace, avec Steve Carell (The Office - version US) dans le rôle qui rendit Don Adams célèbre, est sortie vendredi 20 juin dans 3911 salles aux Etats-Unis (http://www.apple.com/trailers/wb/getsmart/). Ce même week-end sortait The Love Guru, le dernier film de Mike Myers (Austin Powers), de nouveau en chair et en os après sa longue période « shrekienne » (http://www.apple.com/trailers/paramount/theloveguru/).

Et c'est l'agent 86 Maxwell Smart, alias Max La Menace, qui sort vainqueur de ce combat de gaffeurs avec 13, 3 millions de dollars US de recettes vendredi contre 5,3 millions pour le gourou (http://www.deadlinehollywooddaily.com/get-smart-over-love-guru-by-more-than-2-1/).

Il est très étrange, cela dit sans aucune espèce de malice, de constater combien la carrière de l'inventif et doué monsieur Myers semble presque mimer celle du grand Peter Sellers, son devancier dans les rôles à transformation. Avec The Love Guru, on en arrive à se demander sérieusement si les Austin Powers ne seront pas pour lui, toute proportions gardées, l'équivalent des Panthère rose. Il ne serait pas surprenant après ça qu'un nouvel Austin Powers entre en production.

« J'AI DES AILES, J'AI DES AILES, J'AI DES AILES... »

Nikki Finke racontait mercredi 18 juin une histoire absolument incroyable (http://www.deadlinehollywooddaily.com/how-an-argument-about-iron-man-led-to-bob-shayes-stock-short-debacle/): lorsque New Line avait encore en développement le projet Iron Man, Bob Shaye, alors big boss de cette compagnie, avait eu avec Avi Arad, le patron de Marvel Studios, une discussion sur le fait de savoir si le super-héros devait voler ou non! Arad voulait bien sûr rester fidèle à la bande dessinée. L'option de New Line finit par tomber, et Bob Shaye, convaincu que le film ne marcherait pas, fit diminuer sa position sur ses actions Marvel.

Les fans quadragénaires de super-héros se souviennent peut-être d'un téléfilm-pilote de 1977 appelé Exoman, qui fut longtemps pour les lecteurs hexagonaux de comics le seul début de commencement de notion de ce qu'ils pouvaient espérer comme adaptation (non-officielle en l'espèce) d'Iron Man.

Dans l'excellent livre du scénariste-producteur Lee Goldberg Unsold Television Pilots (McFarland, 1990), le romancier et scénariste Martin Caidin explique comment des discussions interminables avec les responsables marketing de Universal quant à la figurine basée sur l'armure du héros contribuèrent à tuer toute série potentielle.

Mais quel aurait été donc le slogan de la version New Line d'Iron Man? « You'll believe a man cannot fly » (« Vous croirez qu'un homme ne peut pas voler »)?

jeudi 19 juin 2008

DU JOURNALISME FOOTBALLISTIQUE COMME RÊVE DU JOURNALISTE CINEMA

A Eric SALOU

Au préalable évacuons un détail qui a toute son importance: le taulier de ce blog n'y connaît absolument rien en football, il n'a jamais joué au football de sa vie et ne pratique aucun sport.

Il arrive juste parfois à votre humble taulier de regarder un match de Manchester United et de suivre avec intérêt les aventures de Roman Abramovich, le propriétaire de Chelsea, parce que le foot anglais est en soi un excellent sujet de feuilleton (voir le génial Femmes de Footballeurs).

ON REFAIT LE PORTRAIT

Force est de constater qu'il se dégage du journalisme footballistique français du 21ème siècle une audace, un dynamisme et une liberté du ton qui réussissent à intéresser le néophyte pourvu qu'il prenne la peine de s'y arrêter et stupéfient le journaliste cinéma en ce que le cinéma comme le football sont de facto deux branches de l'industrie moderne de l'Entertainment - avec leurs cortèges d'intérêts et d'enjeux financiers.

A celles et ceux qui seraient prêts à faire fi d'éventuels préjugés afin de s'offrir une belle leçon d'impertinence, d'humour, de passion et de mauvaise fois assumée nous recommanderons particulièrement On refait le match (http://www.rtl.fr/emission/24331/on-refait-le-match.html), le talk show de l'éminent journaliste sportif Eugène Saccomano et de ses débatteurs spécialistes qui refont sur RTL et LCI (chacun dans un « rôle », voire un « personnage », bien établi) l'actualité du football avec un regard et un style acérés.

LA SOLUTION A 100%

L'autre émission incontournable du genre, a fortiori parce que tout le monde ne reçoit pas LCI (qui propose de manière générale d'excellents talk shows), c'est évidemment 100% Foot (http://www.m6.fr/html/emissions/foot/), présenté par Estelle Denis, avec entre autres l'aussi redoutable que talentueux Pierre Ménès. Notons que Pierre Ménès tient sur Yahoo France un blog (http://fr.sports.yahoo.com/fo/pierrotlefoot/) où l'intelligence rivalise avec une absence totale de langue de bois égale à celle de la grande Nikki Finke en cinéma (http://www.deadlinehollywooddaily.com/).

Votre humble serviteur, qui précise une nouvelle fois qu'il n'a aucune espèce de début de commencement deconnaissance en football, est par ailleurs un aficionado de L'Edition spéciale, sur Canal +, où il a savouré avec délectation les interventions de Franck Annese, le rédacteur en chef du mensuel So Foot (http://www.sofoot.com/), à propos de l'Euro 2008.

A quand un équivalent cinéphilique de On refait le match ou 100% Foot? Quel est donc le dernier film vu par Pierre Ménès?

mercredi 18 juin 2008

RICHARD DARBOIS (LA GAZETTE DU DOUBLAGE)

François Justamand, journaliste fondateur et rédacteur en chef du site La Gazette du doublage (http://www.objectif-cinema.com/rubrique.php3?id_rubrique=0168), responsable aussi du livre Rencontre autour du doublage, publie cette semaine une interview de Richard Darbois.

Comédien et artiste en doublage, Richard Darbois prête sa voix à Harrison Ford, notamment dans le dernier Indiana Jones. Il est également en quelque sorte le Don LaFontaine français puisqu'il est la voix de la majeure partie des bandes-annonces entendues dans les salles hexagonales.

Cet entretien a été réalisé le 26 mai 2008 à l'occasion de la sortie du dernier opus des aventures du docteur Jones (http://www.objectif-cinema.com/spip.php?article4958).

JANE EYRE (KOBA FILMS VIDEO)

Angleterre, 19ème siècle. Après une enfance douloureuse, Jane Eyre arrive à Thornfield Hall où elle a été engagée comme préceptrice d’Adèle, la pupille du ténébreux et sarcastique propriétaire des lieux, Edward Fairfax Rochester. Mais les murs de Thornfield dissimulent le pesant secret de monsieur Rochester.

Référence en matière de fiction télévisée patrimoniale française, Koba Films Video s’impose comme l’éditeur incontournable de la fiction télé britannique. Koba propose ainsi le meilleur de la production contemporaine du Royaume-Uni : Les Arnaqueurs VIP, Blackpool, Femmes de footballeurs, La fureur dans le sang, Life on Mars, State of Play – Jeux de pouvoir ou encore la saison 1 de Torchwood, la série dérivée de Doctor Who.

Mais Koba Films Video propose également quelques grands classiques de la télévision britannique, tels l’absolument indispensable Orgueil et préjugés (Pride and Prejudice, 1995), d’après Jane Austen et avec Colin Firth, ou encore cette adaptation non moins indispensable et définitive de Jane Eyre, le roman de Charlotte Brontë, réalisée en 1983 à l’initiative de cette grande et noble maison qu’est la BBC.

RETOUR AU CHATEAU

«…mes voyages à travers la Grande Bretagne, parmi des gens de toutes conditions, comme l’expérience de mon enfance dans les quartiers pauvres de Londres, ont posé la base de mon travail littéraire . » (Alexander Baron, 1917-1999)

Jane Eyre, le roman de Charlotte Brontë (1816-1855) publié en 1847, a fait l’objet de très nombreuses adaptations cinématographiques et télévisuelles entre 1910 et 2006. Pour la BBC c’est pratiquement une figure imposée depuis 1958. Ce Jane Eyre de 1983 est produit par le producteur et réalisateur Barry Letts, maître d’œuvre de Doctor Who (la série classique) périodes Jon Pertwee et Tom Baker, et habitué des adaptations des piliers du Panthéon de la littérature britannique, dont l’inévitable Jane Austen ou Charles Dickens.

Julian Amyes, avec qui Letts avait déjà travaillé sur deux adaptations de Dickens - Le magasin d’antiquités (The Old curiosity shop, 1979) et De grandes espérances (Great Expectations, 1981) – signe la réalisation. Le journaliste et romancier britannique Alexander Baron se charge de transposer Jane Eyre, tout comme il avait veillé avec Barry Letts aux destinées des adaptations de Raison et sentiments (Sense and Sensibility, 1981), Stalky & Co. (1982, d’après Kipling) et de Le chien des Baskerville (1982, avec le grand Tom Baker dans le rôle de Sherlock Holmes). Le scénariste Terrance Dicks, que les fans de Doctor Who connaissent bien, supervise le découpage du scénario.

« Vous êtes… Monsieur Rochester.
- Une déduction intelligente, Mademoiselle Eyre. »
(Deuxième rencontre entre Jane et Rochester)


La pierre angulaire d’une adaptation de Jane Eyre est, bien sûr, la distribution des deux rôles principaux. Zelah Clarke, danseuse classique de formation – qui jouait le rôle de Susan Nipper dans Dombey et fils (Dombey & Son, 1983, d’après Dickens) produit par Barry Letts – est choisie pour être Jane à l’âge de 18 ans. Le Gallois Timothy Dalton (futur James Bond) devient Edward Fairfax Rochester, ce qui ne surprend pas ceux qui se souviennent de son sublime Heathcliff dans le film Les hauts de Hurlevent (Wuthering Heights, 1970) réalisé par Robert Fuest d’après le roman d’Emily Brontë, sœur de Charlotte.

Jane enfant est interprétée par Siân Pattenden, qui deviendra bien plus tard journaliste, auteur et illustratrice de livres pour enfants (http://sianpattenden.co.uk/). Sa très courte carrière de jeune actrice compte un passage par la case Docteur Who, dans le premier épisode de l’histoire intitulée Mawdryn Undead (1983), avec Peter Davison dans le rôle du Docteur.

LE FANTÔME DE THORNFIELD HALL

« Je rêvais de changement, de liberté. Ou, au moins, d’une nouvelle servitude . » (Jane)

Enfant, Jane Eyre vit à Gateshead chez sa tante Reed (Judy Cornwell, exceptionnelle actrice… qui a joué dans Les hauts de Hurlevent), dont le défunt mari l’a recueillie à la mort de son père. Révoltée face au mépris de sa famille d’adoption, elle est envoyée par sa tante au sinistre pensionnat de Lowood (« Elle sera traitée comme il se doit » ), administré par le bigot Brockelhurst (Robert James, très respectable acteur écossais, apparu par deux fois dans Docteur Who).

Jane Eyre affronte la rigueur de l’éducation à Lowood (« Ici pas de temps pour l’oisiveté ») et se fait une amie en la personne de Helen Burns, mais celle-ci décède de la tuberculose tandis que nombre de leurs condisciples sont emportées par le typhus. Miss Temple, la surintendante de Lowood, prend la jeune Jane sous son aile et en fait une institutrice accomplie mais, lorsque sa protectrice se marie, Jane décide de passer une annonce afin de trouver une nouvelle situation et quitter Lowood, devenue entre temps une institution « utile et noble ».

C’est ainsi que Jane Eyre, âgée de 18 ans, arrive à Thornfield Hall pour occuper le poste de préceptrice de Miss Adèle Varens, la pupille d’Edward Fairfax Rochester née « sur le continent ». La sympathique Madame Fairfax (« Bien sûr, je suis liée de loin aux Rochester. Enfin, mon mari l'était »), la personne qui veille à la bonne marche de la maison, accueille Jane. Mais la jeune femme est intriguée par un rire pour le moins étrange qu’elle attribue à Grace Poole, une singulière domestique ayant un penchant pour la boisson.

« Pas étonnant que vous ayez l’air de venir d’un autre monde. » (Rochester)

Le très énigmatique monsieur Rochester, de retour des lointaines Antilles, est volontiers cassant (« Excusez mon ton. J’ai l’habitude de commander. Je ne puis changer pour un nouveau pensionnaire ») mais très lucide quant à la condition humaine (« Non, jeune femme, je ne suis pas, en général, philanthrope ») comme quant à sa propre condition (« Je suis un banal et commun pécheur »). Il se flatte d’être « aussi dur qu’une balle en caoutchouc » mais Jane Eyre, qui l’intrigue, arrive dans sa vie à point nommé pour le distraire de pensées « qui sont obsédées par un seul et même point »: un secret qui hante le propriétaire de Thornfield et son imposante demeure.

MASTERPIECE THEATRE

« Suis-je hideux, Jane ?
- Oui, Monsieur. Vous l’avez toujours été. »
(Jane et Rochester)


Cette mini-série de cinq épisodes de 50 minutes réalisée en 1983 fait honneur au classique de Charlotte Brontë et sublime l’histoire d’amour éternelle entre Jane Eyre, éprise de bonheur et de liberté (« Je ne suis pas un oiseau. Je suis un être libre avec sa propre volonté… » ) et Edward Rochester, histoire d’amour maintes fois contrariée : par la péronnelle Blanche Ingram (Mary Tamm, la première Lady Romana dans Doctor Who), la visite d'un personnage issu du passé de Rochester, la révélation de son secret, un incendie… nulle péripétie feuilletonesque ne privera l’heureux télespectateur d’un dénouement espéré.

« Il devait y avoir des millions de gens comme moi qui avaient besoin d’action. Surtout des femmes voulant plus que leur quotidien. » (Jane)

La carrière de Zelah Clarke, l’actrice principale, ne bénéficia pas de la perfection de son interprétation, elle épousa un producteur de la BBC et mit en veille sa vie professionnelle avec une élégante discrétion et beaucoup de philosophie. Timothy Dalton considère à juste raison Jane Eyre comme un des grands moments d’une filmographie bien remplie empreinte de la volonté de jouer la carte de la diversité plutôt que celle de la starisation – comme il l’a encore montré avec brio dans la comédie Hot Fuzz (2007).

Ce Jane Eyre de 1983 fut tourné en extérieurs dans le Derbyshire ainsi qu’à Pebble Mill, dans les studios de la BBC à Birmingham (déménagés en 2004 au complexe commercial The Mailbox), studios qui abritèrent des adaptations prestigieuses telles que Oliver Twist, Great Expectations ou David Copperfield. Il constitue un des sommets de ce que la BBC peut offrir en matière d’adaptation de classiques littéraires. En le visionnant on pense spontanément au Rebecca réalisé en 1979 pour la Beeb par Simon Langton – avec Jeremy Brett – d’après le roman de Daphne Du Maurier (œuvre très influencée par le roman de Charlotte Brontë)

On croisera avec enchantement, outre les talentueux acteurs précités, Damien Thomas (Richard Mason) et Colin Jeavons (dans le rôle de l’avocat Briggs), visages familiers des fans de la trilogie Château de cartes. Et la musique de Paul Reade est magnifique. A savourer en version originale avec un sous-titrage réalisé spécialement. Puis déguster Orgueil et préjugés dans la foulée.

« Croyez vous que nous soyons liés, Jane. » (Rochester)

TORCHWOOD - SAISON 1 (KOBA FILMS VIDEO)

Fondé par la Reine Victoria, l’Institut Torchwood est aujourd’hui encore chargé de contrer la menace extra-terrestre sous toutes ses formes. Dirigée par l’étonnant et charmeur capitaine Jack Harkness, l’antenne de Cardiff (Pays de Galles) est située sur une faille spatio-temporelle, point de départ d’aventures extraordinaires pour Jack et son équipe.

Référence en matière de fiction télévisée patrimoniale française depuis l’ère de la VHS, Koba Films Vidéo s’est imposé comme l’éditeur incontournable en matière de fiction télé du Royaume-Uni. Non seulement Koba propose quelques classiques de la télévision britannique, tels Orgueil et préjugés et Jane Eyre, mais cet éditeur propose aussi le meilleur de la production contemporaine d’outre-Manche : Les Arnaqueurs VIP, Blackpool, La fureur dans le sang , ou encore Life on Mars.

Il est presque dans l’ordre naturel des choses que Koba Films Vidéo sorte le coffret de la saison 1 d’une série comme Torchwood.

GODS AND MONSTERS

« Avant que nous ne commencions le quatrième épisode de Quatermass II, nous voudrions préciser que selon notre opinion, celui-ci ne peut être regardé par des enfants ou par ceux d’entre vous qui seraient prédisposés à des problèmes nerveux. » (BBC, 1955)

Cela fait maintenant 55 ans que la BBC propose aux téléspectateurs du Royaume-Uni de la science fiction de qualité destinée à un public adulte. En 1953, alors que l’émetteur londonien d’Alexandra Palace arrosait d’ondes hertziennes les récepteurs de ce medium relativement nouveau qu’était la télévision (surnommée « la lanterne de l’idiot » par certains), le professeur Bernard Quatermass sauvait le Royaume de la menace venue de l’espace dans The Quatermass Experiment. La série en six épisodes consacra Nigel Kneale comme un des grands scénaristes de l’Histoire de la fiction télévisée britannique et celle-ci, à l’instar de ses suites (Quatermass II et Quatermass and The Pit), influença des séries telles que A for Andromeda (1961) ou Docteur Who.

« Un jour, je reviendrai. Oui, je reviendrai. Jusque là il ne faut ni regrets, ni larmes, ni angoisses. Avance avec toute ta conviction et prouve-moi que je ne me suis pas trompé. » (Le Docteur, The Dalek Invasion of Earth, 1964)

Bien que l’évocation de Docteur Who mériterait à elle seule plusieurs articles, rappelons que ce classique fut lancé par la BBC en 1963 à l’initiative de Sydney Newman (The Avengers) et que les aventures dans l’espace-temps du Docteur, son héros, un seigneur du temps capable de se régénérer (d’où sept acteurs différents !) se poursuivirent jusqu’en 1989 puis dans un téléfilm de 1996 (avec un huitième interprète).

Après une longue parenthèse la série a été relancée à Cardiff en 2005 par BBC Wales, la branche galloise de la Beeb, sous le haut patronage du scénariste et producteur gallois Russell T. Davies (Queer as a folk), de la productrice Julie Gardner et de Jane Tranter, responsable des dramatiques à la BBC. Christopher Eccleston puis David Tennant y interprètent respectivement le neuvième puis le dixième Docteur.

CAPITAINE JACK HARKNESS

« De l’œstrogène, c’est sûr. On prend la pilule, on tire la chasse, et le cycle de l’eau féminise les poissons. Ca remonte dans le ciel et ça me retombe dessus. Des contraceptifs dans la pluie. J’adore cette planète. Au moins je ne tomberai pas enceinte de nouveau. » (Capitaine Jack Harkness)

Le capitaine Jack Harkness apparaît pour la première fois dans l’épisode The Empty child, de la saison 1 de la nouvelle version de Docteur Who. Jack, censé être un volontaire américain engagé dans la RAF, a le physique ravageur de John Barrowman chanteur, danseur et acteur écossais (élevé dans l’Illinois) habitué des comédies musicales du West End.

Barrowman crève littéralement le petit écran dans le rôle de cet ancien agent du temps [l’existence des agents du temps a été évoquée pour la première fois, dans la série « classique », NDA] devenu arnaqueur spatio-temporel, qui croise le Docteur (Christopher Eccleston) et Rose Tyler, sa compagne de voyage (Billie Piper) en 1941 et termine la saison avec eux.

« Un engagé dans la RAF, escadron 133, mais il a disparu. Envolé, présumé mort.
- Quand ça ?
- En 1941, en plein Blitz. »
(Yvonne et Gwen)


La popularité de ce voyageur du temps venu du 51ème siècle, aventurier, escroc, ouvertement bisexuel (« On mettrait des lustres à compter mes ex »), est telle auprès des différentes catégories de téléspectateurs qu’elle favorise le développement d’une série dérivée de Docteur Who qui le mettrait en vedette dans un nouveau contexte. Cela fournit à Russell T. Davies un excellent prétexte pour ressortir de ses cartons une idée de série de science-fiction pour adultes dans la veine de séries américaines comme Buffy contre les vampires ou Angel.

BAD WOLF II

« Torchwood 1 était à Londres, détruit dans la bataille. Torchwood 2 est à Glasgow. Ils sont étranges. Torchwood 3, Cardiff. Torchwood 4 a disparu mais on le retrouvera. » (Capitaine Jack)

L’institut Torchwood est fondé en 1879 par la Reine Victoria à la suite des évènements de l’épisode 2 de la saison 2 de Doctor Who. En 2006 , le Premier Ministre Harriet Jones demande à l’organisation de détruire le vaisseau Sycorax quittant la Terre après que le Docteur nouvellement régénéré (David Tennant) ait mis un terme à L’invasion de Noël (le spécial de Noël qui précède la saison 2).

A la manière des références au Bad Wolf dans la saison précédente, des allusions à Torchwood sont disséminées dans la deuxième saison de Docteur Who jusqu’au climax de la bataille de Canary Wharf, au cours de laquelle la branche londonienne de l’institut est anéantie. Pour Torchwood, c’est désormais à Cardiff que ça se passe, sur une faille dans l’espace et le temps située en dessous de cette métropole galloise et mentionnée d’abord dans les épisodes 3 et 11 de la saison 1 de Docteur Who.

« Les Experts : Cardiff. J’aimerais voir ça. Qu’ils mesurent la vélocité d’un kebab. » (Police Constable Andy)

Alors que l’officier Gwen Cooper, de la police de Cardiff (Eve Myles, remarquée en Gwyneth dans l’épisode The Unquiet dead de Docteur Who), et son partenaire, le PC Andy (Tom Price), sont sur les lieux d’un crime, le travail de la police est interrompu par l’arrivée des membres de la mystérieuse organisation Torchwood : Suzie Costello, officier en second interprétée par Indira Varma (vue dans Basic Insinct 2, cf. http://thierryattard.blogspot.com/2008/02/basic-instinct-2-de-michael-caton-jones.html), le docteur Toshiko « Tosh » Sato – experte en informatique (Naoko Mori, régulière de Absolument fabuleux et déjà interprète du personnage dans l’épisode Aliens of London de Docteur Who), le docteur Owen Harper (Burn Gorman), Ianto Jones (Gareth David-Lloyd) – logisticien et surtout… le capitaine Jack Harkness, le leader de l’équipe, qui ne peut pas mourir (« Un jour je trouverai un docteur qui m’expliquera »). La curiosité de Gwen et un concours de circonstances vont faire d’elle le nouveau membre de Torchwood Cardiff.

« Comparée à Docteur Who, cette série se passe vraiment à Cardiff » dit le créateur de Torchwood. La capitale galloise y est présentée comme un centre urbain moderne et la base de Torchwood, le « Hub », est censée être située sous le Wales Millennium Centre. Un choix approuvé par le parlementaire conservateur Michael Gove comme par les habitants de Cardiff eux-mêmes (sensibles aussi à des clins d’œil comme le gag récurrent sur le quartier de Splott), les touristes ayant fait de l’endroit et de sa fameuse tour d’eau un des lieux les plus visités du Royaume suite au succès de la série.

SEX PLEASE, WE’RE BRITISH

« Vous verrez de l’amour, vous verrez de l’action, vous verrez des aliens. » (John Barrowman)

Imaginé en fait avant le retour du Docteur, Torchwood est pour Russell T. Davies « une façon de présenter une série plus adulte et paranormale en deuxième partie de soirée » (dixit Julie Gardner). En anglais, « post-watershed », ce watershed étant la limite au-delà de laquelle on peut montrer du contenu adulte à la télévision dans les pays anglo-saxons, la limite de permissivité étant définie au Royaume-Uni par l’Ofcom (Office of Communications, l’autorité de régulation) comme débutant à partir de 21 heures !

Docteur Who, série-mère de Torchwood, est pourtant loin d’être infantile. L’activiste moraliste Mary Whitehouse (1910-2001) avait fait de la série « classique » une de ses cibles favorites dans les années 1970 et le show était réputé comme la série que l’on regarde « caché derrière le sofa » (« Behind the sofa » est même rentré dans le langage courant). Torchwood a pour point commun avec la nouvelle version de Doctor Who d’inscrire la science-fiction dans un cadre réaliste et contemporain (Rhys, le compagnon de Gwen, lui demande d’enregistrer un épisode de l’émission Wife Swap), mais dans un style que Russell T. Davies a voulu « sexy, sombre, dangereux » .

« Et voici Ianto Jones. Il nettoie derrière nous et nous permet d’arriver à l’heure.
- Je fais de mon mieux.
- Et il est beau en costard.
- Attention, c’est du harcèlement. »
(Jack et Ianto)

Si le premier épisode se limite à l’égorgement à coup de dents d’un brancardier (« On dirait Hellraiser. C’est la grande classe ») par une créature extra-terrestre – un Weevil, sorte de cousin germain des Morlocks de La Machine à remonter le temps – et à un baiser homosexuel, l’épisode 2 annonce clairement la couleur avec cette jeune fille possédée par un alien qui se nourrit exclusivement de l’énergie de l’orgasme. « Dans Torchwood tout le monde flirte » dit John Barrowman et Russell T. Davies estime que « La science fiction est trop centrée sur l’hétérosexualité », les personnages sont donc confrontés à des situations et des sentiments qui font que leur sexualité franchit les limites des conventions. Comme Tosh, séduite par une extra-terrestre manipulatrice qui veut s’infiltrer dans la base de l’organisation.

« Si c’est quelqu’un qui nous en veut ça fait juste quatre ou cinq millions de personnes. » (Owen Harper)

Ça c’est pour le sexy car au rayon sombre et dangereux le capitaine Jack et son équipe affrontent une cyberwoman (« Ces trucs ont fait tomber Torchwood 1 » ), des fées démoniaques redoutée par le vaillant Jack lui-même, des cannibales, un membre renégat de Torchwood avec un agenda caché, un étrange trafiquant temporel d’antiquités (Billis Manger, interprété par un acteur intéressant du nom de Murray Melvin – dont le physique rappelle le grand Colin Jeavons) et la bête de l’Apocalypse. « J’aimerai bien entrer dans une tente et tomber sur une fête avec à manger et à boire, des gens qui dansent » regrette Jack.

KOBA PRINCIER

« De la tv britannique comme vous n’en avez jamais vu. » (John Barrowman)

Koba Films Vidéo a compris qu’elle ajoutait à sa couronne un joyau de science-fiction original plein d’action, d’extraordinaires effets spéciaux, d’humour (« Dis-leur qu’il est mort en baisant un alien ») et d’émotion (« Un jour j’aurai l’occasion de vous sauver et je vous regarderai mourir » ). Le coffret DVD français de la saison 1 est par conséquent traité avec tout le respect dû à un titre culte, sur quatre disques comportant en sus des épisodes une quantité inhabituellement somptueuse de bonus tirés de Torchwood Declassified (les coulisses de la série, diffusés en parallèle de Torchwood au Royaume-Uni) ou du coffret DVD anglais.

« J’en ai marre du S.U.V. » (Julie Gardner, co-productrice exécutive)

Au menu, une introduction à la série où on apprend de Julie Gardner que les épisodes sont tournés par blocs de 2 et qu’une grosse partie du deuxième épisode a été tournée avant le premier. Un Making of de 15 minutes avec entre autres une instructive séance de lecture de scénario – la fameuse scène des pizzas (Jack : « Avant de continuer, qui commande des pizzas au nom de Torchwood ? » Owen : « Euh… C’est moi. Désolé, je suis con. ») Une featurette de cinq minutes sur les fées de Small Worlds, un épisode écrit par Monsieur Peter J. Hammond, créateur de Sapphire and Steel, grand classique de la télé britannique. Et bien d’autres choses dont dix minutes sur le maintenant célèbre véhicule de Torchwood (« La moitié ne fonctionne pas mais ça rend bien » ) et le savoureux et drôle « Journal du Capitaine Jack Harkness ».

Cerise sur le gâteau, le coffret dvd français est un objet absolument magnifique. Le traitement princier de la série par Koba (quoi de plus normal avec un nom pareil) contraste inévitablement avec les tristes coffrets français de la nouvelle version de Docteur Who, lesquels ne comportent même pas les épisodes spéciaux de Noël. La seule réserve concerne un point dont l’éditeur n’est pas responsable : le doublage de la série, réalisé en Belgique.

« Notre équipe se plaint souvent de vous. » (Swanson)

Si le talent des comédiens et des professionnels locaux n’est absolument pas en cause (l’excellent Sébastien Hébrant doublait déjà le capitaine Jack dans Doctor Who), la version française souffre des habituels problèmes d’adaptation (dont avait largement pâti Life on Mars). On aurait souhaité que Torchwood bénéficie des mêmes soins que ceux apportés par le directeur artistique et comédien David Macaluso au doublage de la saison 3 de Doctor Who. La version originale sous-titrée (ad hoc pour le coffret) est donc comme souvent recommandée.

Diffusé au Royaume-Uni sur BBC Three et BBC Two (cf. http://doctorwho.xooit.fr/t338-Dossier-Recapitulatif-des-audiences.htm), Torchwood doit se cantonner en France aux ornières d’une TNT que tout le monde est loin de recevoir avec une diffusion sur NRJ 12 et une rediffusion sur la chaîne câblo-satellitaire Canal Jimmy. Le coffret de Koba Films Vidéo est donc une très bonne raison de découvrir – sans forcément connaître Doctor Who – ou redécouvrir la saison 1 de cette série hors norme.

Des acteurs fantastiques, une production et une réalisation très soignées, une musique sublime de Murray Gold et Ben Foster (http://www.doctor-who.fr/d_itw_foster.php), le grand John Barrowman... « Tout va changer au 21ème siècle et il faudra être prêt » explique Jack à Gwen Cooper. En ce 21ème siècle les meilleures séries télévisées au monde sont définitivement britanniques… et les gens de Koba sont prêts.

« Allons y » (Le Docteur, en anglais dans le texte)

Saison 2: http://thierryattard.blogspot.com/2009/04/torchwood-saison-2-koba-films-video.html

samedi 14 juin 2008

MICHAEL « BULLY » HERBIG (DER SCHUH DES MANITU & (T)RAUMSCHIFF SURPRISE - PERIODE 1)

Remerciements à Stephan PEYERL

Le comique Michael Herbig - plus connu sous son surnom de « Bully » - est une immense vedette en Allemagne, où il est l’équivalent de Mike Myers, Alain Chabat et Mel Brooks réunis. Ses émissions de télé sont très populaires et ses films à très gros budgets explosent les records historiques du box office allemand.

La Chaussure de Manitou (Der Schuh des Manitu) et (Astro)Croisière Surprise - Première époque ((T)raumschiff Surprise - Periode 1), respectivement parodies des Winnetou et de Star Trek sont deux monuments du comique cinématographique.

Michael Herbig, plus jeune vous souhaitiez entrer à la Münchener Filmhochschule, une grande école de cinéma. Vous vouliez déjà être réalisateur ?

Michael Herbig : Malheureusement ma candidature a été rejetée par cette école. Je suis donc un parfait autodidacte et tel est le cas depuis plus de 24 ans. En fait, j’ai commencé à faire des films à l’âge de 12 ans. On peut dire que j’ai quasiment inventé le style « Dogma » à cette époque : pas d’éclairage, pas de son et une caméra secouée.

Quels sont vos films et réalisateurs préférés et pourquoi ?

Michael Herbig : En principe lorsque je paye ma place de cinéma je veux voir du spectacle, je veux être diverti. J’aime les vieux films d’Hitchcock. C’est en regardant Psychose et Les Oiseaux que j’ai voulu être metteur en scène. J’admire aussi Steven Spielberg et Robert Zemeckis. E.T. et Forrest Gump figurent définitivement parmi mes films favoris.

Votre carrière a démarré avec une émission de radio du matin Langemann und die Morgencrew, diffusée sur une station locale à Munich. Pourriez-vous nous dire ce que vous faisiez dans cette émission ?
Michael Herbig : Après mon rejet de l’école de cinéma, je me suis retrouvé dans le business de la radio, mais sans vraiment me considérer comme un présentateur ou un journaliste. J’ai commençé à développer ma première série comique. En 1991, j’ai démarré l’émission du matin en tant que co-animateur et humoriste et j’en ai assuré la production jusqu’en 1995.

Est-ce que la radio est un bon entrainement pour acquérir le sens du timing et celui de la situation nécessaires à la comédie ?

Michael Herbig : Pour moi l’émission quotidienne de radio était effectivement l’entrainement idéal pour acquérir le timing et développer des personnages. Il s’agissait en quelque sorte de « films pour les oreilles » !

Qu’avez-vous fait après la radio et avant de rentrer dans l’univers de la télévision ?

Michael Herbig : En réalité j’ai démarré la télé parallèlement à mon travail en radio. Quand l’émission de télévision Bullyparade a débuté sur la chaîne ProSieben en 1997, je produisais encore une émission comique hebdomadaire diffusée nationalement à la radio.

Il y a en Allemagne un style comique très proche de l’esprit d’une émission comme Saturday Night Live, avec un grand sens parodique. Avez-vous des références dans ce type d’humour ?

Michael Herbig : J’ai grandi avec les films de Mel Brooks ou bien ceux du trio Zucker/Abrahams/Zucker, tels que Y a-t-il un pilote dans l’avion ? Ces films correspondent parfaitement à mon sens de l’humour et m’ont certainement influencés et inspirés.

Votre premier succès à la télévision allemande a été l’adaptation de votre série radiophonique Die Bayern Cops...

Michael Herbig : Die Bayern Cops fut d’abord une série de sketches pour la radio - 800 épisodes de 2 minutes chacun en tout. Plus tard on a tourné 75 épisodes sous le titre Die Männer von Isar 3 pour une chaîne de télé régionale. La série racontait les mésaventures de deux sympathiques policiers dont le principal souci quotidien était d’éviter à tout prix quelque mission que ce soit.

Je suis très fier car cela faisait même rire les policiers de Munich.

En 1996 vous avez créé la herbX Medienproduktion GmbH, votre compagnie de production.

Michael Herbig : La première production majeure de ma société a été la première saison de l’émission comique Bullyparade pour ProSieben. J’ai créé cette compagnie essentiellement pour pouvoir travailler en toute tranquillité (rires).

Bullyparade est une grande émission comique où sont nés les personnages de vos films La Chaussure de Manitu et (Astro)Croisière Surprise - Première époque. Sur cette émission vous avez travaillé avec une merveilleuse équipe d’humoristes, dont Christian Tramitz et Rick Kavanian. Comment avez-vous rencontré ces derniers ?

Michael Herbig : Je connais Rick Kavanian depuis près de 18 ans. Nous sommes de très bons amis, nous avons le même sens de l’humour et - cerise sur le gâteau - nous apprécions de travailler ensemble. Lorsque Rick est parti durant un an à New York en 1995 je lui ai cherché un remplaçant pour Die Bayern Cops et j’ai engagé Christian Tramitz, avec lequel je me suis très bien entendu.

Quand Rick est revenu c’est tout naturellement que nous nous sommes mis à travailler en trio. Ca a été le début de Bullyparade. On travaillait sur ce qui nous amusait.

Vous avez dirigé le tandem comique Erkan & Stefan [Erkan Maria Moosleitner et Stefan Lust, sortes de Eric et Ramzy allemands, NDA] dans leur premier film, intitulé... Erkan & Stefan, une espèce de croisement entre Wayne’s World et James Bond. Comment vous êtes vous retrouvé à la tête d’une production cinématographique de cette taille ?

Michael Herbig : Jusque là je n’avais dirigé que des sketches, pas de film. Un jour, le producteur Philip Voges m’a offert de réaliser Erkan & Stefan. Voges aimait tellement les sketches de Bullyparade qu’il était confiant dans le fait que je pourrais m’occuper d’un long métrage. C’était une merveilleuse opportunité et encore aujourd’hui je suis très content que tout ce soit aussi bien passé.

La Chaussure de Manitu est plus qu’une parodie, c’est un hommage à un genre et à des influences cinématographiques majeures. Est-ce qu’il était important pour vous de faire un film appréciable autant en tant que parodie que comme un western, même si particulier ?

Michael Herbig : Les principaux personnages étaient déjà très connus grâce à l’émission Bullyparade, mais les sketches avaient un look assez pauvre. Il était capital pour moi dès le début que la version grand écran ressemble à un véritable western. Des acteurs crédibles évoluant dans des extérieurs crédibles, un grand orchestre, le Cinemascope. Tout sauf les décors très trash des sketches télé !

L’idée de base était de mettre deux charmants personnages dans un contexte où il n’ont en principe rien à faire.

Un comique comme Mike Myers était étonnant dans Studio 54. Aimeriez-vous interpréter un rôle « sérieux » ou diriger un film non comique voire plus intimiste ?

Michael Herbig : Pour le moment je me sens chez moi dans le monde de la comédie. Sans parler du fait qu’il s’agit toujours, même avec la comédie, de spectacle, de divertissement et d’émotions. Qui sait, peut-être qu’un jour je tournerai un thriller. Coller les spectateurs à leur siège, leur donner des sueurs froides peut aussi être drôle.

(Astro)Croisière Surprise - Première époque est votre dernier film en date. Votre cible principale y est l’univers de Star Trek, si apprécié en Allemagne qu’il y eu même un Star Trek germanique avec Commando spatial (Raumpatrouille Orion). D’après vous pourquoi Star Trek est-il si populaire dans les pays de langue allemande ?

Michael Herbig : Probablement parce que c’est rediffusé sans interruption depuis 40 ans.

Après un énorme succès comme Manitou, il a dû être difficile de choisir le sujet de votre film suivant. Pourquoi (Astro)Croisière et pas Sissi, autre icône passée à la moulinette de la Bullyparade ?

Michael Herbig : (Astro)Croisière Surprise - Première époque est le premier film au monde choisi démocratiquement ! J’ai laissé le public de Bullyparade voter par internet pour choisir quel film je devrais faire (1). Si (Astro)Croisière Surprise avait été un échec, j’aurais pu dire que ce n’était pas ma décision (rires).

Avez-vous vu des parodies françaises comme La Tour Montparnasse Infernale et Asterix et Obelix : Mission Cléopâtre ? Connaissez-vous le comique français Alain Chabat et son travail pour la télévision et le cinéma ?

Michael Herbig : Je connais bien sur le Asterix mais je dois confesser que je n’ai pas souvent l’occasion de voir ce qui se fait à la télé française. Pour ce qui est du comique cinématographique français j’aime beaucoup les films de Louis de Funès !

Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?

Michael Herbig : En ce moment ? Je prépare les cadeaux de Noël.

Le réalisateur Frank Coraci (Le Tour du monde en 80 jours) nous a expliqué que pour lui la comédie est l’art de créer un effet comique auquel on ne s’attend pas. Quel est votre propre définition de l’art de la comédie ?

Michael Herbig : On peut rire de tout et de tout le monde tant que les gens que cela concerne peuvent en rire eux aussi. La comédie ne devrait jamais être offensante.

(1) Le public devait choisir entre La Chaussure de Manitu 2, Sissi – les années ménopausées d’une impératrice, Un film dont personne n’attend rien et (Astro)Croisière Surprise !

In English: http://tattard2.blogspot.com/2008/06/michael-herbig.html

(Entretien réalisé en 2004)

HERMANN JOHA (ALERTE COBRA & LE CLOWN)

« Timing ist alles» (Tatjana Sassmann dans Adrenaline, 1996)

Hermann Joha a littéralement inventé un genre, au-delà de toutes les limites de ce qui a été fait auparavant en matières de cascades et de séquences d’action pour le cinéma et la télévision. Le nom de sa compagnie de production, action concept, est la signature de ce nouveau genre. Le Clown (Der Clown), une de ses séries télévisées à succès, est devenu un très spectaculaire long métrage cinéma dirigé par Sebastian Vigg.

Avant d’être un producteur de séries et de films à plein temps, vous êtes un cascadeur et un concepteur de séquences d’action renommé. Comment vous êtes vous retrouvé dans le monde des cascades ?

Hermann Joha : Après l’école j’allais devenir transitaire mais c’était bien loin de ce que j’envisageais comme avenir. Alors à 17 ans j’ai décidé de partir à Londres rejoindre les « Hells Drivers ». A l’époque je me suis fait un nom en tant que plus jeune cascadeur d’Europe.

Le nom de votre compagnie, action concept, est très bien choisi, car vous avez une approche des séquences d’action tellement unique que dans certains pays comme la France, les téléspectateurs parlent de « style action concept ». Quelle conception de l’action aviez-vous à l’esprit lorsque vous avez créé cette compagnie ?

Hermann Joha : Comme nous réunissons tous les services de production d’un film, nous allons bientôt rafraîchir notre logo, sous lequel il sera écrit : « action concept - More than entertainment » (« action concept - Plus que du spectacle »). Le nom de la compagnie associé à ce slogan va exprimer tout ce que nous représentons : un service de production cinéma et télévision complet pour des formats d’action.

Vous avez travaillé en tant que coordinateur des cascades d’un excellent thriller appelé Adrenaline...

Hermann Joha : Merci !

Adrenaline contient tous les ingrédients qui font de votre style une référence aujourd’hui. Pourriez-vous nous dire quelques mots sur la façon dont vous avez conçu les séquences d’action de ce film ?

Hermann Joha : L’histoire et la mise en scène nous ont incité à innover pour créer des cascades inédites. Til Schweiger, qui jouait le personnage principal, était à ce moment-là et est toujours un des acteurs les plus populaires d’Allemagne. Il y avait aussi ces lieux très colorés et ce labyrinthe de montagnes russes du parc de loisirs Phantasialand, où une grande partie du tournage a été réalisée.

En tant que spectateur quelles sont, dans l’histoire du cinéma, vos séquences d’actions préférées ?

Hermann Joha : Une des séquences d’action que je préfère se trouve dans le film Ronin où se déroule une traque dans un véritable trafic routier, accompagnée par des caméras embarquées et pluieurs caméras en bordures de route.

Quels sont les cascadeurs que vous admirez le plus ?

Hermann Joha : J’admire chacun des membres de notre équipe de cascadeurs car ils donnent le meilleur d’eux-mêmes dans chaque séquence et sont les cascadeurs et cascadeuses les plus professionnels du monde. Mais, étant pilote d’hélicoptère professionnel, à titre personnel celui que j’admire le plus est Rainer Wilke. C’est un artiste des airs et il accomplit des cascades spectaculaires avec un hélicoptère.

La série Alerte Cobra (Alarm für Cobra 11) est probablement le titre le plus populaire d’action concept. Alerte Cobra fut d’abord produite par une autre compagnie. Comment action concept est-elle passée du statut de producteur des séquences d’action à producteur de la série elle-même ?

Hermann Joha : Effectivement, action concept a débuté en tant qu’unité de production de deuxième équipe sur Alerte Cobra. A l’époque, une fois encore, j’ai décidé d’aller de l’avant et proposé à RTL un service complet de production. Ils ont eu assez foi en nous et ont accepté !

Votre compagnie a créé un genre de séries télévisées totallement nouveau, sans équivalent même aux Etats-Unis, avec de l’action façon blockbuster chaque semaine en parfaite intégration dans des histoires bien construite et bien jouées. Comment les scénaristes et les artistes-cascadeurs collaborent pour réussir cette intégration ?

Hermann Joha : Lorsque RTL nous a mandatés sur Alerte Cobra, nous sommes rapidement devenus un service complet de production avec une équipe professionnelle de développement des contenus. Cette équipe est en charge des scripts, des storyboards et de la production des cascades. Tous nos départements, la post-production, les effets visuels, les effets spéciaux, etc. sont situés dans le même bâtiment. Cela rend la coopération et la coordination plus faciles et plus efficaces.

Vous êtes cascadeur et producteur mais aussi un réalisateur expérimenté. Votre travail a révélé de nombreux talents d’acteurs à une vaste audience.

Hermann Joha : Nous avons de merveilleux spécialistes du casting doués de la sensibilité indispensable pour trouver les bons « visages » et personnages.

Comment les acteurs se préparent-ils pour la partie action de leur travail lorsque c’est nécessaire ?

Hermann Joha : Les acteurs choisis doivent suivre un entraînement très dur avec les cascadeurs expérimentés de notre école de cascades.

Le Clown le film était attendu avec impatience par les fans de la série et ceux qui aiment le style action concept. Le Clown semble être un choix naturel pour une transition du petit au grand écran. Comment a-t-il été décidé de mettre cette série en hiatus pour produire le film ?

Hermann Joha : Il y a quelques années nous avons décidé de faire une pause avec Der Clown. De nombreux fans continuaient de nous demander de nouveaux épisodes et nous avons pensé produire un téléfilm d’action tiré de la série.

Lorsque nous avons planché sur le sujet, le développement du projet est allé plus loin et nous avons choisi de produire un long métrage pour le cinéma.

Pourriez-vous nous parler de la production, du casting et du tournage ?

Nous avons eu la chance de pouvoir retrouver le casting d’origine pour le film. Malheureusement, Diana Frank avait un autre engagement et elle n’était pas disponible. Avec Götz Otto (Demain ne meurt jamais) et Xenia Seeberg (Lexx) nous avons pu convaincre deux acteurs merveilleux avec une crédibilité et une experience à l’échelle internationale de participer au projet.

Le film a été réalisé en 38 jours. Les séquences d’action ont été tournées en 12 jours avec 10 cascadeurs et deux cascadeuses. La post-production a été entièrement réalisée chez nous.

A propos du casting on ne peut éviter d’aborder le sujet du sort du personnage de Claudia Diehl dans le film puisque Diana Frank est très appréciée en France. Son remplacement par Eva Habermann (dans le rôle de la soeur de Claudia), une des vedettes de votre série Anges de choc, est un très bon choix. Comment l’idée de la mort de Claudia a-t-elle fait surface ?

Hermann Joha : Les fans n’auraient pas accepté une autre histoire car Claudia n’aurait jamais quitté l’équipe pour quelque raison que ce soit. Eva Habermann était notre premier choix pour le remplacement de Diana et par chance elle était disponible. C’est une des actrices les plus populaires en Allemagne.

La série Anges de choc n’a pas eu la moindre chance de prouver ses qualités, à cause de la comparaison avec les Charlie’s Angels, mais cette série était très agréable et distrayante. Allez-vous reproposer ce format avec quelques changements ?

Hermann Joha : Nous venons de le faire. Les « nouvelles » Wilde Engel sont plus modernes, plus sexy et plus « cool ». Ce sont trois jeunes femmes chacunes spécialisées dans un certain domaine : l’une est experte dans l’art du déguisement. La deuxième « ange » est experte en arts martiaux et la troisième est passionnée de technologie et sait tout sur les machines et les ordinateurs.

Et surtout c’est Udo Kier qui interprète leur patron. Il est un des visages les plus connus de Hollywood. Ça n’a pas été facile de le faire revenir en Allemagne, mais lorsqu’il a lu le script il a été agréablement surpris et intéressé par le fait qu’une compagnie allemande soit capable de monter pareil projet.

Le marché de la télévision en Allemagne est très compétitif. Avec Alerte Cobra et Le Clown vous avez établi les standards d’un nouveau genre que vos autres titres sont condamnés à égaler et transcender.

Hermann Joha : Notre équipe travaille constamment au développement de nouvelles histoires et de cascades inattendues. Nous sommes experts dans la production de formats d’action et nous continuerons à nous améliorer dans ce domaine.

Avec le film du Clown action concept est définitivement un acteur majeur dans l’industrie du film d’action. Votre compagnie propose des séquences d’action jamais vues ailleurs. Est-il envisageable que vous lanciez un jour une franchise qui pourrait être la réponse allemande à James Bond ?

Hermann Joha : Nous y travaillons... Début avril GRB Worlwide et action concept ont annoncé un partenariat pour le developpement, la production et la distribution de séries d’action tournées en anglais. Le premier projet annoncé dans le cadre de cet accord est Ronin, une série d’action basée sur le film à succès de 1998 avec Robert De Niro et Natacha McElhone. Nous attendons beaucoup de cette coopération.

Comme nous l’avons dit vous êtes réalisateur. Quels sont vos films et réalisateurs préférés ?

Hermann Joha : Mes films préférés sont Speed, True Lies, L’Arme fatale et Terminator. Le réalisateur que j’admire le plus est monsieur Steven Spielberg.

Sur quoi travaillez-vous en ce moment et quels sont les prochains projets cinéma ou télévision de action concept ?

Hermann Joha : Nous travaillons actuellement sur différents projets. Il y a bien sur Alerte Cobra et le déjà mentionné Ronin. Nous préparons plusieurs téléfilms en anglais avec des distributions de grande classe. Par exemple pour Dark Ride (tourné à Berlin), nous avons pu engager Drew Fuller (Charmed), Ken Bones - membre de la Royal Shakespeare Company (Wing Commander, Lasko), Tanja Wenzel (Anges de chocs), Alison King (Submerged, Shanghai Kids).

In English: http://tattard2.blogspot.com/2008/06/hermann-joha.html

(Entretien réalisé en 2005)

(C) THIERRY ATTARD

vendredi 13 juin 2008

V POUR VENDETTA

A Vincent DAVY et Tristan HARVEY

Dans un futur pas assez lointain, le Royaume Uni est dirigé d’une poigne de fer par le Haut Chancelier Adam Sutler. Le Doigt, la milice politique du régime maintient l’ordre établi dans les rues et réprime les minorités, tandis que British Television Network, la chaine de télévision à la solde du gouvernement le fait dans les esprits. Evey Hammond, une jeune femme employée par BTN, voit son destin lié à jamais à celui d’un mystérieux personnage portant masque et cape qui se fait appeler « V ».

« V » a un agenda caché, où la date du 5 novembre est marquée de rouge: « Souviens toi, souviens toi du 5 novembre 1605 ».

« Don’t it always seem to go that you dont know what you’ve got till its gone. » (Joni Mitchell)

« London is drowning-and I live by the river. » (The Clash)

L’équilibre entre les différentes composantes de la société britannique a longtemps reposé sur un pacte implicite entre les puissances dirigeantes et les populations dirigées, un deal entre forces inégales dans un intérêt commun signé des trois couleurs de l’Union Jack, le drapeau du Royaume Uni. Et de nombreux penseurs britanniques conscients jusqu’à la prescience de la fragilité de cet accord tacite se sont interrogés sur ce qui se passerait si, dans un pays où la constitution n’est pas écrite mais coutumière, le deal était rompu de manière brutale par un gouvernement n’ayant plus à offrir que l’exercice à l’excès des attributs de ses fonctions régaliennes de base : police, justice et armée.

CINQ MINUTES DANS LE FUTUR

« Il essaya d’extraire de sa mémoire quelque souvenir d’enfance qui lui indiquerait si Londres avait toujours été tout à fait comme il la voyait. » (George Orwell, 1984)

Nombreuses sont les œuvres littéraires, télévisuelles et cinématographiques anglaises qui se sont plongées « cinq minutes dans le futur » (comme disait le sous-titre de la série Max Headroom) pour spéculer sur l’ idée d’une Angleterre dirigée par un gouvernement totalitaire : 1984 d’Orwell (1950), bien sûr - ainsi que ses adaptations de 1954 (par la BBC) et de... 1984 (avec John Hurt), mais aussi des feuilletons comme l’oublié The Guardians (1971), 1990 (1977) ou le sous-estimé Les Epées de feu (Knights of God, 1987).

De cette catharsis politico-artistique dont ne furent exemptés ni les Etats-Unis (de It can’t happen here, le roman de Sinclair Lewis écrit des années avant 1984, à la mini-série V), ni la France (Les Hordes, 1991), V pour Vendetta - le roman graphique comme le film - sont les avatars les plus proches de nous. Parce que le futur c’est dans cinq minutes...

Cauchemar de papier : 1997 dans une Angleterre dirigée par un parti fasciste après un « hiver nucléaire » et une longue série d’émeutes, Evey Hammond, une jeune fille de 16 ans, est interpellée par des hommes de la police politique du régime alors qu’elle tentait de se prostituer durant le couvre-feu en vigueur. Elle est sauvée d’un sort peu enviable par un mystérieux et théatral anarchiste costumé qui se fait appeler « V » et qui porte un masque de Guy Fawkes, l’auteur de la Conspiration des Poudres de 1605 - l’homme qui voulait faire sauter le parlement britannique.

« L’Angleterre vaincra. » (Le Leader, V pour Vendetta, de Alan Moore et David Lloyd)

Les personnages de V pour Vendetta (http://thierryattard.blogspot.com/2008/05/v-pour-vendetta.html) apparaissent pour la première fois en 1982 dans le magazine britannique Warrior, un périodique indépendant de bande dessinée concurrent de 2000AD, la revue abritant les aventures de Dan Dare (une espèce de Buck Rogers anglais). L’auteur Alan Moore imagine un Royaume Uni sous dictature et apporte au récit non seulement ses références culturelles et artistiques, mais surtout un véritable talent d’écrivain et ses préoccupations politiques du moment : Margaret Thatcher est alors Premier ministre d’un gouvernement britannique ultra-conservateur et mène très fermement une politique d’inspiration libérale dans un pays qu’elle avait trouvé à son arrivée économiquement exsangue.

L’artiste David Lloyd, transfuge de la branche anglaise de Marvel Comics, illustre les sombres visions de Moore, avec lequel il offre au personnage un élément primordial de sa mythologie, à savoir le costume et le masque de Guy Fawkes, figure historique de la culture populaire anglaise (une comptine y fait référence). V pour Vendetta est publié durant trois ans en noir et blanc dans Warrior et disparaît avec l’arrêt de la revue, alors qu’un épisode tout juste terminé allait être publié.

DC POUR DOUBLE COUCHE

En 1988, la compagnie DC Comics, foyer de Batman et de Superman, republie en couleur (grâce aux coloristes Steve Whitaker et Siobhan Dobbs) les épisodes de V pour Vendetta publiés par Warrior et enchaîne avec la suite très attendue des aventures du justicier anarchiste masqué. Alan Moore et David Lloyd sont toujours aux commandes. Tony Weare assiste Lloyd sur deux épisodes (et dessine par ailleurs un épisode complet).

« Nous avons toujours eu conscience qu’existait la possibilité que V devienne un film. La vente des droits faisait partie du contrat signé avec DC. » (David Lloyd)

L’ensemble est ensuite réuni sous la forme d’un très beau roman graphique par Vertigo, filiale de DC. C’est alors que le producteur de cinéma Joel Silver découvre V pour Vendetta et décide d’acheter les droits d’adaptation, sentant que le potentiel commercial du personnage. (« V est un super-héros, un super-héros aberrant mais c’est un super-héros »).

« Les mots sont le support de la compréhension et pour ceux qui les écouteront l’énonciation de la vérité » (V)

Les frères Andy et Larry Wachowski, co-scénaristes de Assassins (1995) pour Joel Silver et fans de V pour Vendetta rédigent un traitement, qu’ils transforment en scénario entre la production du deuxième et du troisième épisode de Matrix. Le développement du film est lançé sous l’égide de Silver, associé naturellement à Warner Brothers, le studio parent corporatif de DC Comics.

Joel et Andy Wachowki déplacent le récit des années 1990 vers un contexte d’anticipation plus contemporain et l’adaptent à un format narratif plus cinématographique. Ils condensent le roman graphique très dense (Joel Silver reconnaît qu’il aurait fallu faire un film de plusieurs heures pour l’adapter fidèlement) et le recentrent sur la relation entre V et Evey Hammond, qu’ils transforment en une jeune femme plus mature et plus indépendante que l’adolescente de la bande dessinée.

« Les idées ne saignent pas, elles ne ressentent pas la douleur et elles ne peuvent aimer. » (Evey)

DERRIERE LE MASQUE

Les frères Wachowski proposent le poste de réalisateur à l’australien James Mc Teigue, réalisateur publicitaire et surtout premier assistant sur la trilogie Matrix. Le tournage de l’adaptation de V pour Vendetta commence en mars 2005 avec le britannique James Purefoy dans le rôle du justicier capé et masqué, et Natalie Portman - préférée à Scarlett Johansson et à Bryce Dallas Howard - dans le rôle d’Evey.

« Encore dans un souci de vérité, si vous cherchez le coupable, regardez simplement dans un miroir » (V)

Purefoy quitte le film après seulement six semaines. Motif invoqué : des difficultés à rester derrière le masque tout au long du film. Ce départ est une bénédiction déguisée car les frères Wachowski, producteurs du film, et Joel Silver, se tournent alors vers Hugo Weaving, le talentueux acteur australien (d’adoption, il est né au Nigeria) aux crédits impressionnants puisqu’il compte Priscilla folle du désert, la trilogie Matrix et celle du Seigneur des anneaux dans sa filmographie. Le tournage dure trois mois aux studios de Babelsberg, en Allemagne, et à Londres, avec un budget estimé de 54 millions de dollars US (le film est une co-production américano-germanique).

Portman et Weaving partagent l’écran avec une distribution britannique de premier ordre éclairée par la présence des deux Stephen : Stephen Fry et Stephen Rea. Le comédien, acteur et homme de télévision anglais Stephen Fry est plus « oscarwildien » que jamais dans le rôle de Gordon Deitrich, présentateur et producteur de talk-show.

« Une copie du Coran, 14ème siècle.
- Tu es musulman ?
- Non, je suis à la télévision. » (Gordon Deitrich et Evey)

Quand Evey lui demande s’il prend toujours tout à la rigolade, Gordon lui répond : « Seulement les sujets importants ». Cet homme esthète (il possède un exemplaire du Coran pour ses illustrations) et cultivé dissimule son homosexualité - les homosexuels font partie des persécutés du régime de Sutler, sa tristesse et sa lassitude derrière un ton faussement débonnaire. Il se suicide au sens propre comme au sens figuré en une seule émission.

NOVEMBRE EN MARS

« Ue seule chose est valable pour tous les gouvernements. Les dossiers les plus fiables sont toujours les dossiers fiscaux. » (Finch)

L’acteur irlandais Stephen Rea (The Crying Game) est Eric Finch, le policier désabusé sur la piste de « V » qui confie ses doutes à son subordonné Dominic (Rupert Graves) et méprise en silence Creedy, le chef du Doigt - « Votre mère était irlandaise, n’est-ce pas ? » (Tim Pigott-Smith).

« V » affronte de bien redoutables adversaires en la personne du cruel Creedy et celle du chancelant Chancelier Sutler. Adam Sutler, ex-sous secrétaire d’Etat à la défense auto-proclamé « Haut Chancelier » (« La sécurité de cette nation repose sur une complète et totale soumission ») a le visage barbu de John Hurt, qui était dans le camp adverse lorsqu’il interprétait le Winston Smith de 1984. Mais le plus redoutable d’entre tous n’est autre qu’Alan Moore, le co-créateur du roman graphique V for Vendetta en personne.

« Je ne suis pas venu pour punir vos espoirs, je suis venu pour punir vos actes. » (V)

Totalement insatisfait du travail d’adaptation de son histoire pour différentes raisons tant narratives que politiques, Moore demande à ce que son nom soit retiré du générique, ce qui est fâcheux pour le plan marketing du film. Des intellectuels anarchistes se joindront d’ailleurs à ses objections.

Plus fâcheux encore, la date de sortie annoncée du 4 novembre 2005 est reportée de plusieurs mois. Certains évoquent une conséquence des attaques terroristes survenues dans le métro londonien en juillet 2005 mais la production attribue ce délai à la somme de travail sur les effets spéciaux visuels. Le film sort finalement aux Etats Unis le 17 mars 2006 et est dans l’ensemble plutôt bien accueilli par la critique et les spectateurs. En outre il relance de manière spectaculaire l’intérêt pour le roman graphique d’Alan Moore et David Lloyd republié aux Etats-Unis et en Angleterre par Vertigo et Titan Books (http://www.titanbooks.com/).

DVD POUR VENDETTA

« Appelle moi V. »

V pour Vendetta, le film, sublime certaines scènes du roman graphique, que James Mc Teigue traite avec un très grand respect du style de David Lloyd. Bien sûr les scènes d’action rappellent inévitablement celles des Matrix mais la tutelle bienveillante des frères Wachowski ne dénature pas l’œuvre originale. La photographie de Adrian Biddle (dont ce fut malheureusement le dernier film) est à l’avenant de l’ambiance visuelle du roman graphique et la bande originale, avec des compositions de Dario Marinelli ainsi que des standards de la chanson judicieusement placés, est en harmonie avec la place que Moore accordait à la musique dans son récit.

Le film de Mc Teigue est une adaptation très réussie qui peut s’apprécier indépendamment du travail d’Alan Moore et David Lloyd ou conjointement à celui-ci. Il s’inscrit dans la lignée des grands films « dystopiques » produits par la MGM dans les années 1970 tels que Soleil VertL’âge de cristal. Même si on peut remonter le genre au Metropolis de Fritz Lang (1927) et qu’il semble avoir de beaux jours devant lui avec des œuvres comme Les Fils de l’Homme (Children of Men, 2006), sans doute parce que le présent des spectateurs tend à ressembler de plus en plus aux avenirs décrits dans ces longs métrages.

« Tu crois que les gens vont avaler ça ?
- Pourquoi pas ? On est à la BTN. Notre job c’est de rapporter les infos, pas de les fabriquer. Ca c’est le boulot du gouvernement. »


Peut-être que la très réussie version 2004 de Un crime dans la tête était un signe avant-coureur d’un véritable retour de l’introspection politique dans les productions des Majors. Ce qui amène à la grande question soulevée par les reproches faits par Alan Moore au scénario du film : V pour Vendetta déplace t’-il le conflit entre fascisme et anarchisme du roman graphique vers la thématique plus américanisante du néo-conservatisme bushien contre le libéralisme (tel qu’on entend le mot aux Etats-Unis, autrement dit une philosophie politique de « gauche », et non le libéralisme économique) ?

La réponse est clairement négative, d’abord parce que ce film américano-allemand est bien plus britannique dans sa production et dans l’esprit que, par exemple, le dernier James Bond (cf. lors du combat entre V et les hommes de Creedy un « through the gunbarrel » en clin d’œil, bien plus bondien que celui de Casino Royale). Ensuite, parce que le totalitarisme n’est dans l’absolu malheureusement pas un thème exclusif à quelque pays que ce soit (voir supra).

Warner Home Video propose en zone 2 une excellente édition collector en deux DVD (le premier contenant le film et le second des bonus), parfait passeport pour découvrir ou redécouvrir non seulement ce chef d’œuvre d’action, d’émotion et de réflexion, mais aussi pour découvrir le roman graphique de David Lloyd et Alan Moore. Warner Brothers, plus que jamais le studio qui réconcilie industrie et art et c’est bien réconfortant.

« Il était chacun de nous. » (Evey Hammond)

BLACKPOOL (KOBA FILMS VIDEO)

A Blackpool, le flamboyant Ripley Holden, petit entrepreneur propriétaire d’une salle de jeux, veut bâtir un hôtel-casino. Il a une magnifique maison, une superbe épouse et deux enfants. Certes, un petit groupe veut contrecarrer ses projets, il a un arriéré d’impôts et sa fille veut se marier avec un homme plus vieux qu’elle, mais Ripley a foi en son rêve.

Jusqu’au jour où il trouve un cadavre au beau milieu de son établissement. Le Detective Inspector Carlisle débarque alors dans la station balnéaire en renfort sur l’enquête policière et le rêve de Ripley Holden se fissure de toutes parts.

Le DVD est aujourd’hui clairement le meilleur moyen d’apprécier une série télé dans de bonnes conditions, surtout lorsqu’il s’agit de découvrir une production britannique de très grande qualité, toujours étrangement snobée par les chaînes hertziennes françaises en clair.

Heureusement, Koba Films Video (http://www.kobafilms.fr/index.php?option=com_frontpage&Itemid=51) s’est fait une spécialité de proposer en DVD les fleurons de la fiction télé britannique contemporaine : Les Arnaqueurs VIP, La fureur dans le sang, Life on Mars, State of Play – Jeux de pouvoir, et bien d’autres… Il n’est donc guère surprenant que ce distributeur nous propose un chef d’œuvre tel que Blackpool.

LES JEUX DE RIPLEY

« Sa trinité : sa famille, l’argent et Blackpool. Pas forcément dans cet ordre. » (D.C. Blythe)

Ripley Holden (David Morrissey) est propriétaire d’une arcade sur le front de mer, à Blackpool, et d’un immeuble vétuste qu’il a l’intention de faire raser pour transformer sa salle de jeux en un gigantesque hôtel-casino comme ceux que l’on trouve à Las Vegas, afin d’apporter sa version très personnelle du rêve américain dans cette station balnéaire anglaise. Il a un bagout de télévangéliste (« Celui qui a recevra encore et il sera dans l’abondance »), de l’aplomb, une haute stature, des favoris à la Elvis Presley (dont il possède par ailleurs les intonations), des costumes de texan, une grosse voiture américaine, ainsi qu’une magnifique maison avec piscine baptisée « Shangri-La ».

Sa charmante épouse, Natalie (Sarah Parish), bénévole dans une association d’écoute, ainsi que Shyanne (Georgia Taylor), sa fille de 20 ans, et Danny, son jeune fils (Thomas Morrison), endurent son extravagance avec plus ou moins d’indulgence. Ses employés, Ruth (Jacqueline Pilton) et Barry (Jim Whelan), comme ses amis le policier Jim Allbright (David Hounslow) et Terry Corlette (John Thomson), ont investi dans son ambitieux projet (« Vous me remercierez d’avoir sorti Blackpool de la Préhistoire »). Hailey (Lisa Millett), une prostituée qui réside dans l’immeuble de Ripley (mis au nom de son épouse pour raisons fiscales) recueille ses confidences et Adrian Marr (Steve Pemberton), son expert-comptable, ses railleries à défaut du paiement de son arriéré d’impôts (« J’ai une mutuelle, je paie l’école de mes gamins. A quoi l’Etat consacrerait ce fric ? »).

« Que vous conseillent-ils ? Aller à la banque, ouvrir un plan de retraite. C’est aussi risqué que le jeu mais sans l’éclate. » (Ripley Holden)

Ripley Holden s’amuse, le jeu c’est sa vie (« La salle de jeux, c’est la bourse du peuple »). Des difficultés de financement, l’idylle de sa fille Shyanne avec Steve (Kevin Doyle), un régisseur de théâtre qui a le même âge que lui, et les protestations de l’Anti Gambling Alliance (« Vegas Never ») – un petit groupe contre le jeu dirigé par le religieux Hallworth (David Bradley) – ne ternissent pas le rêve. D’ailleurs, tout le monde rêve chez Ripley : Chantelle (Michelle McCaw) – mère célibataire qui y dépense ses allocations (« C’est comme l’économie de marché. Si c’était que de la chance y aurait plus de banquier ») – un prêtre, un mathématicien amateur qui cherche la martingale…

LES LUMIERES DE BLACKPOOL

« Car Ripley Holden a trouvé sa place, sur le front de mer. » (Ripley Holden)

Réalisé par Coky Giedroyc et Julie Anne Robinson en 2004, Blackpool (6 épisodes de 58 minutes) a été écrit par Peter Bowker, scénariste en 2003 d’une brillante version modernisée des Contes de Canterbury de Chaucer (il renouvellera l’exploit deux ans plus tard sur Songes d’une nuit d’été pour la série ShakespeaReTold). La seule présence dans le rôle principal de David Morrissey (State of Play, The Deal…), un des plus grands acteurs britanniques de ce siècle, justifierait en soi que l’on s’intéresse à cette œuvre estampillée du sceau si prestigieux de la BBC – gage de qualité s’il en est.

Mais deux « ingrédients » font de Blackpool une œuvre vraiment intéressante. Le premier, c’est son style : la trame narrative est introduite et ponctuée par des séquences surréalistes où les personnages accompagnent en chantant et en dansant des standards de la chanson (le premier épisode s’ouvre sur le célèbre Viva Las Vegas d’Elvis Presley), selon un procédé popularisé par le grand Dennis Potter (1935-1994), auteur, entre autres, classiques de l’immortel Du rouge à lèvres sur ton col (Lipstick on your collar, 1993).

« Selon Freud, les blagues trahissent le subconscient.
- Tiens donc ! Un flic qui a lu un bouquin…
- Avec deux je dirigerais une salle de jeux. »
(Ripley et Carlisle)

Le deuxième élément d’intérêt majeur de Blackpool c’est l’Ecossais le plus célèbre du Royaume-Uni, aujourd’hui connu comme étant la dixième incarnation du personnage le plus populaire et le plus vénéré de la télévision britannique. Dans State of Play – Jeux de pouvoir David Morrissey côtoyait John Simm. Blackpool est illuminé par le face à face entre Morrissey et David Tennant, qui deviendra un an après la vedette de cette véritable institution qu’est la série Docteur Who.

THE SINGING DETECTIVE

« Etonnant, je pensais cette ville oubliée par le cappuccino » (D.I. Blythe)

David Tennant est le D.I . Peter Carlisle, un policier d’origine écossaise. Il est cultivé, sarcastique (« Comment on appelle une femme veuve avant le mariage ? Une pré-veuve ») et grand amateur de pâtisseries. Lorsque Ripley Holden découvre le cadavre de Mike Hooley (James Cartwright) sur le sol de sa salle de jeux, Carlisle est envoyé spécialement à Blackpool en renfort pour enquêter sur cette affaire en compagnie de son jeune adjoint, le D.C. Blythe (Bryan Dick). Il lui confie : « Un ami à moi a grandi à Blackpool, il y a longtemps. Tu sais pourquoi il n’aimait pas cette ville ? Quand c’était pas Newcastle c’est Glasgow qui les éclatait. Quand c’était pas Manchester c’était Liverpool. Blackpool perdait à tous les coups » .

« Il est comment, le gérant ?
- Un con.
- Coupable ?
- Les cons n’ont pas de morale ? »
(Blythe et Carlisle)

Les soupçons de Carlisle se portent immédiatement sur Ripley Holden, lequel n’apprécie pas que le policier ferme temporairement son établissement durant l’enquête préliminaire (« Ne jamais rien dire à un flic, même pas l’heure »). La veille, Ripley avait surpris Hooley tentant de trafiquer une de ses machines et il avait eu une petite altercation avec lui quelques heures après devant témoins.

Cynique (« Comme moi vous travaillez dans le service public » dit-il à Hailey), Peter mène son enquête avec une rigueur intellectuelle d’universitaire qu’il camoufle derrière une apparente décontraction (il interroge les témoins au théâtre local ou de manière « informelle » au commissariat). Philosophe, il explique à son jeune adjoint que le jour où celui-ci tombera amoureux, il comprendra que « le cœur est un organe complexe et capricieux », sans savoir combien son affirmation est prémonitoire.

THIS IS NOT AMERICA

« Un gars comme vous peut pas comprendre Blackpool. » (Ripley Holden)

Blackpool est un véritable feu d’artifices de talents artistiques comme seule la télévision britannique est capable de nous en offrir. L’ensemble de la distribution – avec en tête le trio composé de David Morrissey, Sarah Parish et David Tennant (Parish et Tennant se retrouveront dans The Runaway Bride, un spécial de Noël de Docteur Who, ainsi que dans Recovery) – est à l’aise aussi bien dans les scènes dramatiques que dans les numéros musicaux sur des titres populaires comme Should I stay or should I go, (The Clash), The Boy with the thorn in his side, (The Smiths) ou Don’t stop me now, (Queen).

La mini-série a donné naissance à une suite en 2006, sous la forme d’un téléfilm de 90 minutes intitulé Viva Blackpool, (titre sous lequel Blackpool a été diffusé aux Etats-Unis en 2005) – avec David Morrissey et Georgia Taylor [téléfilm dont nous espérons qu’il sortira en DVD en France, NDA]. Les Américains ne se privant jamais de venir chercher en Europe les bonnes idées de leurs cousins britanniques pour en faire des remakes (on attend sans impatience le State of Play, avec Russell Crowe et la version américaine de Life on Mars), Viva Laughlin, (2007), le Blackpool, américanisé, fut une des prémices d’une saison télé américaine 2007-2008 absolument désastreuse (grève des scénaristes oblige).

Supprimée par le réseau CBS au bout de seulement deux épisodes, cette série produite par l’acteur Hugh Jackman, fut qualifiée par le New York Times de « vraisemblablement le pire show de toute l’Histoire de la télévision ». Comme quelqu’un le faisait remarquer en réponse à un excellent article du quotidien anglais The Guardian sur Viva Laughlin, il serait peut-être nécessaire d’expliquer à certains ce que signifie le B de BBC (« C’est toujours un détail qui fait que tout s’écroule »).

Des personnages complexes, drôles, attachants et émouvants ; une bande originale sublime ; une histoire fabuleuse (quand Shakespeare rencontre Top of the Pops, mythique émission musicale de la télé britannique) avec des répliques d’anthologie (« Les maçons aimaient Boy George avant de savoir que c’était un mec ») ; des acteurs magnifiques…

Le rôle d’une vie pour David Morrissey – qui ne déçoit jamais quoi qu’il fasse (http://thierryattard.blogspot.com/2008/02/basic-instinct-2-de-michael-caton-jones.html). Un grand numéro d’acteur de David Tennant, qui confirmera avec Casanova (2005) et son incarnation du Docteur. « It’s a nice day to start again ». Allez donc passer quelques heures dans la salle de jeux de Ripley Holden à Blackpool. Comme dirait Peter Carlisle : « Proust ivre mort aurait décrit ces moments » .

jeudi 12 juin 2008

AMANDA

Stephen Arden (Ralph Bellamy), avocat, a un problème : sa fiancée, la charmante Amanda Cooper (Ginger Rogers), une chanteuse vedette de la radio, refuse d’aller plus loin dans son engagement avec lui. Il sollicite l’aide de son meilleur ami, le docteur Tony Flagg (Fred Astaire), un psychanalyste, pour qu’il mette sa science au service de la compréhension des sentiments de la belle.

« Encore une idiote écervelée et inadaptée à l’esprit embrouillé. » (Tony)

SHALL WE PLAY

Amanda (Carefree), réalisé en 1938 par Mark Sandrich, marque le retour du duo Astaire-Rogers après une brève « séparation » le temps d’un film, Une demoiselle en détresse – réalisé la même année par George Stevens (un quasi-véhicule pour le couple George Burns et Gracie « Say goodnight Gracie » Allen) . Formé incidemment avec le film Carioca (Flying down to Rio, 1933), le dynamique duo dansant de Fred Astaire et Ginger Rogers se réunit à nouveau sous l’égide de Sandrich après le jouissif et insolent L’entreprenant M. Petrov.

« Amanda machin chose »

Si le cahier des charges habituel à ce genre d’exercice est rempli au delà de toute espérance, ne fut-ce que par la simple présence dudit Mark Sandrich à la réalisation, de Hermes Pan (alter-ego d’Astaire) à la chorégraphie et de l’inévitable divinité musicale de l’époque – ici Irving Berlin – Amanda se distingue des autres Astaire-Rogers par la prédominance de la comédie loufoque, les numéros musicaux étant certes magiques (pouvait-il en être autrement ?) mais moins nombreux que dans les précédents. Le seul générique distingue cet opus : un doigt trace, avec la fluidité d’un danseur de ballet, les crédits sur une ardoise (une performance qui aurait eu sa place dans l’émission britannique Déclic).

« Je voulais être danseur mais la psychanalyse m’a détrompé. » (Tony)

Carefree est en vérité bien plus proche du théâtre de boulevard, avec son comique de situation et ses répliques superbement pensées en équipe par Marian Ainslee, Guy Endore, Dudley Nichols et Hagar Wilde, que de la « comédie musicale ». On a dit plus tard qu’Astaire lui-même aimait particulièrement ce film qui lui a permis d’exprimer son don pour la comédie et de ne pas seulement être le danseur du dessus.

LA JOYEUSE DISJONCTEE

« Il va te psychanalyser à bicyclette. » (Cora)

Fred Astaire est Tony Flagg, sémillant psychanalyste. Rappelons qu’à l’époque, Edward Bernays (1891-1995), neveu de Sigmund Freud et inventeur des « relations publiques », faisait la promotion des idées de son oncle aux Etats-Unis. Astaire est tout à fait crédible en psy branché (le mot n’existait pas dans les années 1930) et préfigure les personnages de séducteurs interprétés par Richard Gere ou Hugh Grant dans les comédies romantiques de la fin du vingtième siècle. L’alchimie sur pellicule avec Ginger Rogers fonctionne plus que jamais, tant dans la danse (cela va sans dire) que dans le jeu de la séduction à l’écran comme du jeu tout court, avec des échanges savoureux tels que « Comprenez que j’essaie juste de vous aider à vous trouver – Si je me perds, je vous appelle ». Rogers lui renvoie la balle avec un charme de séductrice (« C’est votre subconscient qui frappe ») tout droit sortie d’un film d’Orson Welles. Et de manière surprenante, le film offre à son personnage l’opportunité de se déchaîner sous hypnose dans le plus pur style loufoque

« Utilisez vos freins, docteur » (Amanda)

Le jeu du duo est mis en valeur par un casting secondaire étonnant, à commencer par Ralph Bellamy dans le rôle de Stephen, un rôle que l’on croirait écrit pour Edward Everett Horton (« Si vous tombez sur mon estomac, merci de me le faire parvenir »). Bellamy, dont on oublie trop vite qu’il ne fut pas qu’un des vieux grigoux du film Un fauteuil pour deux (1983), est extraordinaire dès la première scène d’Amanda. Avec Fred Astaire (« Avant tu ne buvais jamais. Depuis quand tu es pinté ? – Trois jours. Hier, aujourd’hui et demain ») et le grand Jack Carson dans le rôle de Thomas, l’aide soignant, ils forment un agréable trio comique dont le sommet est la scène des cabines téléphoniques. Luella Gear est Cora, la tante décomplexée d’Amanda. Elle n’est pas négligée par le pool de scénaristes qui lui a ciselé d’incroyables répliques comme « Je veux bien être analysée par lui sur ma bicyclette ou sur autre chose d’ailleurs » et un somptueux running gag avec le juge (« Rasseyez-vous, Joe »).

Des formidables numéros de danse (Astaire et un club de golf...), des scènes comiques de grande classe (le rêve du petit chaperon rouge), des clins d’oeil (Le Saint à Manhattan), des répliques d’orfèvre. Du grand Astaire-Rogers dans une très belle copie dvd des Editions Montparnasse avec une sympathique présentation de Serge Bromberg. Un classique à posséder absolument.