vendredi 16 mai 2008

STEPHEN TOBOLOWSKY'S BIRTHDAY PARTY

A Bob DARNELL

Vous êtes invités à la fête d'anniversaire d'un des plus grands acteurs américains contemporains. Durant une heure et demie, chez lui à Los Angeles, et en compagnie de ses amis ainsi que de sa charmante épouse Ann Hearn, vous l'écouterez nous narrer avec son immense talent de conteur quelques anecdotes sur sa carrière et sa vie. Vous êtes invités à... L'Anniversaire de Stephen Tobolowsky.

« Vous savez, ce que j'aime le plus à Los Angeles c'est que vous êtes seulement à une heure de l'océan, des montagnes, du désert, de la neige, des tremblements de terre, des raz-de-marée, des incendies... C'est comme l'enfer mais avec de bons restaurants. » (Stephen Tobolowsky)

BEING STEPHEN TOBOLOWSKY

Tout le monde aime Stephen Tobolowsky, tout le monde a dans sa vidéothèque un si ce n'est plusieurs des films qu'il a tournés, tout le monde l'a vu au moins une fois à la télévision. Il suffit de parler d'un de ses rôles à quelqu'un pour que le visage de cette personne s'illumine d'un sourire radieux. Le grand public adore Stephen Tobolowsky... mais ignore son nom.

C'est que Stephen Tobolowsky n'est pas une « star », il ne fera jamais la une de la presse People et ne vendra jamais un de ses films en offrant sa vie privée en pâture. S'il est aussi réalisateur et metteur en scène de théâtre, Stephen Tobolowsky est surtout la quintessence de ce qu'on appelle aux Etats-Unis un « character actor », un acteur à personnages. Il est même un des plus éminents représentants de ces acteurs que l'on nomme à tort en français des « seconds couteaux » : le leader du KKK dans Mississipi Burning, l'agent d'assurances qui enquiquine Bill Murray dans Un jour sans fin/Le jour de la marmotte, le mari amnésique dans Memento, le méchant de Garfield, le procureur adjoint de la série Les Experts : Miami, c'est lui et bien d'autres encore.

Robert Brinkmann, directeur de la photographie réputé (le célèbre documentaire musical U2: Rattle and Hum, Disjoncté/Le Gars du câble avec Jim Carrey...) et pionnier de la production et la réalisation de vidéo-clips pour des artistes tels que Whitney Houston ou Céline Dion, connaît Stephen Tobolowsky depuis 1987. Fasciné par les anecdotes savoureuses que l'acteur aime raconter lorsqu'il est en compagnie, Brinkmann décide d'en faire un film et en parle à son ami. Le projet mettra une quinzaine d'années avant de se concrétiser.

DANS LA CUISINE DE STEPHEN TOBOLOWSKY

« Lorsque vous devez faire la cuisine pour vingt personnes voire plus vous avez deux options : pizza ou barbecue. Choisissez toujours le barbecue. » (Le cuisinier)

Une main craque une allumette à la manière de celle de Bruce Geller dans le générique de la série Mission : Impossible mais c'est pour allumer une bougie. En voix-off Robert Brinkmann invite ses spectateurs à la fête d'anniversaire de Stephen Tobolowsky sur fond d'une fugue de Bach interprétée au piano par l'acteur en personne (comme tous les morceaux que l'on entend dans le film).

« Cette ville, Los Angeles, repose sur des gens qui passent leur temps à vous dire non. Ils disent non aux acteurs, aux scénaristes, aux réalisateurs, à tout le monde. Ils ont même dit non à Steven Spielberg quand il a voulu faire E.T. » (L'acteur)

Pendant que cuisent de magnifiques saucisses à la bière pour le barbecue, Tobolowsky raconte comment, jeune acteur, il auditionna par téléphone pour personnifier le clown mascotte d'une chaîne de fast-food très connue puis comment il a reçu une leçon d'humilité retroactive d'un vieil homme traversant la rue.

Le ton employé est un savant mélange naturel et vivant d'humour et de sensibilité et tout le secret du film est là : il ne s'agit pas d'un film sur Stephen Tobolowsky, ce n'est pas un remake de In Bed with Madonna ou de Dans la peau de John Malkovich mais un film sur l'art universel de raconter des histoires, avec pour medium Tobolowsky en héritier de Mark Twain ou de Woody Allen (« La raison pour laquelle je déteste le golf est que je réalise que c'est le seul jeu qui accentue la différence entre l'espérance et la réalité).

Dans son jardin, Stephen Tobolowsky se souvient d'un pittoresque vol Boston-Los Angeles assis à côté de homards vivants attachés à leur siège par la ceinture, mais c'est pour mieux enchaîner sur l'annonce par Ann Hearn (à l'époque sa petite amie) de sa future grossesse alors que l'acteur tournait Great Balls of Fire/La légende vivante du Rock'n roll à Memphis (« Nous étions au Radison Hotel, dont l'unique titre de gloire était son voisinage proche avec le Peabody Hotel, qui lui était vraiment un bon hôtel. ») L'histoire se conclut par un corollaire émouvant ayant eu lieu 14 ans après.

« Quand vous craquez une allumette, où va la flamme ? » (Le philosophe)

DANS LA SALLE A MANGER AVEC STEPHEN TOBOLOWSKY

Assister à L'anniversaire de Stephen Tobolowsky est une expérience cinématographique inoubliable, voire une expérience humaine tout court. C'est l'occasion inespérée de partager quelques moments précieux avec un homme remarquable, un artiste talentueux, intelligent et sympathique, et un des plus subtils connaisseurs de l'univers d'Hollywood.

« Eh mec ça fait mal. » (Le vieux monsieur qui traverse la rue)

C'est dans sa salle à manger que Stephen Tobolowsky explique sans concession à son égard comment il fut nominé dans « la liste des 100 personnalités les plus cools de Los Angeles » de Buzz Magazine ( « Pourriez-vous nous dire ce que vous auriez fait qui soit si cool ? - Je ne peux pas, ce serait complètement pas cool ! ») ce qui l'a incité à faxer une liste à la rédaction de cette revue :

- S'est fait jeter deux fois de suite à deux ans d'écart avec son épouse d'un restaurant à Washington et d'un autre à Helsinki parce que le président Reagan venait y dîner.

- Dans une épicerie, à vingt minutes d'intervalle, s'est vu demander un autographe puis a été confondu avec un employé.

- A été pris en otage et menaçé à bout portant par une arme dans un magasin de Dallas (« Je ne sais pas pourquoi je vous ai choisi »). S'inspire de Chad Everett dans la série Médecine d'aujourd'hui pour endormir la vigilance du preneur d'otages mais à court de bobards il l'invite à dîner en lui donnant sa véritable adresse !

- A été battu avec des bâtons par des moines en Thaïlande dans un temple parce qu'il a donné un billet de cinq dollars à l'un d'eux (« Vous avez été battu avec des bâtons ? C'est un très grand honneur. »)

Le réalisateur Robert Brinkmann nous offre le premier film d'action en paroles de l'Histoire du cinéma avec l'acteur de composition ultime dans le rôle de tous les personnages y compris Manymore, le chien hippie, lors d'un Noël très spécial à Topanga où un des convives claironne à la consternation de notre héros : « Ben Noël commence plus tôt cette année pour nous car j'ai mis du LSD dans les cafés de tout le monde ». Et Stephen Tobolowsky se retrouve à converser avec Manymore, le chien qui parle avec sagesse (« Lorsque le chien vous parle il faut toujours l'écouter... »)

MY DINNER WITH STEPHEN TOBOLOWSKY

« Bob, quel genre de femmes aiment des types avec tous ces tatouages ?
- Des femmes éclectiques. » (Stephen Tobolowsky et Bob Darnell)


Robert Brinkmann n'a pas son pareil pour restituer en images l'ambiance agréable et intimiste de cette fête d'anniversaire et capter la personnalité et l'authenticité de son animateur, au point que le spectateur a bel et bien le sentiment de faire partie des invités. Regarder ce film suscite le même bonheur que d'écouter l'homme vous parler des chevaux d'Islande, de Jules Verne, ou du grand et regretté Jerry Orbach (New York District) autour d'une salade niçoise à la terrasse d'un café parisien, ou encore de discuter avec lui de Peter Sellers et Sam Lloyd dans le hall de son hôtel.

C'est après une confrontation épique avec des « piranhas végétariens » (Rob Cohen dixit) au cours du tournage de Comme un oiseau sur la branche/Le délateur et une définition du courage qu'intervient le sommet du film, lorsque Stephen Tobolowsky se remémorre des instants de son amitié avec Bob Darnell, un acteur doué et généreux trop tôt disparu.

« Qu'arrive t'-il à la flamme d'une allumette lorsqu'elle disparaît [...] La flamme ne disparaît jamais complètement. Elle brûle quelque part ailleurs. » (L'ami de Bob)

Et tandis que le maître de maison interprète Clair de lune de Debussy, défilent des photos de la vie d'un des acteurs les plus brillants et les plus intéressants du cinéma américain. La fête d'anniversaire est terminée mais Stephen Tobolowsky sera de nouveau là bientôt, peut-être sous les traits d'un policier, ou bien d'un psychiatre, ou d'un sénateur qui sait... C'est lorsque le cinéma américain ressemble à Stephen Tobolowsky qu'il est le plus agréable à regarder.

In English: http://tattard2.blogspot.com/2008/05/stephen-tobolowskys-birthday-party.html

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