Samuel Edward Makin, un policier de New York au volant de sa voiture de patrouille, est poussé par un camion blindé dans l'East River après une intervention. Laissé pour mort, il se réveille dans une chambre d'hôpital où un agent secret cynique lui explique qu'il a été désigné pour devenir la force d'exécution d'un service très spécial. Entre les mains de Chiun, un coréen mystérieux maître dans l'art martial du Sinanju, il devient Remo Williams et travaille sous les ordres du docteur Smith, le chef de l'organisation CORE.
Ce résumé vous ment ! La pellicule susnommée raconte comment moi, Chiun, flamboyant et avisé maître de la glorieuse maison de Sinanju, a consenti à transformer un pâle morceau d'oreille de cochon nourri aux hamburgers en un assassin à peu près présentable. Avec une tolérance modérée à votre égard, je demeure à jamais Chiun, Maître régnant de Sinanju.
IMPLACABLEMENT VÔTRE
Héros de romans populaires avant d'être celui d'un seul film, le personnage de Remo Williams naît en 1963 de l'imagination de Richard Sapir et Warren Murphy (http://thierryattard.blogspot.com/2008/05/warren-murphy.html). Publié seulement en 1971 chez l'éditeur new-yorkais Pinnacle Books, le premier opus de L'Implacable (The Destroyer) suit les traces d'un autre héros d'une série de la maison, Mack Bolan alias L'Exécuteur (The Executioner), créé trois ans auparavant par Don Pendleton.
Williams, policier de Newark, est condamné à la chaise électrique pour un meurtre qu'il n'a pas commis. Mais ce n'est qu'un simulacre organisé par un haut fonctionnaire du renseignement, le docteur Harold W. Smith et son émissaire au crochet en guise de main gauche, Conrad MacCleary.
« Je vous promets de la terreur au petit déjeuner, des pressions à midi, de la tension pour le dîner et de l'exaspération pour la nuit. » (MacCleary, Implacablement vôtre, de Richard Sapir et Warren Murphy, 1971)
Remo est choisi pour être l'arme secrète d'une organisation, CURE (1), qui ne rend de compte qu'au président des Etats-Unis et dont la couverture est un sanatorium. Son instructeur est un vieux coréen, Chiun, chargé de lui enseigner le Karaté et le Ju Jitsu, puis - à partir du 3ème livre, le Sinanju (« la source solaire de tous les arts martiaux », Chiun dixit).
Avec l'introduction du Sinanju, Sapir et Murphy cimentent leur concept et donnent une importance croissante au personnage de Maître Chiun. Les premiers volumes sont de facture classique bien que très efficaces mais la série s'oriente progressivement vers le thriller parodique et la satire sociale à la Jonathan Swift, deux ingrédients qui vont faire de L'Implacable un très gros succès commercial partout dans le monde.
En France, c'est Gérard De Villiers, l'auteur de SAS qui lance The Destroyer en 1977 pour les éditions Plon. Les traductions de très haut niveau de France-Marie Watkins et de Brigitte Sallebert, les couvertures peintes par Loris et de percutantes publicités sur les radios périphériques ( « L'Implacable... L'arme secrète du président des Etats-Unis. ») contribuent largement à la réussite du titre dans l'hexagone.
REMO WILLIAMS... L'AVENTURE RETARDE
Avec ses intrigues originales peuplées de savants fous, d'industriels mégalomanes et autres androïdes polymorphes (Mr Gordon's, un cyborg obsédé par la créativité) ou super-ordinateurs trop sociables (FRIEND). Avec ses références constantes à l'actualité américaine et internationale, ses clins d'œils parodiques et les réparties entre Remo et Chiun, L'Implacable avait tout pour séduire Hollywood.
Pourtant le cinéma et la télévision préfèrent pendant longtemps « s'inspirer » des écrits de Sapir, Murphy (2) et de leurs successeurs (Ric Meyers, Robert Randisi, Molly Cochran, William Joy...) tout comme l'influence des livres de Don Pendleton, écrivain injustement ignoré du grand public, se sent ostensiblement sur certains films d'action. Puis en 1981 Warren Murphy déclare dans la préface de l'édition originale de Balance of Power (Bye bye l'espion en français) : « ...L'Implacable va devenir bientôt un grand film de cinéma. »
C'est que le producteur Larry Spiegel vient juste d'acquérir les droits de la série et envisage de lancer une franchise pour le grand écran. Ses associés Mel Bergman et Judy Goldstein ainsi que lui-même n'arrivent à finaliser le projet qu'en 1985 avec la collaboration de Dick Clark, un important producteur de télévision.
« Il bouge comme un babouin, avec les doigts palmés. Cependant il y a une faible lueur encourageante dans son regard torve. » (Maître Chiun, Remo sans arme et dangereux)
LIVRE ET LAISSER MOURIR
Lorsque Remo sans arme et dangereux est en phase de développement James Bond, maintes fois parodié dans les romans de Sapir et Murphy, est encore « la marque déposée du grand spectacle moderne » dans l'esprit de tous les spectateurs de la planète. Le quatuor de producteurs et Orion Pictures font donc tout naturellement appel au romancier britannique Christopher Wood, scénariste de L'Espion qui m'aimait (1977) et de Moonraker (1979), et à son compatriote Guy Hamilton, réalisateur de quatre aventures de 007, dont Goldfinger.
Quoi qu'on ait pu en dire par la suite, Christopher Wood est aussi fidèle à la série littéraire qu'une transposition peut le permettre. Il donne aux fans des livres leur dose de références : « l'empereur Smith » (Chiun ne peut concevoir de travailler pour moins qu'un empereur), l'addiction de Maître Chiun pour « les beaux drames de l'après-midi » (ici un soap opera du nom de Au-delà de la nuit) ou « Petit père », le surnom que donne Remo au coréen.
Wood essaie dans ses dialogues de restituer la relation père-fils entre Chiun et Remo Williams avec un humour aussi proche de celui de Sapir et Murphy que possible. Larry Spiegel déclare considérer cette relation comme un élément essentiel des livres: « L’attrait des livres est la relation unique père-fils entre Chiun et Remo. Du moins, si on peut imaginer qu’un coréen de 80 ans philosophe peut avoir comme fils un ex-flic de New York familier de la rudesse des rues. » (Dossier de presse)
« Pourquoi tout ce qu'on ingurgite dans ce pays est assaisonné au monosidi... monosiou... mono...
- Monosodium glutamique, t'es même pas fichu de le dire.
- Je sais dire crotte de lapin. Cela ne signifie pas que je dois en manger.»(Remo et Chiun, Remo sans arme et dangereux)
Guy Hamilton partage l'avis de Spiegel et tient à ce que l'alchimie entre les deux personnages soit perceptible à l'écran. Le casting du film commence et la production auditionne près de 200 acteurs pour le rôle de Remo avant qu'Hamilton ne retienne Fred Ward (L'Evadé d'Alcatraz), lequel était en fait le premier choix du réalisateur.
La distribution du rôle de Maître Chiun relève du pur génie. C'est le caucasien et « oscarisé » Joel Grey (Cabaret) qui est choisi, à charge pour le spécialiste du maquillage Carl Fullerton (Les Prédateurs), de transformer le danseur, acteur et chanteur en digne et fier coréen octogénaire.
« Le coréen est la créature la plus parfaite qui ait jamais sanctifié la Terre de l'empreinte de son pied.»(Chiun, Remo sans arme et dangereux)
REMO WILLIAMS... L'AVENTURE COMMENCE
Reste à donner un visage au docteur Harold W. Smith, chef de CORE et officiellement assistant directeur des recherches d'une grande banque d'affaires (dans les livres le chef de CURE) dirige le sanatorium de Folcroft, dans le comté de Rye. C'est le vétéran Wilford Brimley (Le Syndrôme chinois, Cocoon), aux antipodes du patricien sec et dénué d'humour des livres, qui est retenu par les directrices de casting et Guy Hamilton.
J.A. Preston (de la série Hill Street Blues) devient Conn MacCleary et Kate Mulgrew, ex-madame Columbo, est le major Rayner Fleming, un militaire qui comme CORE soupçonne le milliardaire George Grove (Charles Cioffi) d'escroquer le Pentagone avec un système de défense factice, le H.A.R.P.
« Je viens de passer la matinée à me faire courser sur la Statue de la Liberté par une bande de truands.
- Que faisiez-vous sur la Statue de la Liberté, monsieur Williams ?
- J'cueillais des prunes !» (Remo et Smith)
Guy Hamilton remplit pleinement son contrat en donnant crescendo à Remo sans arme et dangereux son lot de séquences spectaculaires. Chiun évite les balles de Remo lors de leur première rencontre avant de commencer son enseignement (le maître exige de MacCleary quinze années !) : il le fait courir le long du rebord du toit de leur loft, l'oblige à se suspendre à une des cabines de la grande roue Wonder Wheel du parc d'attractions de Coney Island puis plus tard le regarde courir en flottant littéralement au dessus du sable de la plage.
Mais le plus grand moment du film est l'affrontement entre Remo Williams et trois ouvriers à la solde de Stone, l'homme à la dent en or (Patrick Kilpatrick), sur la Statue de la Liberté en travaux de restauration. La production demande aux autorités responsables l'autorisation d'utiliser pour le tournage de cette séquence les échafaudages et les abords de la statue.
Le gros de ces scènes est tourné au Mexique sur une fidèle réplique du buste de la statue construite en bois et fibre de verre. Sans arme, Remo et bel et bien dangereux et Grove s'en apercevra à ses dépens lors d'un ultime affrontement dans la forêt de la base militaire du Mont Promise.
IMPLACABLEMENT MORT?
Remo sans arme et dangereux sort dans les salles américaines le 11 octobre 1985 (il sort en France le 19 mars 1986) sous le titre Remo Williams, The adventure begins... Chiun marche sur l'eau à la fin du film mais ce miracle ne suffit pas à sauver cette adaptation cinématographique plutôt sympathique de L'Implacable de la cruauté toute aussi implacable du box office, enterrant de fait les projets de franchise de Larry Spiegel, Mel Bergman, Judy Goldstein et Dick Clark.
Restent de bons moments de cinéma, bien servis par Christopher Wood et Guy Hamilton, des répliques cultes (« Chiun, tu es vraiment incroyable - Non, je suis mieux que ça. » ) et une superbe bande originale composée par Craig Safan. Même si les passages au synthétiseur du générique d'ouverture datent un peu aujourd'hui son intro est un classique, le thème de Chiun est magnifique et la chanson finale, What if , interprétée par Tommy Shaw, demeure très agréable à écouter.
En 1988, Dick Clark Productions et Orion Television tournent pour le réseau américain ABC un pilote d'une heure intitulé Remo Williams et sous-titré The Prophecy avec Roddy McDowall dans le rôle de Maître Chiun et Jeffrey Meek dans le rôle de Remo. Passé le générique, Chiun invite les télespectateurs à se servir de leur télécommande (« Si vous avez choisi de regarder mon vaurien d'élève, Remo Williams. S'il-vous-plait, changez de chaîne. » ) dans la pure tradition de ses intrusions littéraires sous forme de préfaces, postfaces et autres commentaires. Ce qu'il vaut mieux en principe éviter lorsqu'on veut lancer une série télévisée.
Les téléspectateurs américains suivent donc le conseil et laissent à Chiun tout le temps de chercher « le monument local à la gloire de Barbra Streisand », son idole (autre élément issu des livres). La rumeur d'un projet de long métrage ou de série revient régulièrement depuis lors et les fans des livres (près de 140 volumes, édités en France chez Vauvenargues) discutent sur la toile du casting idéal.
Il y a cependant peu de chance que pareil projet d'adaptation voit le jour. De même qu'il est illusoire d'espérer trouver un jour une édition DVD convenable, en zone 2, de Remo sans arme et dangereux avec en bonus le pilote télé en version intégrale, les spots radios français et les couvertures des éditions françaises ou originales. C'est Tim Somheil qui écrit les aventures de L'Implacable à partir du numéro 134 en remplacement de Jim Mullaney mais Warren Murphy et Jim Mullaney ont lancé en juillet 2006 une nouvelle série de livres de L'Implacable, The New Destroyer, publiée aux Etats-Unis chez Tor Books (http://us.macmillan.com/TorForge.aspx).
« Citez une seule autre série dans laquelle j'apparaîtrais. Impossible. Et pourquoi ? Parce que je ne participe pas à ces désastres. C'est la gloire de la Maison de Sinanju, de véritables assassins... pas de vulgaires tueurs ou meurtriers tels que semblent l'indiquer ces romans de gare, qui a fait la série L'Implacable. En toute humilité je suis forcé de dire que ce n'est pas la magie qui est à l'origine de ce succès. C'est moi. » (Maître Chiun, préface de la réédition américaine de Biftons bidons, 1985)
(1) L’organisation qui emploie Remo s’appelle effectivement CURE dans les livres et CORE dans la vf du film.
(2) Richard Sapir est décédé en 1987 et Warren Murphy ne participe plus directement à l’écriture de la collection d'origine mais garde un œil sur le titre (http://www.warrenmurphy.com/).
Ce résumé vous ment ! La pellicule susnommée raconte comment moi, Chiun, flamboyant et avisé maître de la glorieuse maison de Sinanju, a consenti à transformer un pâle morceau d'oreille de cochon nourri aux hamburgers en un assassin à peu près présentable. Avec une tolérance modérée à votre égard, je demeure à jamais Chiun, Maître régnant de Sinanju.
IMPLACABLEMENT VÔTRE
Héros de romans populaires avant d'être celui d'un seul film, le personnage de Remo Williams naît en 1963 de l'imagination de Richard Sapir et Warren Murphy (http://thierryattard.blogspot.com/2008/05/warren-murphy.html). Publié seulement en 1971 chez l'éditeur new-yorkais Pinnacle Books, le premier opus de L'Implacable (The Destroyer) suit les traces d'un autre héros d'une série de la maison, Mack Bolan alias L'Exécuteur (The Executioner), créé trois ans auparavant par Don Pendleton.
Williams, policier de Newark, est condamné à la chaise électrique pour un meurtre qu'il n'a pas commis. Mais ce n'est qu'un simulacre organisé par un haut fonctionnaire du renseignement, le docteur Harold W. Smith et son émissaire au crochet en guise de main gauche, Conrad MacCleary.
« Je vous promets de la terreur au petit déjeuner, des pressions à midi, de la tension pour le dîner et de l'exaspération pour la nuit. » (MacCleary, Implacablement vôtre, de Richard Sapir et Warren Murphy, 1971)
Remo est choisi pour être l'arme secrète d'une organisation, CURE (1), qui ne rend de compte qu'au président des Etats-Unis et dont la couverture est un sanatorium. Son instructeur est un vieux coréen, Chiun, chargé de lui enseigner le Karaté et le Ju Jitsu, puis - à partir du 3ème livre, le Sinanju (« la source solaire de tous les arts martiaux », Chiun dixit).
Avec l'introduction du Sinanju, Sapir et Murphy cimentent leur concept et donnent une importance croissante au personnage de Maître Chiun. Les premiers volumes sont de facture classique bien que très efficaces mais la série s'oriente progressivement vers le thriller parodique et la satire sociale à la Jonathan Swift, deux ingrédients qui vont faire de L'Implacable un très gros succès commercial partout dans le monde.
En France, c'est Gérard De Villiers, l'auteur de SAS qui lance The Destroyer en 1977 pour les éditions Plon. Les traductions de très haut niveau de France-Marie Watkins et de Brigitte Sallebert, les couvertures peintes par Loris et de percutantes publicités sur les radios périphériques ( « L'Implacable... L'arme secrète du président des Etats-Unis. ») contribuent largement à la réussite du titre dans l'hexagone.
REMO WILLIAMS... L'AVENTURE RETARDE
Avec ses intrigues originales peuplées de savants fous, d'industriels mégalomanes et autres androïdes polymorphes (Mr Gordon's, un cyborg obsédé par la créativité) ou super-ordinateurs trop sociables (FRIEND). Avec ses références constantes à l'actualité américaine et internationale, ses clins d'œils parodiques et les réparties entre Remo et Chiun, L'Implacable avait tout pour séduire Hollywood.
Pourtant le cinéma et la télévision préfèrent pendant longtemps « s'inspirer » des écrits de Sapir, Murphy (2) et de leurs successeurs (Ric Meyers, Robert Randisi, Molly Cochran, William Joy...) tout comme l'influence des livres de Don Pendleton, écrivain injustement ignoré du grand public, se sent ostensiblement sur certains films d'action. Puis en 1981 Warren Murphy déclare dans la préface de l'édition originale de Balance of Power (Bye bye l'espion en français) : « ...L'Implacable va devenir bientôt un grand film de cinéma. »
C'est que le producteur Larry Spiegel vient juste d'acquérir les droits de la série et envisage de lancer une franchise pour le grand écran. Ses associés Mel Bergman et Judy Goldstein ainsi que lui-même n'arrivent à finaliser le projet qu'en 1985 avec la collaboration de Dick Clark, un important producteur de télévision.
« Il bouge comme un babouin, avec les doigts palmés. Cependant il y a une faible lueur encourageante dans son regard torve. » (Maître Chiun, Remo sans arme et dangereux)
LIVRE ET LAISSER MOURIR
Lorsque Remo sans arme et dangereux est en phase de développement James Bond, maintes fois parodié dans les romans de Sapir et Murphy, est encore « la marque déposée du grand spectacle moderne » dans l'esprit de tous les spectateurs de la planète. Le quatuor de producteurs et Orion Pictures font donc tout naturellement appel au romancier britannique Christopher Wood, scénariste de L'Espion qui m'aimait (1977) et de Moonraker (1979), et à son compatriote Guy Hamilton, réalisateur de quatre aventures de 007, dont Goldfinger.
Quoi qu'on ait pu en dire par la suite, Christopher Wood est aussi fidèle à la série littéraire qu'une transposition peut le permettre. Il donne aux fans des livres leur dose de références : « l'empereur Smith » (Chiun ne peut concevoir de travailler pour moins qu'un empereur), l'addiction de Maître Chiun pour « les beaux drames de l'après-midi » (ici un soap opera du nom de Au-delà de la nuit) ou « Petit père », le surnom que donne Remo au coréen.
Wood essaie dans ses dialogues de restituer la relation père-fils entre Chiun et Remo Williams avec un humour aussi proche de celui de Sapir et Murphy que possible. Larry Spiegel déclare considérer cette relation comme un élément essentiel des livres: « L’attrait des livres est la relation unique père-fils entre Chiun et Remo. Du moins, si on peut imaginer qu’un coréen de 80 ans philosophe peut avoir comme fils un ex-flic de New York familier de la rudesse des rues. » (Dossier de presse)
« Pourquoi tout ce qu'on ingurgite dans ce pays est assaisonné au monosidi... monosiou... mono...
- Monosodium glutamique, t'es même pas fichu de le dire.
- Je sais dire crotte de lapin. Cela ne signifie pas que je dois en manger.»(Remo et Chiun, Remo sans arme et dangereux)
Guy Hamilton partage l'avis de Spiegel et tient à ce que l'alchimie entre les deux personnages soit perceptible à l'écran. Le casting du film commence et la production auditionne près de 200 acteurs pour le rôle de Remo avant qu'Hamilton ne retienne Fred Ward (L'Evadé d'Alcatraz), lequel était en fait le premier choix du réalisateur.
La distribution du rôle de Maître Chiun relève du pur génie. C'est le caucasien et « oscarisé » Joel Grey (Cabaret) qui est choisi, à charge pour le spécialiste du maquillage Carl Fullerton (Les Prédateurs), de transformer le danseur, acteur et chanteur en digne et fier coréen octogénaire.
« Le coréen est la créature la plus parfaite qui ait jamais sanctifié la Terre de l'empreinte de son pied.»(Chiun, Remo sans arme et dangereux)
REMO WILLIAMS... L'AVENTURE COMMENCE
Reste à donner un visage au docteur Harold W. Smith, chef de CORE et officiellement assistant directeur des recherches d'une grande banque d'affaires (dans les livres le chef de CURE) dirige le sanatorium de Folcroft, dans le comté de Rye. C'est le vétéran Wilford Brimley (Le Syndrôme chinois, Cocoon), aux antipodes du patricien sec et dénué d'humour des livres, qui est retenu par les directrices de casting et Guy Hamilton.
J.A. Preston (de la série Hill Street Blues) devient Conn MacCleary et Kate Mulgrew, ex-madame Columbo, est le major Rayner Fleming, un militaire qui comme CORE soupçonne le milliardaire George Grove (Charles Cioffi) d'escroquer le Pentagone avec un système de défense factice, le H.A.R.P.
« Je viens de passer la matinée à me faire courser sur la Statue de la Liberté par une bande de truands.
- Que faisiez-vous sur la Statue de la Liberté, monsieur Williams ?
- J'cueillais des prunes !» (Remo et Smith)
Guy Hamilton remplit pleinement son contrat en donnant crescendo à Remo sans arme et dangereux son lot de séquences spectaculaires. Chiun évite les balles de Remo lors de leur première rencontre avant de commencer son enseignement (le maître exige de MacCleary quinze années !) : il le fait courir le long du rebord du toit de leur loft, l'oblige à se suspendre à une des cabines de la grande roue Wonder Wheel du parc d'attractions de Coney Island puis plus tard le regarde courir en flottant littéralement au dessus du sable de la plage.
Mais le plus grand moment du film est l'affrontement entre Remo Williams et trois ouvriers à la solde de Stone, l'homme à la dent en or (Patrick Kilpatrick), sur la Statue de la Liberté en travaux de restauration. La production demande aux autorités responsables l'autorisation d'utiliser pour le tournage de cette séquence les échafaudages et les abords de la statue.
Le gros de ces scènes est tourné au Mexique sur une fidèle réplique du buste de la statue construite en bois et fibre de verre. Sans arme, Remo et bel et bien dangereux et Grove s'en apercevra à ses dépens lors d'un ultime affrontement dans la forêt de la base militaire du Mont Promise.
IMPLACABLEMENT MORT?
Remo sans arme et dangereux sort dans les salles américaines le 11 octobre 1985 (il sort en France le 19 mars 1986) sous le titre Remo Williams, The adventure begins... Chiun marche sur l'eau à la fin du film mais ce miracle ne suffit pas à sauver cette adaptation cinématographique plutôt sympathique de L'Implacable de la cruauté toute aussi implacable du box office, enterrant de fait les projets de franchise de Larry Spiegel, Mel Bergman, Judy Goldstein et Dick Clark.
Restent de bons moments de cinéma, bien servis par Christopher Wood et Guy Hamilton, des répliques cultes (« Chiun, tu es vraiment incroyable - Non, je suis mieux que ça. » ) et une superbe bande originale composée par Craig Safan. Même si les passages au synthétiseur du générique d'ouverture datent un peu aujourd'hui son intro est un classique, le thème de Chiun est magnifique et la chanson finale, What if , interprétée par Tommy Shaw, demeure très agréable à écouter.
En 1988, Dick Clark Productions et Orion Television tournent pour le réseau américain ABC un pilote d'une heure intitulé Remo Williams et sous-titré The Prophecy avec Roddy McDowall dans le rôle de Maître Chiun et Jeffrey Meek dans le rôle de Remo. Passé le générique, Chiun invite les télespectateurs à se servir de leur télécommande (« Si vous avez choisi de regarder mon vaurien d'élève, Remo Williams. S'il-vous-plait, changez de chaîne. » ) dans la pure tradition de ses intrusions littéraires sous forme de préfaces, postfaces et autres commentaires. Ce qu'il vaut mieux en principe éviter lorsqu'on veut lancer une série télévisée.
Les téléspectateurs américains suivent donc le conseil et laissent à Chiun tout le temps de chercher « le monument local à la gloire de Barbra Streisand », son idole (autre élément issu des livres). La rumeur d'un projet de long métrage ou de série revient régulièrement depuis lors et les fans des livres (près de 140 volumes, édités en France chez Vauvenargues) discutent sur la toile du casting idéal.
Il y a cependant peu de chance que pareil projet d'adaptation voit le jour. De même qu'il est illusoire d'espérer trouver un jour une édition DVD convenable, en zone 2, de Remo sans arme et dangereux avec en bonus le pilote télé en version intégrale, les spots radios français et les couvertures des éditions françaises ou originales. C'est Tim Somheil qui écrit les aventures de L'Implacable à partir du numéro 134 en remplacement de Jim Mullaney mais Warren Murphy et Jim Mullaney ont lancé en juillet 2006 une nouvelle série de livres de L'Implacable, The New Destroyer, publiée aux Etats-Unis chez Tor Books (http://us.macmillan.com/TorForge.aspx).
« Citez une seule autre série dans laquelle j'apparaîtrais. Impossible. Et pourquoi ? Parce que je ne participe pas à ces désastres. C'est la gloire de la Maison de Sinanju, de véritables assassins... pas de vulgaires tueurs ou meurtriers tels que semblent l'indiquer ces romans de gare, qui a fait la série L'Implacable. En toute humilité je suis forcé de dire que ce n'est pas la magie qui est à l'origine de ce succès. C'est moi. » (Maître Chiun, préface de la réédition américaine de Biftons bidons, 1985)
(1) L’organisation qui emploie Remo s’appelle effectivement CURE dans les livres et CORE dans la vf du film.
(2) Richard Sapir est décédé en 1987 et Warren Murphy ne participe plus directement à l’écriture de la collection d'origine mais garde un œil sur le titre (http://www.warrenmurphy.com/).
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