jeudi 20 novembre 2008

LA CABEZA DE ALFREDO GARCIA

L'interview de Ben Silverman par le journaliste Charlie Rose pour l'émission de ce dernier (http://www.charlierose.com/view/interview/9554) a été l'occasion pour Nikki Finke d'écrire un article très percutant et émouvant à la fois sur son blog, Deadline Hollywood Daily (http://www.deadlinehollywooddaily.com/transcript-of-ben-silverman-on-charlie-rose/).

REVEIL DOULOUREUX

Ben Silverman est le co-président de NBC Entertainment et de NBC Universal Television Studio depuis 2007, ainsi que le fondateur de Reveille Productions, une compagnie qui a amené avec succès aux Etats-Unis des formats étrangers, tels que le britannique The Office, en tant que remakes.

Mais il semble que le Prime Time de NBC ait besoin de bien plus qu'un "reveille", si ce n'est une "résurrection", après l'annulation du survendu My Own Worst Enemy (avec Christian Slater) et de celle de Lipstick Jungle, et le piètre accueil fait à Kath & Kim - le remake d'une sitcom australienne. L'éloge par Silverman des avantages d'une co-production comme Crusoe a achevé de susciter le scepticisme (http://dknowsall.blogspot.com/2008/09/hollywood-babble-on-on-166-nbc-world.html) après le manque d'enthousiasme causé par la grille de rentrée du réseau.

My Own Worst Enemy est un gâchis du talent de Christian Slater, qui mérite l'équivalent de de ce qu'a été 24 pour Kiefer Sutherland. Les promos laissaient l'étrange impression d'un "Jekyll rencontre Jason Bourne" (http://thierryattard.blogspot.com/2008/09/six-pieds-sous-terre_19.html) - tout le monde copie Bourne de nos jours... (http://thierryattard.blogspot.com/2008/11/pour-une-poignee-de-reconfort.html), et de ce côté-ci de l'océan il semble que la télévision américaine achète ses fictions hebdomadaires uniquement sur "pitch", alors que la télévision britannique construit des séries à partir et autour de scripts (http://dknowsall.blogspot.com/2008/11/boob-tube-how-long-should-series-last.html).

Dans un cas vous avez MI-5 (Spooks), la meilleure série d'espionnage de l'Histoire de la télévision (avec La Taupe), et dans l'autre une longue liste de grotesques pilotes invendus (http://www.leegoldberg.com/non_unsold.html), ou des séries comme Dans l'Oeil de l'espion (Fortune Hunter), Secret Agent Man et My Own Worst Enemy. Même si Dans l'oeil de l'espion était très plaisant à regarder, grâce au regretté Mark Frankel et à des airs de Probe (Search, 1972-1973, une série d'aventure et d'espionnage injustement oubliée). Seule la distance peut sauver ce type de séries, à la grande époque NBC était le réseau de Des agents très spéciaux mais c'était il y a 43 ans.... si Monsieur Solo devait se rendre à Paris aujourd'hui, espérons au moins que la production éviterait le ridicule.

LE FANTÔME DE BRANDON TARTIKOFF

Ce n'est pas la première fois que Nikki pointe son lance-flammes sur Ben Silverman (http://www.deadlinehollywooddaily.com/major-nbc-shakeup-ahead-network-wants-to-ax-teri-weinberg-hopes-ben-silverman-quits/) mais sa réaction à l'évocation, dans l'interview de Silverman, du nom de Brandon Tartikoff - le légendaire exécutif qui porta NBC sur les plus hauts sommets avec de nombreuses séries parmi les plus populaires des années 1980 (Hill Street Blues, Miami Vice, La loi de Los Angeles et plein d'autres) - est plutôt émouvante pour ceux pour qui ce nom signifie vraiment quelque chose: « Je souhaite aussi que Silverman arrête d'essayer d'entrer en contact avec le fantôme de Brandon Tartikoff [...] Oui, Silverman a travaillé pour Tartikoff une fois ou deux. Mais Ben, je connaissais Brandon. Tartikoff était un ami. Et vous monsieur, n'êtes pas Brandon Tartikoff ».

Après l'annulation de My Own Worst Enemy et de Lipstick Jungle le blâme est apparemment retombé sur Katherine Pope, présidente de Universal Media Studio (http://www.nypost.com/seven/11142008/gossip/pagesix/black_widow_effect_at_nbc_138573.htm), intervenue sur le développement de ces deux séries, comme sur celui de l'affligeant revival de Super Jaimie ainsi que du surrestimé Heroes (http://www.thefutoncritic.com/news.aspx?id=20070604nuts01).

D'après le New York Post, Ben Silverman a réussi à diminuer les coûts chez NBC et semble satisfaire ses patrons, particulièrement le président de NBC Jeff Zucker. Et les analystes disent que les audiences sont devenues moins importantes à considérer alors qu'elles s'éparpillent sur les chaînes du câble. Comme le disait Silverman au Post l'été dernier: « Nous travaillons pour les marges, pas pour les audiences ».

DANS UN MONDE...

L'industrie de l'Entertainment a profondément changé depuis l'ère du grand Brandon Tartikoff, Les Networks sont concurrencées par une multitude d'offres du câble, du statellite et d'internet. Pour être juste, NBC n'est pas le seul réseau a avoir eu des mauvaises saisons depuis quelques années. Et le vrai problème pour les "Big Four" (CBS, ABC, NBC, Fox) est la pertinence de continuer de commander et de montrer des séries hebdomadaires dans un environnement où les télespectateurs sont accoutumés aux fictions américaines de qualité venant de chez Showtime, AMC ou HBO, ou à la crème de la télévision britannique via BBC America ou The Sci-Fi Channel.

La meilleure illustration de ce dilemme c'est la nouvelle version de Knight Rider diffusée par NBC, une série pilotée par un homme, Gary Scott Thompson, qui a un vrai sens de ce que devrait être de l'Entertainment populaire et léger sur les réseaux (souvenez-vous de Las Vegas). La série est une cible sur internet depuis ses débuts avec des reproches allant de la comparaison avec l'original et la distribution, jusqu'à la qualité des scripts et les effets spéciaux. Ce qui est vraiment fascinant, lorsqu'on se souvient que l'original, lançé sous le règne de Brandon Tartikoff, était produit par Glen A. Larson (cela dit sans aucune offense, ses séries sont de magnifique souvenirs d'enfance) et était essentiellement une version 1er degré de Maman Bagnole avec les normes de production de la Universal Television de l'époque et des cascades.

Et voilà maintenant que la nouvelle version est modifiée suite à des audiences en yo-yo et que trois membres de la distributions s'en vont, dont Bruce Davison, un des plus grands acteurs américains contemporains. Vraiment dommage, 25 ans auparavant (lorsque les trois grands réseaux d'alors étaient sans rivaux), la série aurait été le toast du moment, mais les télespectateurs semblent souhaiter que les réseaux leur montrent des séries comme Dexter ou Californication, ou pas de séries du tout - America's got talent ou Deal or no Deal sont très agréables à regarder.

Adapter des formats étrangers ne sera certainement pas la solution aux problèmes des grilles de cet automne ou de la saison entière. Voyez ABC et son Life on Mars US... Mais quel est donc l'intérêt d'adapter des séries que les télespectateurs américains connaissent déjà grâce à BBC America ou internet? Est-ce que les responsables de la programmation croient que les séries britanniques sont toujours ghettoïsées sur PBS ou relégués à des deals bon marché pour la syndication? Que nous réserve NBC pour l'avenir? Un remake américain de Hotel Babylon à Las Vegas? Soyons sérieux...

Le véritable défi pour Ben Silverman et ses collègues ou homologues c'est de répondre à cette seule question: quel type d'Entertainment pour les réseaux au 21ème siècle?

Mise à jour: Alain Carrazé parle sur son blog de ce qu'il qualifie de "déclin" de NBC (http://alaincarraze.blog.canal-plus.com/archive/2008/11/21/nbc-le-declin-continue.html) + Lee Goldberg à propos de Tim Kring et Heroes (http://leegoldberg.typepad.com/a_writers_life/2008/11/how-not-to-get-people-to-watch-your-show.html).

In English: http://tattard2.blogspot.com/2008/11/la-cabeza-de-alfredo-garcia.html

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