lundi 22 décembre 2008

BONNES FÊTES DE FIN D'ANNEE

Votre humble taulier vous souhaite à tous, lecteurs fidèles et nouveaux visiteurs, les meilleurs fêtes de fin d'année possibles. Permettez moi également de vous remercier pour votre fidélité et votre intérêt.

Non seulement ce blog a un nombre de visiteurs en hausse chaque mois (lentement mais sûrement), non seulement la version en Anglais et celle en Français ont des visiteurs réguliers de différents endroits du monde (ce qui est un vrai plaisir, faire deux versions d'un même blog prend du temps), mais le nombre de visiteurs mettant ce blog en favori est aussi en hausse et, à mon grand étonnement, certains d'entre vous signalent ce blog par mail à leurs contacts. Sans parler d'intervenants de cette belle industrie que nous traitons qui parfois nous rendent une petite visite lorsqu'ils sont concernés par nos modestes travaux du moment.

Nous continuons à travailler durant les vacances. Tant de choses à faire... Au programme: Russell T. Davies, Lonesome Dove, le nouveau roman de Monk par Lee Goldberg... Que l'année 2009 soit meilleure que l'année finissante. Et merci encore.

mercredi 17 décembre 2008

HORST TAPPERT (1923-2008)

Remerciements à Nathalie ATTARD et David GENTIAL

L'acteur allemand Horst Tappert est décédé le 13 décembre à Munich. Il avait 85 ans. Il restera, bien qu'il ne l'aurait certainement pas souhaité, le symbole d'une institution ancienne de la télé allemande d'avant H
ermann Joha ou Les Experts: le Freitag-Krimi, la série policière allemande typique du vendredi soir. Et ce avec un seul titre: Inspecteur Derrick (Derrick, 1974-1998).

VOLEURS ET GENDARMES

Comme la plupart des acteurs germaniques vus à la télévision, Horst Tappert se forme au théâtre. Son premier rôle notable à l'écran est celui du génie criminel de L' Affaire du train Glasgow-Londres (Die Gentlemen bitten zur Kasse, 1966), une mini-série en trois parties considérée comme un des sommets de l'Histoire de la télévision allemande. La même année il apparait dans le quatrième film adapté de la populaire série de romans policiers Jerry Cotton (avec l'acteur américain George Nader dans le rôle du G-Man Jerry Cotton), Un cercueil de diamants (Die Rechnung - eiskalt serviert).

En 1968 il joue dans un épisode de Das Kriminalmuseum (1963-1970), une anthologie produite par un homme qui invente la fiction télé populaire du 20ème siècle en Allemagne: Helmut Ringelmann. Tappert travaillera de nouveau pour Ringelmann dans deux épisodes d'une des séries les plus populaires de ce producteur: Der Kommissar (1969-1976), avec Erik Ode dans le rôle du Kommissar Herbert Keller - initialement imaginé comme un Maigret allemand.

Horst Tappert est aussi une figure familière des films de la série des Edgar Wallace, y interprétant par deux fois le même inspecteur, dans Der Gorilla von Soho (1968) et Der Man mit dem Glassauge (1969). En 1972 il reprend le rôle du génie criminel de Die Gentlemen bitten zur Kasse dans Hoopers letzte Jagd.

CRIME ET CHATIMENT

En 1974, Horst Tappert devient l'Oberinspektor Stephan Derrick dans la nouvelle Krimiserie de Helmut Ringelmann, Derrick. Pour assurer une certaine continuité avec Der Kommissar, son grand succès, Ringelmann décide habilement que le Kriminalhauptmeister Harry Klein (Fritz Wepper), un des personnages de la série, quittera le Kommissar Keller pour travailler avec Derrick (et deux hommes de la nouvelle équipe apparaissent dans Der Kommissar). Derrick nait d'une idée de Ringelmann et du scénariste Herbert Reinecker, et est naturellement influençé par Der Kommissar, mais également par Maigret et, à certains égards, par Crime et châtiment de Dostoievski.

Le premier épisode de la série (la première saison en comporte trois), Le chemin à travers bois (Waldweg), et le premier de la saison 2, Le bus de minuit (Mitternachtbus), sont deux des meilleurs épisodes de Derrick, dont ils posent l'ambiance avec des histoires sombres et pessimistes. Les scripts de la série sont tous écrits par un seul homme, Reinecker, et sont empreints de sa propre vision de la vie et de ses expériences. Le schéma directeur est simple: un crime sordide est commis au sein de la petite bourgeoisie ou de la haute société de Munich et Derrick enquête avec Harry Klein, son assistant. Stephan Derrick se comporte dans la majorité des épisodes comme une espèce d'observateur misanthrope sans la moindre once de concession mais avec un solide sens de la justice, et l'expression occasionnelle de ses propres sentiments - lorsqu'il est écoeuré par la situation en dépit du fait que ce flic enhardi a tout vu dans sa carrière.

La formule de Derrick, contrepoint aux séries US des années 1970 car la série repose plus sur la psychologie que sur l'action, fait son succès durant 25 saisons jusqu'en 1998 (une longévité commune à beaucoup de séries germaniques, spécialement celles conçues par Helmut Ringelmann) et voit le personnage évoluer naturellement.

DERRICK EN FRANCE: L'AFFAIRE DU MALENTENDU

Il existe en France un cliché persistant à propos de la soi-disante "lenteur" de la série et le fait qu'elle ne serait regardée que par des retraités (1). Derrick arrive en France en 1986 sur La Cinq de Silvio Berlusconi, au milieu d'un train d'illustres séries américaines, et la Krimiserie souffre de la comparaison, un peu comme les dommages causés par Les Experts et ses clones sur la production de fiction télé allemande aujourd'hui. Derrick est raillé et décrit comme une série policière "lente", quasi-grabataire, alors que c'est plus une étude psychologique voire philosophique des faiblesses de l'âme humaine au travers du prisme de deux notions: la culpabilité et la justification.

En fait, Derrick doit plus aux premiers films de Claude Chabrol (particulièrement dans ses premières saisons) qu'à Starsky & Hutch ou à d'autres productions d'Aaron Spelling. Et la série est souvent filmée comme une représentation théâtrale de Brecht ou de Tchekhov. L'action est requise seulement lorsqu'elle est nécessaire car Stephan Derrick est, après tout, un flic de la Kripo (Kriminal Polizeï) : par exemple dans l'épisode 5 de la saison 2, La cavale (Zeichen der Gewalt), avec le regretté Raimund Harstorf (dans une de ses apparitions aux côtés de l'icône érotique Sybil Danning), dans le rôle d'un tueur en fuite poursuivi (littéralement) par Derrick et tué par l'Oberinspektor après plusieurs coups de feu. Cet épisode a tout du film noir à la Jean-Pierre Melville, Jacques Deray ou José Giovanni  (qui a d'ailleurs écrit et réalisé le troisième épisode de Le Renard/Der Alte, la série d'Helmut Ringelmann remplaçant Der Kommissar).

Mieux, Derrick explore de vastes champs narratifs, depuis des histoires qui semblent empruntées à Der Kommissar, jusqu'aux portraits "chabroliens" de la bourgeoisie, avec parfois des détours par Nietszche ou Kafka. Le congrès de Berlin (Ein Kongreß in Berlin), un épisode de la saison 6 d'une durée exceptionnelle de 75 minutes, est un croisement entre les Mabuse et L'espion qui venait du froid. Edgar Wallace n'est pas loin de certains épisodes et il y a même un hold-up narré en voix-off par Derrick. Herbert Reinecker et Helmut Ringelmann réussissent à maintenir une grande qualité scénaristique à travers les années: Le sourire du docteur Bloch (Das Lächeln des Dr. Bloch, saison 18, épisode 11), avec un duel entre deux fantastiques acteurs, Peter Sattmann et le grand Hans-Michael Rehberg, ainsi que Le génie en danger (titre français calamiteux de Isoldes tote Freunde, saison 18, épisode 12) - avec une magnifique et délicate interprétation de Juliane Rautenberg (2) - sont parmi les classiques de la série.

ABSCHIEDSGESCHENK

Derrick a deux faiblesses, l'une retrospective, l'autre réelle. La faiblesse retrospective est le choix pour la bande originale de chansons qui étaient des hits à leurs époque mais qui sont maintenant quelques fois plus que datées (pour présenter la chose aimablement). La seconde faiblesse est l'emploi par Ringelmann d'une "troupe" de visages trop récurrents (mais néanmoins excellent acteurs invités), tels que Sky du Mont (http://tattard2.blogspot.com/2008/05/sky-du-mont.html), Evelyn Opela (l'épouse de Helmut Ringelmann), Klausjürgen Wussow, Wolf Roth, Christian Kohlund, Jacques Breuer, Dirk Galuba et bien d'autres... Mais des rediffusions dans le désordre (3) ajoutent à cet aspect "Mercury Theatre" ou L'heure du crime (4), cette impression que les mêmes invités reviennnent régulièrement.

Horst Tappert sort de Derrick avec classe et dignité dans l'épisode 281, Le cadeau d'adieu (Das Abschiedsgeschenk), où il quitte Munich pour une promotion à Europol. L'intrigue de ce final est plutot faible mais les acteurs du Renard font une apparition non créditée (tout comme Helmut Ringelmann) et la scène finale de Tappert, avec la chanson Hey, Mr Gentleman, interprétée par Helen Schneider, est un grand et émouvant moment de télévision.

La mort de Horst Tappert marque la fin d'une époque dans l'Histoire de la fiction télé allemande. Bien qu'imaginé par Reinecker et Ringelmann, Siska (1998-2007) - le successeur de Derrick, est bien conçu et bien joué mais pas aussi subtil. Derrick était la conbinaison unique des scenarii intelligents et psychologiques de Herbert Reinecker, de la production de Helmut Ringelmann et, par dessus tout, de la qualité des interpretations de Fritz Wepper (acteur talentueux - souvenons nous de Cabaret - mais trop à l'ombre de la star de la série ) et de Horst Tappert.

Farewell, Mr Gentleman... Derrick n'est pas une série policière ordinaire. C'est un roman pour la télévision en 281 chapitres, une pièce en 281 actes, un voyage dans les sombres couloirs du subconscient. C'est Night Gallery à Munich.

(1) Ce qui est évidemment faux. Il y a même depuis plusieurs années de nouveaux fans de Derrick chez les 20-35 ans.
(2) Le site de Juliane Rautenberg's (en Allemand): http://home.arcor.de/juliane.rautenberg/ + Son blog (Idem): http://julianerautenberg.wordpress.com/
(3) Une spécialité française, pour une série malheureusement terriblement adaptée et doublée.
(4) L'Heure du crime (1991), une excellente mais trop courte anthologie policière de Stephen J. Cannell, où un petit groupe d'acteurs interprétait des rôles différents chaque semaine.

In English: http://tattard2.blogspot.com/2008/12/horst-tappert-1923-2008.html

vendredi 12 décembre 2008

LES MEMOIRES DE ROGER MOORE: AMICALEMENT VÔTRE (L'ARCHIPEL) [2/2]

Remerciements à François JUSTAMAND, Claude ROUYER et Nathalie ATTARD

[Note: Au regard de la richesse exceptionnelle de la carrière de Roger Moore et de l'intérêt de cet excellent livre, cet article est en deux parties. La première partie est ici: http://thierryattard.blogspot.com/2008/12/les-memoires-de-roger-moore-amicalement.html]

« Après tout il s'agit de mon autobiographie, donc de moi: d'un homme sophistiqué, modeste, doué, modeste, débonnaire, modeste et charmant - au sujet de qui il y a tant à raconter... »

LE CAS DE M. PELHAM

« Quand on me parle de ce film aujourd'hui, je réponds toujours que c'est l'un des seuls où l'on m'ait laissé jouer. » (Roger Moore à propos du film La seconde mort d'Harold Pelham)

En 1968-1969, alors que la série Le Saint (débutée en 1962) s'achève au terme de 118 épisodes, Roger Moore et Robert S. Baker, son associé au sein de Bamore Productions et de Tribune, signent un accord avec la United Artists pour produire des films qui seront distribués par cette compagnie. Le premier est Double Jeu (Crossplot, 1969), réalisé par Alvin Rakoff - le réalisateur de l'épisode du Saint intitulé Le Roi [voir la première partie de cet article, NDA]. Le film hérite de la majeure partie de l'équipe technique de la série, un mois après la fin du tournage de cette dernière.

Le scénario, signé Leigh Vance et John Kruse, familiers des aventures de Simon Templar, fait de Moore un publicitaire qui en engageant un mannequin hongrois se retrouve au coeur d'une vaste conspiration. La distribution est extraordinaire: Alexis Kanner (le Numéro 48 de la série Le Prisonnier), Francis Matthews (Capitaine Scarlet et les Mysterons de Mars, Paul Temple), Veronica Carlson (une des égéries de la Hammer et habituée des séries ITC) et surtout Bernard Lee, le M des James Bond.

Double Jeu, malgré de très bons moments (1), est un échec qui incite la United Artists à ne pas poursuivre son deal avec Baker et Moore. Sans doute le fait que le distributeur ait axé toute sa promotion sur la notoriété du Saint a t'-il contribué à ce résultat. Moore se voit proposer par EMI (ex ABPC), l'adaptation d'une nouvelle d'Anthony Armstrong, The Case of Mr Pelham (déjà adaptée en 1955 pour un épisode de la série Alfred Hitchcock présente). Réalisé par Basil Dearden (le délirant et génial Assassinats en tous genres/The Assasination Bureau) La seconde mort d'Harold Pelham (The Man who haunted himself, 1970) offre à Roger Moore un des plus grands rôles de sa carrière et rappelle combien le talent de l'acteur vaut bien plus que l'éternel personnage de héros séducteur dans lequel il fut cantonné.

POUR LA REINE ET POUR L'ANGLETERRE

« Mon petit Roger, me dit-il d'un air penaud, je crois que j'ai commis un impair. J'ai traité Joan [Collins] de conne. » (Tony Curtis)

Esquissé dans un des derniers épisodes du Saint, le concept d'Amicalement Vôtre (The Persuaders) est vendu en 1970 par Lew Grade, le patron d'ITC, avec Roger Moore comme premier rôle... sans qu'il lui en ait parlé au préalable! « Le pays a besoin d'argent. Pense à la reine » lance à l'acteur l'exubérant magnat avant de le convaincre avec un très gros chèque, mais Moore ne veut pas s'engager pour plusieurs saisons. Tony Curtis est choisi pour jouer à ses côtés dans la série britannique la plus chère jamais produite à l'époque, avec un tournage en 35 mm dans le sud de la France et au Royaume-Uni. A une telle échelle le succès sur le marché US est vital, or si The Persuaders est un succès en Europe (spécialement en France et en Allemagne), le réseau américain ABC diffuse la série aux Etats-Unis face à un Mission Impossible pourtant déclinant mais qui remporte le match des audiences.

Roger Moore devient ensuite pdg de Brut Films, filiale cinéma de Fabergé, mais Harry Saltzman et Albert "Cubby" Broccoli lui font une proposition qu'il ne peut refuser: succèder à Sean Connery (et à George Lazenby) dans le rôle de James Bond. Lew Grade lui fait alors cette prédiction: « tu vas foutre ta carrière en l'air! »... mais Moore endossera sept fois le smoking de l'agent 007 entre 1973 et 1985. Entre les Bond il tourne entre autres deux adaptations de l'oeuvre du romancier Wilbur Smith pour le producteur Michael Klinger (La loi du Milieu) : Gold (1974) et Parole d'Homme (Shout at the Devil, 1976), des perles du cinéma d'action pre-Die Hard comme Les Oies sauvages (The Wild Geese, 1978) ou Les Loups de Haute mer (North Sea Hijack, 1979). Il se parodie avec classe dans L'équipée du Cannonball (The Cannonball Run, 1981) et "remplace" Peter Sellers dans le rôle de Clouseau dans L'héritier de la Panthère rose (2) (Curse of the Pink Panther, 1983).

« Et c'est à moi que l'on reproche de vouloir rendre Bond amusant! » L'interprétation de James Bond par Roger Moore fait l'objet de nombreuses critiques tandis que l'acteur est soucieux d'être un minimum crédible en choisissant de ne pas le jouer à la manière de son plus illustre prédecesseur, Sean Connery (ce qu'il a visiblement du mal à faire dans Vivre et laisser mourir et L'homme au pistolet d'or). Son Bond est plus débonnaire, charmeur et humoristique (à la manière de Dean Martin en Matt Helm, chansonnette en moins), même si L'Espion qui m'aimait (The Spy who loved me, 1977) et surtout Rien que pour vos yeux (For Your Eyes Only, 1981) lui offrent de grands moments dramatiques.

L'ESPION QU'ON AIMAIT

« Au moment où la musique du générique retentit, sur l'ouverture du parachute aux couleurs de l'Union Jack, les spectateurs nous firent une standing ovation comme je n'en avais jamais vu. Je me sentis soudain très fier, et heureux de voir l'énorme sourire sur le visage de Cubby. »

Tout James Bond, si ce n'est tout Roger Moore peut se résumer au travers de la formidable scène d'ouverture de L'Espion qui m'aimait: 007, après un moment passé dans un chalet avec une superbe créature, échappe à des tueurs lors d'une poursuite à ski - qui fait encore référence aujourd'hui - et saute d'une falaise pour s'en tirer avec ce fameux parachute caché dans son dos. Nobody does it better, Moore est la quintessence de cet esprit britannique qui consiste à faire les choses sérieusement sans se prendre au sérieux.

L'homme a su imprégner James Bond de sa modestie et de son propre sens de l'humour. Depuis 007 il a essayé de monter, en tant que producteur une adaptation du roman Taï-Pan de James Clavell et est apparu dans quelques films ou séries où sa simple participation suffit à évoquer immédiatement l'aura des héros qu'il a incarné à la télévision ou au cinéma. Mais un de ses plus beaux rôles demeurera celui d'ambassadeur de l'UNICEF (le Fonds des Nations unies pour l'enfance): Roger Moore met sa notoriété au service de la noble cause de l'enfance depuis 1991, après que l'actrice et femme de coeur Audrey Hepburn l'ait invité à rejoindre cette organisation.

Noble chevalier puis chevalier errant, puis Lord à la télévision, Sir Roger Moore a été anobli par la Reine dans le monde réel. Sa popularité demeure intacte à ce jour comme en témoigne l'accueil qu'il a reçu lors de la tournée promotionnelle de ses mémoires, notamment en France, où il a été célébré par Michel Drucker, animateur qui bien des années auparavant l'avait reçu pour des émissions consacrées à James Bond et dont les fans français se souviennent.

Amicalement Vôtre (My Word is My Bond) est un livre passionnant, drôle et généreux, truffé d'anecdotes humoristiques ou sensibles sur toutes les personnalités que Roger Moore a croisé lors d'une vie et d'une carrière bien remplies: « Si je n'ai rien de sympathique à raconter sur quelqu'un je préfère m'abstenir. Sauf si mon éditeur insiste lourdement! » L'ouvrage est à l'image de son auteur et de ce qu'il a légué à l'écran ou hors écran, et point n'est besoin d'être cinéphile ou téléphile pour l'apprécier. Il suffit simplement de vouloir rencontrer un homme remarquable.

Amicalement Vôtre - Mémoires de Roger Moore (L'Archipel, 22 euros)

(1) Notamment le superbe générique interprété par John Rowles sur des images de Chambers + Partners, la société responsable du générique de la série Département S.

(2) http://thierryattard.blogspot.com/2008/06/pleins-feux-sur-la-panthere-rose.html

mercredi 10 décembre 2008

ITV HIVER-PRINTEMPS 2008-2009: LA BBC OU RIEN?

Rupert Penry-Jones, Philip Glenister, Freema Agyeman, et même David Morrissey [Message à la Beeb: Faites de lui le 11ème Docteur, nom de Dieu!] Où avons nous vu tous ces visages auparavant?

COLLECTION HIVER-PRINTEMPS

ITV 1 nous propose un aperçu de ce qu'elle a en magasin pour sa collection Hiver/Printemps 2008-2009 avec son site, New Season New Horizons (http://www.newseasonnewhorizons.com/). Parmi les titres les plus excitants: Demons, de la dynamique compagnie Shine, avec Philip Glenister (Ashes to Ashes), Richard Wilson (One foot in the Grave, Merlin) et Mackenzie Crook (Popetown), dans une version contemporaine du Dracula de Bram Stoker. Votre serviteur va aussi attendre avec impatience la troisième saison de Primeval (« Oh, don't ask why... » chantait le Barde).

La nomination pour l'Award de "l'escadron suicide" va à Law & Order: UK (Londres Police judiciaire, en Français?), une co-production entre Kudos (MI-5), le grand producteur américain Dick Wolf et NBC Universal. C'est bien sûr le remake de New York District/New York Police Judiciaire (Law & Order), le monument de Wolf. Sans présumer des qualités de la série mais en gardant à l'esprit ce qui est arrivé en France à Paris Enquêtes criminelles (le remake français de New York Section criminelle) et au R.I.S. italien, faire une copie carbone d'un format est toujours risqué. Et puis y a t'-il une série britannique dans laquelle Freema Agyeman n'est pas? Le rôle du substitut du procureur féminin est toujours ingrat... Voyez ce qui est arrivé aux personnages joués par Elizabeth Röhm (la sortie la plus ratée de l'Histoire de la télévision) ou Annie Parisse. Au moins si ça se plante, Ben Silverman peut toujours le montrer en Prime Time sur NBC en cas de grève des acteurs.

MANY HAPPY RETURNS? (LE RETOUR DU NUMERO 6)

Il y a vraiment de bonnes choses au menu d'ITV1 pour nous faire oublier des produits conventionnels d'ITV comme Miss Marple, La vie sauvage (Wild at Heart) ou Inspecteur Barnaby (est-ce qu'il y a encore quelqu'un à tuer à Badger's Drift et dans ses environs?) : une seconde saison de The Fixer - la très bonne surprise de l'année dernière, une nouvelle version des Hauts de Hurlevent, John Hurt reprend le rôle de Quentin Crisp (The Naked Civil Servant) dans An Englishman in New York, Whitechapel - un thriller avec Rupert Penry-Jones et Steve Pemberton, une adaptation de Affinity (le roman de Sarah Waters) par Andrew Davies, ou Albert's Memorial (avec David Jason, David Warner et Michael Jayston)... Avons nous mentionné de nouveaux épisodes du très classe Inspecteur Lewis et le grand Monsieur Stephen Fry de retour dans une troisième saison de Kingdom?

Permettez nous une réserve si ce n'est des appréhensions à propos du remake de la série Le Prisonnier tourné en Afrique du Sud, avec Jim Caviezel dans le rôle du Numéro 6 et Sir Ian McKellen dans celui du Numéro 2 (choix très malin), et dont la diffusion est prévue en 2009 (1). La mini-série est co-produite par ITV et la chaîne câblée AMC (http://www.amctv.com/originals/the-prisoner/), déja activement présente avec la série Les Arnaqueurs VIP de la BBC. Les remakes de classiques de la ITC Entertainment sont très tendance, puisque Guillermo Del Toro prépare un remake cinématographique de la série Les Champions pour United Artists (http://leegoldberg.typepad.com/a_writers_life/2008/11/they-are-the-champions.html). Ce qui est une idée plutôt étrange vu que c'était une des séries les plus faibles de la compagnie ITC (X-Men, anyone?) Quelqu'un devrait songer à un remake de Département S, avec Stephen Fry en Jason King, à la manière des Experts. Ce serait intéressant. Et notre ami canadien Furious D (http://dknowsall.blogspot.com/) a absolument raison: Stephen Fry devrait faire aussi Q dans le 23ème Bond. Et il devrait être roi de France, pendant qu'on y est...

Un tuyau pour ITV: découpez votre vidéo de présentation de la saison, pu-leaaaase! Mais le dossier de presse est excellent.

(1) Comme le dit la merveilleuse épouse de votre humble scribouillard: « Il ne peut y en avoir qu'un » !

In English: http://tattard2.blogspot.com/2008/12/itv-winter-spring-season-bbc-or-bust.html

vendredi 5 décembre 2008

LES MEMOIRES DE ROGER MOORE: AMICALEMENT VÔTRE (L'ARCHIPEL) [1/2]

Remerciements à François JUSTAMAND et Claude ROUYER

[Note: Au regard de la richesse exceptionnelle de la carrière de Roger Moore et de l'intérêt de cet excellent livre, cet article est en deux parties]

« Après tout il s'agit de mon autobiographie, donc de moi: d'un homme sophistiqué, modeste, doué, modeste, débonnaire, modeste et charmant - au sujet de qui il y a tant à raconter... »

S'il y a un homme qui personnifie la télévision et le cinéma populaire de ces cinquante dernières années, c'est bien Roger Moore. L'acteur britannique fut à la télévision Ivanhoé, mais aussi le fameux Simon Templar (dit Le Saint) ainsi que Lord Brett Sinclair, ce qui aurait pu suffire a faire de lui un monument. Mais il fut également au cinéma James Bond dans sept films qui ont largement contribué à inscrire l'agent 007 dans le patrimoine culturel du monde occidental.

Autant dire que les mémoires de cette incarnation définitive du gentleman-héros séducteur, intitulées en Anglais My Word is My Bond (Amicalement Vôtre, publié aux Editions L'Archipel), étaient attendues à plus d'un titre et raviront autant les téléphiles ou cinéphiles, que celles et ceux qui sont toujours enchantés de revoir cet humaniste, distingué, sans la moindre once de prétention, et plein d'humour, qui se prétend paresseux et confesse son hypocondrie (« la maladie est un thème récurrent chez moi...»)

THE KID STAYS IN THE PICTURE

« Maman! Maman! Je vais être Stewart Granger! »

Roger Moore est né le 14 octobre 1927 à Stockwell, au sud de Londres, d'un père policier et d'une mère caissière (« Dès leur première tentative mes parents avaient atteint la perfection »). Doué pour le dessin, il débute adolescent sa vie professionnelle en 1943 comme animateur stagiaire chez Publicity Picture Production (PPP) en plein deuxième conflit mondial. Au gré de ses fonctions il croise au service cinématographique des armées le lieutenant-colonel David Niven, qui deviendra beaucoup plus tard un ami. En 1945, figurant sur César et Cléopatre (Caesar and Cleopatra), il est remarqué par le premier assistant réalisateur du film, l'irlandais Brian Desmond Hurst, qui l'envoie se former à la prestigieuse Royal Academy of Dramatic Art (RADA).

Il connaît le chômage après sa période militaire et obtient des petits rôles au théâtre, devient ami avec Christopher Lee et fait un peu de télévision pour la BBC, à Alexandra Palace. Après quelques vicissitudes d'acteur débutant, il est pris sous contrat à Hollywood, par la Metro-Goldwyn-Mayer. Il y rencontre quelques unes des grandes vedettes de l'époque, dont George Sanders - premier interprète du Saint, le héros des romans de Leslie Charteris, dans plusieurs films (et qui se suicidera en 1972, comme il en avait confié l'intention à David Niven en 1937).

En 1956, Roger Moore endosse pour la première fois l'armure de la légende télévisuelle en devenant Ivanhoé dans la série éponyme en noir et blanc, dont le pilote fut tourné en couleur. Un de ses partenaires, Robert Brown, jouera plus tard son supérieur, M, dans ses deux derniers James Bond. Lorsque la série se termine, le père de Moore lui suggère de prendre les droits de The Toff, personnage des romans de John Creasey (créateur du Baron sous le nom d'Anthony Morton) ou du Saint de Charteris. Cela ne se fait pas mais l'acteur n'en a pas fini pour autant avec Simon Templar...

LEGEND OF THE WEST

« Comme disait mon vieux papa... » (Bret Maverick, entre autres)

1958, Roger Moore signe avec Warner Brothers un contrat de sept ans et tourne le film Quand la terre brule (The Miracle), mais "la" Warner est en train de s'imposer sur le marché de la télévision avec une véritable "usine à séries" employant des acteurs maison. Sa série Cheyenne (1955-1962), avec Clint Walker fait un carton et inaugure une longue lignée de westerns hebdomadaires à la télévision américaine. Warner Brothers lance plusieurs séries à succès dont 77 Sunset Strip (1958-1964), Les yeux d'Hawaï/Intrigues à Hawaï (Hawaiian Eye, 1959-1963, avec Robert Conrad), Surfside 6 (1960-1962) et surtout l'excellente série western Maverick (1957-1962).

Tous ces titres ont la particularité de se partager les mêmes studios, les mêmes compositeurs, les mêmes réalisateurs, parfois les mêmes scénarii (voire des répliques entières!) et bien entendu les acteurs tournant sur une série sont invités à passer allègrement sur une autre et inversement (ce qui donne parfois lieu aux premiers cross-overs de l'Histoire de la Télévision). Moore, dont le contrat stipule qu'il pourrait "peut-être" faire de la télé, se voit proposer d'apparaître dans un épisode de Maverick en tant que John Vandergelt, face à Bret Maverick (« légende de l'Ouest », comme l'affirme le générique), le (anti)héros interprété par James Garner.

Warner fait ensuite de Roger Moore la vedette de The Alaskans (1959-1969), avant de le reprendre dans Maverick en tant que Beau Maverick, le cousin de Bret et Bart (Jack Kelly), longtemps expatrié en Angleterre. L'idée est en fait de remplacer le très populaire Garner, à couteaux tirés avec le studio. Moore se joint à lui et à Clint Walker pour revendiquer de meilleurs conditions de travail (« Nous rencontrâmes Ronald Reagan, alors directeur de la Screen Actors Guild, mais ce dernier, en dépit de nos arguments, ne nous prêta qu'une oreille polie »). En réaction à cette démarche, Warner Brothers installe une pointeuse dans la salle de maquillage!

LE FAMEUX SIMON TEMPLAR

« Tous mes programmes sont excellents. Il y en a de mauvais, mais ils sont tous excellents. » (Lew Grade)

A la fin de son contrat, en 1961, Roger Moore retourne en Europe et tourne à Rome L'enlèvement des Sabines sous la direction de Richard Pottier (« Je me demande encore si un Anglo-Saxon blond aux yeux bleus était le choix le plus judicieux pour incarner Romulus, élevé par une louve mais puisqu'ils me payaient... ») Les producteurs Robert S. Baker et Monty Berman ont les droits des aventures du Saint et sont associés à Lew Grade, le puissant patron d'ITC (Les Aventures de Robin des bois, L'Homme invisible et Destination Danger), pour en faire une série télévisée. Moore est choisi sans faire d'essai, il s'imagine que la série durera une saison... elle durera sept années et fera de lui une star mondiale: « Ce fut une période très heureuse pendant laquelle je pus jouer un rôle taillé pour mes capacités limitées. »

Roger Moore tourne aux studios d'Associated British Picture Corporation, à Elstree, avec de nombreux acteurs invités dont certains deviendront des vedettes, comme Oliver Reed, le neveu du réalisateur Carol Reed. Il réalisera même des épisodes de la série, aidé en cela par la carte de membre de l'ACTT (1), le syndicat des techniciens, auquel il s'était inscrit en entrant chez PPP. Après 71 épisodes en noir et blanc et alors que la série est enfin vendue à un réseau de télévision américain, à savoir NBC - Le Saint était jusqu'alors diffusé là-bas sur les chaînes de Syndication, Lew Grade propose à Moore de poursuivre l'aventure en couleur mais l'acteur, comme Bob Baker en fait (il l'apprendra après), ne souhaite plus travailler avec Monty Berman.

Bob Baker se sépare à l'amiable de Monty Berman après lui avoir proposé de produire, à la place du Saint, une série d'après des romans du très prolifique John Creasey - auteur que Baker et lui avaient déjà adapté en 1965, avec Gideon's Way: Alias Le Baron (The Baron, 1966-1967). Berman fait de John Mannering, alias... Le Baron (interprété par l'Américain Steve Forrest), une copie conforme de Simon Templar. Il s'associera plus tard au scénariste Dennis Spooner pour produire des séries ITC comme Les Champions, Département S et sa suite Le Mystérieux Jason King (avec le grand Peter Wyngarde), Mon ami le Fantôme et L'Aventurier. Fin 1968 et au terme de 118 épisodes, Roger Moore et Bob Baker - partenaires au sein de la Bamore Productions - estiment avoir épuisé les aventures exotiques de Templar mais se livrent à un intéressant exercice de style avec l'épisode Le Roi (The Ex-King of Diamond). Le Saint y fait équipe avec Rod Huston, un milliardaire texan interprété par Stuart Damon (ex-Les Champions) dans une histoire qui servira de "brouillon" à la série Amicalement Vôtre...

(Fin de la première partie mais Roger Moore reviendra)

Amicalement Vôtre - Mémoires de Roger Moore (L'Archipel, 22 euros)

(1) Association of Cinema Technicians. Voir http://www.transdiffusion.org/emc/insidetv/history/union.php

Deuxième partie: http://thierryattard.blogspot.com/2008/12/les-memoires-de-roger-moore-amicalement_12.html

KNIGHT RIDER ONLINE

Je travaille actuellement sur quelques articles pour les éditions en Anglais et en Français de ce blog (Au programme: Roger Moore, Russell T. Davies, Lonesome Dove...), mais - comme vous le savez, fidèles lecteurs - je suis accroc au blog de Nikki Finke, et je suis tombé sur un des rares commentaires pro Knight Rider 2008, sous l'annonce par Nikki que le réseau NBC "débranchait la prise" (http://www.deadlinehollywooddaily.com/nbc-now-pulling-plug-on-knight-rider). Le commentaire était de "Sue":

« Le show se débrouillait pluôt bien niveau audiences jusqu'à ce qu'il soit contraint de faire un break à cause de la publicité politique. Il est toujours capable de combler ses pertes avec son prochain reformatage. J'aime la série et je ne vais pas perdre espoir maintenant. Je ne peux vraiment blâmer Ben Silverman, la baisse des audiences est générale. Le show de Rosie [Rosie O'Donnell] n'a pas fait mieux dans la tranche horaire de Knight. »

Votre humble serviteur continue à penser que les efforts de Gary Scott Thompson, "showrunner " de Knight Rider, et de son équipe, sont menacés pour des raisons extrinsèques à la qualité de la série, et que le show est une des victimes d'un problème beaucoup plus vaste(http://thierryattard.blogspot.com/2008/11/la-cabeza-de-alfredo-garcia_20.html).

Je ne partage pas l'optimisme de Sue, car je sais en tant que télespectateur de séries depuis plus de trente ans, que le reformatage à mi-saison est dans la plupart des cas un billet de première classe pour l'annulation. Quoi qu'il en soit, son commentaire était lié à cet excellent site qui intéressera autant les fans de l'ancienne que de la nouvelle version de Knight Rider: http://knightrideronline.com/

Et pendant que nous y sommes, un petit bonjour de France à M.Thompson...

Mise à jour : Une interview de Gary Scott Thompson sur le site www.mrmedia.com: http://www.mrmedia.com/2008/11/gary-scott-thompson-knight-rider.html

In English: http://tattard2.blogspot.com/2008/12/knight-rider-online.html

lundi 24 novembre 2008

A VOTRE SERVICE: LE DOUBLAGE DE QUANTUM OF SOLACE (BLOG GAZETTE)

Plusieurs personnes nous ayant rendu visite pensant obtenir sur notre blog quelques renseignements sur le doublage de Quantum of Solace, nous les informons qu'elles pourront trouver la fiche complète de la version française de ce film sur le blog de nos confrères et amis de La Gazette du doublage: http://www.objectif-cinema.com/blog-doublage/index.php/2008/10/28/101-007-quantum

Celles et ceux que ça intéresse pourront aussi trouver sur leur excellent site (car la Gazette est à la fois un site ET un blog) une interview de Eric Herson-Macarel, la voix française du 007 en titre (http://www.objectif-cinema.com/spip.php?article4589) ainsi qu'un entretien avec l'adaptateur de Casino Royale (http://www.objectif-cinema.com/spip.php?article4433&artsuite=0).

jeudi 20 novembre 2008

LA CABEZA DE ALFREDO GARCIA

L'interview de Ben Silverman par le journaliste Charlie Rose pour l'émission de ce dernier (http://www.charlierose.com/view/interview/9554) a été l'occasion pour Nikki Finke d'écrire un article très percutant et émouvant à la fois sur son blog, Deadline Hollywood Daily (http://www.deadlinehollywooddaily.com/transcript-of-ben-silverman-on-charlie-rose/).

REVEIL DOULOUREUX

Ben Silverman est le co-président de NBC Entertainment et de NBC Universal Television Studio depuis 2007, ainsi que le fondateur de Reveille Productions, une compagnie qui a amené avec succès aux Etats-Unis des formats étrangers, tels que le britannique The Office, en tant que remakes.

Mais il semble que le Prime Time de NBC ait besoin de bien plus qu'un "reveille", si ce n'est une "résurrection", après l'annulation du survendu My Own Worst Enemy (avec Christian Slater) et de celle de Lipstick Jungle, et le piètre accueil fait à Kath & Kim - le remake d'une sitcom australienne. L'éloge par Silverman des avantages d'une co-production comme Crusoe a achevé de susciter le scepticisme (http://dknowsall.blogspot.com/2008/09/hollywood-babble-on-on-166-nbc-world.html) après le manque d'enthousiasme causé par la grille de rentrée du réseau.

My Own Worst Enemy est un gâchis du talent de Christian Slater, qui mérite l'équivalent de de ce qu'a été 24 pour Kiefer Sutherland. Les promos laissaient l'étrange impression d'un "Jekyll rencontre Jason Bourne" (http://thierryattard.blogspot.com/2008/09/six-pieds-sous-terre_19.html) - tout le monde copie Bourne de nos jours... (http://thierryattard.blogspot.com/2008/11/pour-une-poignee-de-reconfort.html), et de ce côté-ci de l'océan il semble que la télévision américaine achète ses fictions hebdomadaires uniquement sur "pitch", alors que la télévision britannique construit des séries à partir et autour de scripts (http://dknowsall.blogspot.com/2008/11/boob-tube-how-long-should-series-last.html).

Dans un cas vous avez MI-5 (Spooks), la meilleure série d'espionnage de l'Histoire de la télévision (avec La Taupe), et dans l'autre une longue liste de grotesques pilotes invendus (http://www.leegoldberg.com/non_unsold.html), ou des séries comme Dans l'Oeil de l'espion (Fortune Hunter), Secret Agent Man et My Own Worst Enemy. Même si Dans l'oeil de l'espion était très plaisant à regarder, grâce au regretté Mark Frankel et à des airs de Probe (Search, 1972-1973, une série d'aventure et d'espionnage injustement oubliée). Seule la distance peut sauver ce type de séries, à la grande époque NBC était le réseau de Des agents très spéciaux mais c'était il y a 43 ans.... si Monsieur Solo devait se rendre à Paris aujourd'hui, espérons au moins que la production éviterait le ridicule.

LE FANTÔME DE BRANDON TARTIKOFF

Ce n'est pas la première fois que Nikki pointe son lance-flammes sur Ben Silverman (http://www.deadlinehollywooddaily.com/major-nbc-shakeup-ahead-network-wants-to-ax-teri-weinberg-hopes-ben-silverman-quits/) mais sa réaction à l'évocation, dans l'interview de Silverman, du nom de Brandon Tartikoff - le légendaire exécutif qui porta NBC sur les plus hauts sommets avec de nombreuses séries parmi les plus populaires des années 1980 (Hill Street Blues, Miami Vice, La loi de Los Angeles et plein d'autres) - est plutôt émouvante pour ceux pour qui ce nom signifie vraiment quelque chose: « Je souhaite aussi que Silverman arrête d'essayer d'entrer en contact avec le fantôme de Brandon Tartikoff [...] Oui, Silverman a travaillé pour Tartikoff une fois ou deux. Mais Ben, je connaissais Brandon. Tartikoff était un ami. Et vous monsieur, n'êtes pas Brandon Tartikoff ».

Après l'annulation de My Own Worst Enemy et de Lipstick Jungle le blâme est apparemment retombé sur Katherine Pope, présidente de Universal Media Studio (http://www.nypost.com/seven/11142008/gossip/pagesix/black_widow_effect_at_nbc_138573.htm), intervenue sur le développement de ces deux séries, comme sur celui de l'affligeant revival de Super Jaimie ainsi que du surrestimé Heroes (http://www.thefutoncritic.com/news.aspx?id=20070604nuts01).

D'après le New York Post, Ben Silverman a réussi à diminuer les coûts chez NBC et semble satisfaire ses patrons, particulièrement le président de NBC Jeff Zucker. Et les analystes disent que les audiences sont devenues moins importantes à considérer alors qu'elles s'éparpillent sur les chaînes du câble. Comme le disait Silverman au Post l'été dernier: « Nous travaillons pour les marges, pas pour les audiences ».

DANS UN MONDE...

L'industrie de l'Entertainment a profondément changé depuis l'ère du grand Brandon Tartikoff, Les Networks sont concurrencées par une multitude d'offres du câble, du statellite et d'internet. Pour être juste, NBC n'est pas le seul réseau a avoir eu des mauvaises saisons depuis quelques années. Et le vrai problème pour les "Big Four" (CBS, ABC, NBC, Fox) est la pertinence de continuer de commander et de montrer des séries hebdomadaires dans un environnement où les télespectateurs sont accoutumés aux fictions américaines de qualité venant de chez Showtime, AMC ou HBO, ou à la crème de la télévision britannique via BBC America ou The Sci-Fi Channel.

La meilleure illustration de ce dilemme c'est la nouvelle version de Knight Rider diffusée par NBC, une série pilotée par un homme, Gary Scott Thompson, qui a un vrai sens de ce que devrait être de l'Entertainment populaire et léger sur les réseaux (souvenez-vous de Las Vegas). La série est une cible sur internet depuis ses débuts avec des reproches allant de la comparaison avec l'original et la distribution, jusqu'à la qualité des scripts et les effets spéciaux. Ce qui est vraiment fascinant, lorsqu'on se souvient que l'original, lançé sous le règne de Brandon Tartikoff, était produit par Glen A. Larson (cela dit sans aucune offense, ses séries sont de magnifique souvenirs d'enfance) et était essentiellement une version 1er degré de Maman Bagnole avec les normes de production de la Universal Television de l'époque et des cascades.

Et voilà maintenant que la nouvelle version est modifiée suite à des audiences en yo-yo et que trois membres de la distributions s'en vont, dont Bruce Davison, un des plus grands acteurs américains contemporains. Vraiment dommage, 25 ans auparavant (lorsque les trois grands réseaux d'alors étaient sans rivaux), la série aurait été le toast du moment, mais les télespectateurs semblent souhaiter que les réseaux leur montrent des séries comme Dexter ou Californication, ou pas de séries du tout - America's got talent ou Deal or no Deal sont très agréables à regarder.

Adapter des formats étrangers ne sera certainement pas la solution aux problèmes des grilles de cet automne ou de la saison entière. Voyez ABC et son Life on Mars US... Mais quel est donc l'intérêt d'adapter des séries que les télespectateurs américains connaissent déjà grâce à BBC America ou internet? Est-ce que les responsables de la programmation croient que les séries britanniques sont toujours ghettoïsées sur PBS ou relégués à des deals bon marché pour la syndication? Que nous réserve NBC pour l'avenir? Un remake américain de Hotel Babylon à Las Vegas? Soyons sérieux...

Le véritable défi pour Ben Silverman et ses collègues ou homologues c'est de répondre à cette seule question: quel type d'Entertainment pour les réseaux au 21ème siècle?

Mise à jour: Alain Carrazé parle sur son blog de ce qu'il qualifie de "déclin" de NBC (http://alaincarraze.blog.canal-plus.com/archive/2008/11/21/nbc-le-declin-continue.html) + Lee Goldberg à propos de Tim Kring et Heroes (http://leegoldberg.typepad.com/a_writers_life/2008/11/how-not-to-get-people-to-watch-your-show.html).

In English: http://tattard2.blogspot.com/2008/11/la-cabeza-de-alfredo-garcia.html

vendredi 14 novembre 2008

DES NOUVELLES DE STEPHEN TOBOLOWSKY

Si vous ne deviez choisir qu'une seule raison d'aimer ce business, ce serait Monsieur Stephen Tobolowsky (http://thierryattard.blogspot.com/2008/05/stephen-tobolowsky.html), un acteur faisant partie de ces professionnels consommés qui donnent sens à un film par leur simple présence au service d'un personnage, d'un film ou d'un réalisateur. Sans parler du fait que seul son nom peut inciter votre humble serviteur à regarder Heroes.

Mieux, l'homme est une des personnes les plus gentilles de Hollywoodland et a toujours une anecdote généreuse à propos de sa carrière ou de sa vie à vous offrir, tel un cadeau à votre fête d'anniversaire (http://thierryattard.blogspot.com/2008/05/stephen-tobolowskys-birthday-party.html). Et avoir le privilège de discuter avec lui de Bob Darnell ou de Joseph Ruskin vous rappelle que les films ce n'est pas que le Box Office ou les "franchises".

« J'étais récemment sur un film important qui devrait sortir bientôt... The Time Traveller's Wife, avec Eric Bana et Rachel McAdams. C'était très agréable à tourner. C'est un mélange intéressant entre une histoire d'amour et de la science-fiction... J'espère que ça marche » nous a confié Stephen hier.

« Je viens juste de tourner un pilote qui s'intitule Glee, c'est de Ryan Murphy, le créateur de Nip/Tuck. Si ça marche ça débutera juste après American Idol en janvier. Là encore le script et le tournage étaient vraiment agréables et la distribution est très talentueuse... mais j'ai appris qu'on ne peut rien considérer comme garanti dans la vie. Lorsque je tournais le film Héros malgré lui, je pensais que ce serait un slam dunk. C'était réalisé par Stephen Frears (un des meilleurs réalisateurs contemporains) et il y avait Dustin Hoffman, Andy Garcia ainsi que Geena Davis. En plus c'était écrit par David Webb Peoples (nominé aux Academy Awards pour Impitoyable)... Mais le film n'a pas vraiment marché comme il aurait dû. C'était bon mais il avait vraiment de quoi être formidable... On ne sait jamais comment ça va se passer. »

Hollywood devrait faire une série télé sur Stephen Tobolowsky. Il est à sa façon un personnage et l'aventure n'est jamais loin quand il est quelque part, spécialement lorsqu'il est en vacances. « Cette année je me suis cassé le cou en cinq endroits et j'ai survécu pour pouvoir le raconter!!! » ajoute t'-il. « Mais je me sens mieux chaque jour! »

Merci pour tout, Monsieur Tobolowsky.

(C) Thierry Attard

CHILDREN IN NEED SUR BBC ONE


Comme chaque année depuis 1980 Children in Need, la soirée caritative britannique pour les enfants, offre de grands moments de télévision pour une grande cause. Ce soir sur BBC One, ce sera l'occasion d'avoir un aperçu du spécial de Noël de Doctor Who et la série Ashes to Ashes (la suite de Life on Mars) rencontrera l'émission automobile Top Gear!

Fais chauffer la Quattro!

http://www.bbc.co.uk/pudsey/

jeudi 6 novembre 2008

LA VOIX FRANÇAISE DE SETH ROGEN AU QUEBEC

Le doublage est rarement abordé en ces lieux mais l'homme est talentueux et c'est un ami: l'excellent site http://www.cinoche.com/ publie un entretien très intéressant (une entrevue, comme on dit là-bas) avec Tristan Harvey (http://www.tristanharvey.com/), la voix française de Seth Rogen (Zack et Miri tournent un porno/Zack et Miri font un porno) au Québec depuis 40 ans, toujours puceau/40 ans et encore puceau, (http://www.cinoche.com/dossiers/189).

J'ai eu l'occasion d'interroger Tristan en 2004 lorsque j'étais rédacteur en chef adjoint de La Gazette du doublage (http://www.objectif-cinema.com/spip.php?article2454). La qualité du doublage en Français au Québec est toujours de très haut niveau et mérite d'être reconnue en tant que référence.

Bande-annonce de Zack et Miri (VFQ): http://www.cinoche.com/trailers/5283/5562

mercredi 5 novembre 2008

MICHAEL CRICHTON (1942-2008)

Je viens d'apprendre à la télévision la nouvelle de la mort de mon romancier favori, Michael Crichton. Il avait 66 ans.

Auteur de La variété Andromède, Soleil levant, Le parc jurassic/Jurassic Park, ou de Harcèlement, parmi beaucoup de chefs-d'oeuvre de la littérature moderne, il fut aussi un talenteux réalisateur dans les années 1970-1980, avec de grands films comme Mondwest ou Looker.

Il était un esprit brillant et un visionnaire. Être privé dans l'avenir du plaisir de lire "le dernier Michael Crichton" est vraiment une très triste perspective.

POUR UNE POIGNEE DE RECONFORT (A PROPOS DE LA SORTIE DE QUANTUM OF SOLACE)

Remerciements spéciaux à François Justamand

« C'est un monde nouveau, avec de nouveaux ennemis, et de nouvelles menaces. Mais vous pouvez toujours compter sur un homme... » Et bien au moins ses producteurs le peuvent: Quantum of Solace, le nouveau 007 - sorti le 31 octobre - bat tous les records pour son premier week-end en Europe: 1,3 millions d'entrées en France (sur 3 jours) et £ 15 384 217 pour sa sortie au Royaume-Uni, marché test par nature pour la franchise. Le film sort le 14 novembre aux Etats-Unis.

Avec une note de 261 millions de dollars pour un film de 105 minutes, peut-être le film le plus couteux minute par minute jamais réalisé (http://www.deadlinehollywooddaily.com/new-bond-wannasee-double-casino-royale-questions-about-quantum-of-solace-cost/), l'échec n'était pas une option pour Sony, MGM et Eon Productions, les forces derrière Quantum. Les explications de ces très bons chiffres du premier week-end sont multiples: des dates de sorties pertinemment planifiées, pas de concurrence réelle, le succès commercial de Casino Royale - le précédent, et le prestige d'un des mythes les plus solides de la pop culture: James Bond.

Mais lequel exactement? Le personnage créé par Ian Fleming pour ses romans? Sean Connery dans James Bond 007 contre Docteur No (1962) et Bons baisers de Russie (1963)? Ou le sommet de l'évasion extravagante sur grand écran établi dans Goldfinger (1964): le super-espion séducteur et suave combattant des vilains mégalomanes, avec un petit peu d'aide sous la forme de gadgets, des voitures pleinement équipées pour permis de tuer, et des filles tout droit sorties de rêves de Hugh Hefner. Le tout avec cette ingéniosité et cette sagacité typiquement britanniques, au shaker et pas à la cuillère.

Les livres demeurent rarement intacts lorsqu'ils sont adaptés au cinéma. Honnêtement et avec tout le respect dû à l'oeuvre de Ian Fleming, la seule façon convenable d'être aujourd'hui fidèle à ses romans serait de produire des mini-séries se passant à l'époque des livres et avec les normes de qualité d'un Poirot avec David Suchet. Sans l'alchimie qui fit de Sean Connery la star immortelle du dyptique Docteur No/Bons baisers de Russie (longtemps avant que les producteurs ne décident que Quantum of Solace serait une suite) la création de Fleming aurait été transposée uniquement en bande dessinée (http://thierryattard.blogspot.com/2008/04/james-bond-007-spy-who-loved-me.html) et pour l'épisode d'une anthologie oubliée de la Préhistoire de la télévision.

Goldfinger a fait le cinéma commercial moderne et imposé les canons d'un genre à part entière pour des générations allant tous les deux ans (sauf exceptions) voir UN JAMES BOND, « la marque déposée du grand spectacle moderne »: élégance, action, aventure, lieux exotiques, voitures classieuses, la gigantesque tanière du méchant conçue par Ken Adam, les traits d'esprit, les fabuleux génériques, le talent de John Barry et CE thème. Le thème le plus célèbre au monde: The James Bond theme.

Et ce Bond-là a perduré pendant quarante ans avec flamboyance, beaucoup de hauts, quelques bas, essayant parfois maladroitement d'émuler des phénomènes du Box Office de leurs temps, comme Shaft pour Vivre et laisser mourir (1973), les films de la Shaw Brothers pour L'homme au pistolet d'or (1975), où même La guerre des étoiles - prototype des "franchises" telles que nous les connaissons aujourd'hui, pour Moonraker en 1979. Mais toujours avec un si ce n'est plus de ces moments construisant sa gloire éternelle et toujours dans le respect de l'âme du James Bond cinématographique: évasion à grand spectacle garantie. A cette époque Bond était synonyme de sensations cinématographiques vendues par des génies de la publicité imaginant les plus grands slogans et commandant de magnifiques affiches peintes. Nous connaissions le nom, nous connaissions le numéro.

Alors vint Meurs un autre jour (2002), avec ses excès et ratés sous le poids des mesures de catégories d'audience et contre le reflet d'un miroir déformant appelé Austin Powers. A ce moment-là votre humble serviteur, depuis longtemps amateur de James Bond, pensait qu'il était temps d'aider la franchise à ne pas finir en sujet perpétuel de rigolade pour Mad Magazine, et théorisa pompeusement devant ses infortunés amis le soi-disant manque de crédibilité de 007 au 21ème siècle - insistant sur le fait que ses espions favoris de l'écran étaient Harry Palmer et George Smiley (ce qui est toujours le cas, à propos...)

James Bond avait atteint le sommet de sa popularité en tant qu'un des « Trois B », la Sainte Trinité des Swinging Sixties: Les Beatles, Bond et Batman. A l'âge sombre d'un monde post-11 septembre, le Batman subit un "reboot", et un délai de 4 ans entre Meurs un autre jour et Casino Royale (2006) vit l'émergence de super agents de fiction brutaux et sans humour: Jack Bauer, tourmenté sauveur 7 jours par semaines, et le nouveau Jason Bourne incarné par Matt Damon. Mission: Impossible III, un des meilleurs thrillers d'action jamais réalisé, fit le reste et acheva de convaincre les producteurs des James Bond, qu'un reformatage était le seul moyen de faire de 007 un des "B" de l'action, avec Bourne et Bauer (le Ethan Hunt de Tom Cruise étant le quatrième mousquetaire).

« C'est un monde nouveau, avec de nouveaux ennemis, et de nouvelles menaces. Mais vous pouvez toujours compter sur un homme... » L'ennui avec Casino Royale c'est que l'homme et tout ce qui a fait du personnage un mythe moderne de la culture populaire sont portés disparus. Et nous avons dû attendre 4 longues années d'habituelles rumeurs et spéculations (empirées à l'ère d'internet), nous laisser convaincre par l'idée de changement substantiels, et accepter Daniel Craig en tant que nouveau James Bond (pourquoi pas? Il était excellent dans Layer Cake) avec les meilleurs sentiments et intentions... pour un résultat plutôt désespérant (1). Le Box Office a plebiscité les choix de Barbara Broccoli et Michael Wilson, patrons de la série lançée par Albert R. Broccoli et Harry Saltzman en 1962, mais à ce jour les pro et les opposants au rebootage façon « James Bourne » sont toujours en train de discuter si le film est du pur Bond ou non (2).

Rétrospectivement, Meurs un autre jour a été le déclencheur si ce n'est le bouc émissaire de ce reboot. Die Another Day n'est ni meilleur ni pire qu'un autre épisode de la franchise. Le film a essayé d'être à la hauteur du titre de « Marque déposée du grand spectacle moderne» hérité des années d'or de 007, dans un monde (une pensée ici pour le regretté Don LaFontaine...) où il y a un blockbuster sorti de l'usine Hollywoodland par semaine, et où les Allemands d'action concept produisent plus de séquences d'action spectaculaires dans un épisode d'Alerte Cobra que l'industrie cinématographique dans 144 minutes de Casino Royale. Hollywood sait cela, louez donc un des films récents du grand Bruce Willis.

Meurs un autre jour est le Bond Ultimatum du 007 "vieille école". Avec Quantum la suprématie de Bond reste incontestée du point de vue du Box Office mais il ne reste pratiquement rien aujourd'hui de la mémoire de Bond, la Bond Identity: un logo sur des affiches, le thème de James Bond sur les bandes-annonces. Pourquoi pas après tout? Vraiment. Tout change, il y a peut-être maintenant un Bond pour chaque génération: un dinosaure sexiste, mysogine, relique de la Guerre froide ou un instrument brut. Votre humble membre du Gang des chaussons aux pommes n'ira pas voir Quantum of Solace, une régénération gâchée dans Doctor Who c'est assez de déception pour cette année. Sans rancune aucune, Monsieur Bond...

« Voyez le cercueil, il a les mêmes initiales que vous: J.B.
- Je préfère que ce soit lui plutôt que moi. »
(Opération Tonnerre, 1965)


(1) Nous développerons notre avis sur Casino Royale dans un prochain article.

(2) Plus généralement, Furious D à propos du cas « Bond, James Bond » : http://dknowsall.blogspot.com/2008/11/cinemaniacal-bond-james-bond.html (voir aussi: http://dknowsall.blogspot.com/2008/02/cinemaniacal-1-shaken-not-stirred.html).

In English: http://tattard2.blogspot.com/2008/11/fistful-of-solace.html

jeudi 30 octobre 2008

24 SAISON 7 (THE HOLLYWOOD REPORTER)


http://www.hollywoodreporter.com/hr/index.jsp

CE N'EST QU'UN FILM, INGRID (EPISODE 6)

Dans lequel Ingrid se demande si elle ne devrait pas se régénérer en la grande Nikki Finke et appeler ce bloc-notes, Ce n'est qu'un film, Nikki...

DANSE DE LA PLUIE AU 30 ROCK

Nikki Finke's Deadline Hollywood Daily nous offre une fois de plus un scoop, avec une nouvelle très intéressante pour celles et ceux qui suivent le business de la télévision en Amérique et au Royaume-Uni: Paul Telegdy, un des hauts responsables de BBC Worldwide America (Vice-président exécutif des ventes télé, du contenu et de la production) vient de quitter de manière inattendue la filiale commerciale américaine de la Corporation, et NBC le veut comme futur VPE en charge du divertissement scénarisé et non-scénarisé(http://www.deadlinehollywooddaily.com/is-this-craig-plestis-replacement-at-nbc/). Cela suffirait à faire sensation selon nos critères personnels mais Nikki ajoute que les négociations comprendraient la possibilité pour Telegdy d'obtenir dans un an une position plus élevée telle que Président de NBC Entertainment. Ce qui signifie qu'il serait en mesure de pouvoir remplacer Ben Silverman, co-président de NBC Entertainment et NBC Universal Television Studio.

Chez BBC Worldwide America, Paul Telegdy a supervisé l'adaptation américaine de l'émission Strictly come dancing, Dancing with the Stars, (http://www.variety.com/article/VR1117985135.html?categoryid=3070&cs=1) et Viva Laughlin, l'éphémère remake américain de Blackpool (est-ce que « éphémère remake américain » est un pléonasme?) Dans les épisodes précédents d'Ingrid nous vous avons parlé du départ de Jane Tranter (responsable des fictions à la BBC) pour Los Angeles, où elle est maintenant Vice-présidente executive de la branche production nord-américaine de BBC Worldwide (aux côtés de Paul Telegdy, lorsqu'elle a été nommée à ce poste).

Si l'arrivée de Telegdy chez NBC se confirme, et avec Jane Tranter à LA, la perspective d'un co-producteur US pour Doctor Who va devenir encore plus précise.

DOCTEUR NO

« Darling you got to let me know, should I stay or should I go ». Il était grand temps pour Doctor Who d'échapper à une de ses plus pesantes incertitudes: le fantastique David Tennant a annoncé qu'il ne reprendrait pas le rôle du Docteur en 2010 (http://news.bbc.co.uk/1/hi/entertainment/7698539.stm). Souvenez-vous que le fait que Tennant, un des Docteurs les plus populaires de l'Histoire de la série, devait jouer sur scène avec la Royal Shakespeare Company fut une des raisons du retard de la saison 5.

Souvenez-vous aussi de la fameuse régénération gâchée à la fin de la première moitié du final de la saison 4. Et souvenez-vous (« Souviens toi, souviens toi...») qu'il y a un Prochain Docteur interprété par l'excellent David Morrissey dans le spécial de Noël de cette année. Et bien, lorsque le Docteur se régénèrera pour de bon espérons que ce sera sous les traits de Morrissey. Nouveau visage, nouveaux Showrunners, la série Docteur Who a définitivement besoin d'une vraie régénération. A propos, lisez donc s'il vous plaît les réactions à cette annonce sur Behind the Sofa (http://www.behindthesofa.org.uk/2008/10/im-sorry-im-so.html#comments), le blog que tout fan de Docteur Who doit lire une fois par jour (au moins).

ONCE DE RECONFORT: MAIS A QUEL TAUX?

Ah, Nikki... Revenons à DHD: Nikki Finke pose la question à 261 millions de dollars au sujet de Quantum of Solace, le nouveau 007 (vraiment?): le rapport entre le prix total du film et sa durée de 105 minutes. 2,5 millions de dollars par minute! Peut-être le film le plus couteux à la minute jamais réalisé (http://www.deadlinehollywooddaily.com/new-bond-wannasee-double-casino-royale-questions-about-quantum-of-solace-cost/).

EN ATTENDANT LE D-DAY

Le canadien D.R. MacMaster (alias Furious D), auteur, scénariste et extraordinaire expert en matière d'industrie de l'Entertainment, a annoncé sur son blog, The Fantastic Adventures of Furious D (http://dknowsall.blogspot.com/), qu'il travaille sur un livre qui contiendra son impressionnante compréhension du business du cinéma et de la télévision ainsi que de son histoire, son sens aiguisé de l'analyse et son humour. Tous les ingrédients qui font que nous aimons son blog (http://thierryattard.blogspot.com/2008/08/ce-nest-quun-film-ingrid-episode-3.html).

In English: http://tattard2.blogspot.com/2008/10/its-only-movie-ingrid-episode-4.html

samedi 25 octobre 2008

SOUVENIRS, SOUVENIRS...

Nous ne faisons pas de politique ici et nous ne faisons pas non plus dans la vidéo virale. Mais cette formidable vidéo avec Ron Howard, Andy Griffith et Henry Winkler, est un merveilleux moment pour ceux qui ont grandi avec The Andy Griffith Show and Les jours heureux (Happy Days). Merci à Nikki Finke et son blog pour avoir attiré notre attention sur ce joyau(http://www.deadlinehollywooddaily.com/opie-andy-richie-the-fonz-for-obama/).

See more Ron Howard videos at Funny or Die

mercredi 22 octobre 2008

QUANTUM OF SOLACE... ONCE DE RECONFORT: LITTERALEMENT?

Quantum of Solace, le nouveau 007, réalisé par Marc Forster, arrive en France ainsi qu'au Royaume-Uni le 31 octobre, et a d'ores et déjà été montré à la presse. Cette suite directe du reformatage « James Bournien » et carton de 2006, Casino Royale, a inspiré des premières réactions assez contrastées de la part de critiques qui avaient apprécié bona fide le précédent James Bond avec Daniel Craig.

MEURS UN AUTRE JOUR

Lizo Mzimba, de BBC News (http://news.bbc.co.uk/2/hi/entertainment/7676637.stm
), apprécie la caractérisation de Bond, alors que « le véritable intérêt réside dans la manière dont Bond traite avec les individus et les situations qu'il rencontre sur son chemin », et apprécie également les intentions des responsables de la franchise 007: « c'est un mouvement courageux de pousser encore plus loin un certain nombre des thèmes développés dans Casino Royale, spécialement la redécouverte de qui est Bond, et pourquoi il est ce qu'il est ». Deux ans après Casino il avertit les adversaires du Bond reformaté que « la nature même du film pourrait repousser ceux qui désirent vivement le retour des gizmos, gadgets et des traits d'esprits de Bond lorsqu'il dispose d'opposants sans visages ».

Kim Newman, d' Empire (http://www.empireonline.com/reviews/reviewcomplete.asp?FID=134523
), fait l'éloge d'une « suite rythmée et visuellement imaginative à la relance de la série » [...] « A une époque marquée par les excès des franchises, c'est extrêmement admirable que Quantum of Solace soit le Bond le plus court – il abandonne une grande partie des maniérismes de cette longue série (traits d'esprit, scènes d'exposition, tourisme de guide de voyage, Q et Moneypenny) ».

David Edwards, critique du Daily Mirror (http://www.mirror.co.uk/news/top-stories/2008/10/18/first-review-of-new-james-bond-movie-007-115875-20815336/
): n'est pas déçu mais « ne vous attendez pas à la flamboyance de Casino Royale ». Une opinion partagée par Peter Bradshaw du Guardian (http://www.guardian.co.uk/film/2008/oct/18/jamesbond1): « Quantum of Solace n'est pas aussi bon que Casino Royale: l'élégance racée des débuts de Craig en Bond a été diluée en faveur de l'action conventionnelle »). Bradshaw est impressionné par Craig: « il porte le film: c'est une tâche indéfinissable pour un acteur. Craig est à la hauteur».

Mark Monahan, du Telegraph (http://www.telegraph.co.uk/arts/main.jhtml?xml=/arts/2008/10/18/bfquantum118.xml
), se demande « si le réalisateur Marc Forster et les scénaristes Paul Haggis et Neal Purvis n'ont pas essayé un peu trop d'éloigner le film des traditionnelles intrigues des James Bond » mais convient que « Craig incarne le personnage avec un charisme impitoyable. Et, par dessus tout, il capte votre attention ».

PERMIS DE TUER

Daniel Craig fait l'objet d'un quasi-consensus: « Craig, il faut que cela soit dit, est excellent », écrit Ali pour The Shiznit (http://www.theshiznit.co.uk/review/quantum-of-solace.php), au contraire de Marc Forster en tant que réalisateur, « complètement dépassé par une franchise aussi large. Des séquences à haut rythme, comme la poursuite en voiture au début et une poursuite extrèmement bournienne sur les toits, sont désorientantes à l'extrème: trop rapides, trop bâclées et montées trop rudement ». Référence évidente des producteurs depuis Casino Royale, Jason Bourne devient un problème... « peut-être que Dan Bradley (1), l'ex-protégé de Paul Greengrass, devrait en être tenu responsable... »

Richard Brooks, rédacteur en chef en charge des Arts au Sunday Times, s'offre sa propre Gunbarrel sequence (« C'est le public qui va avoir besoin de réconfort, 007 »): « C'est James Bond, permis d'ennuyer. Quantum of Solace est peut-être une suite à Casino Royale mais n'a pas le panache ou le brio de ce film » (http://entertainment.timesonline.co.uk/tol/arts_and_entertainment/film/article4969426.ece). Le film « manque de l'esprit, l'ironie, ou de tout ce qui a fait la force de tant de films de 007 » et la chanson du générique par Alicia Keys et Jack White est « amélodique ». « Avec une durée d'environ une heure quarante, ce Bond est plus court que beaucoup. Pourtant il paraissait plus long ».

BONS BAISERS DE PARIS

Il y a deux ans, Casino Royale, a laissé des traces parmi les aficionados français de 007 après un débat enragé entre les avocats de la relance de la franchise et les fans du Bond « Old School ». François Justamand, rédacteur en chef de La Gazette du doublage (http://www.objectif-cinema.com/rubrique.php3?id_rubrique=0168
), collaborateur du site http://www.jamesbond-fr.com/ (2), et surtout un des grands experts es James Bond en France, confie ses premières impressions à notre blog: « Les séquences d'action souffrent d'un montage trop "cut", le film est dépourvu des "repères" familiers des Bond, certains personnages sont insuffisament développés (Fields, Greene), idem pour l'organisation Quantum (peut-être plus développée dans les prochains films?) Le script est morne et la fin expéditive ». Du côté des plus, François Justamand reconnaît quelques scènes intimes, de bons dialogues de temps à autre, et certaines bonnes idées des scénaristes, telle la conférence codée pendant la représentation de La Tosca.

La Tosca retient l'attention de Kevin Collette, journaliste et spécialiste de Bond, qui considère que toute la séquence est gâchée par son « montage speed à la Jason Bourne » (
http://www.jamesbond-fr.com/news-1224530966-36-Un-Bond-post-moderne-.html). Bourne une fois encore, on en revient toujours là que cela nous plaise ou non...

Mise à jour: Jetez donc un oeil, s'il vous plaît, à cette intéressante et parfois rude discussion dans la section Commentaires d'un sujet du Nikki Finke's Deadline Hollywood Daily où Nikki parle du démarrage de Quantum of Solace au Box Office européen: http://www.deadlinehollywooddaily.com/bond-shatters-uk-box-office-record/.

(1) Coordinateur des cascades sur les Bourne, réalisateur de seconde équipe sur Quantum of Solace.

(2) François Justamand est également membre éminent de l'association Sérialement Vôtre (http://www.serialement-votre.fr/
). Sa critique de Quantum of Solace: http://serialement-votre.etron.fr/?p=91

In English: http://tattard2.blogspot.com/2008/10/quantum-of-solace-literally.html

samedi 11 octobre 2008

MARC CASSOT

Le toujours très actif site La Gazette du doublage, dirigé par François Justamand et Rémi Carémel, vient de publier un intéressant entretien avec le comédien Marc Cassot, voix française du regretté Paul Newman (http://www.objectif-cinema.com/spip.php?article5006).

L'équipe de La Gazette publie également un blog (http://www.objectif-cinema.com/blog-doublage/), dans lequel vous trouverez un hommage à Roger Rudel, voix française de Kirk Douglas (http://www.objectif-cinema.com/blog-doublage/index.php/2008/10/05/96-roger-rudel-1921-2008) ou de Ross Martin, le Artemus Gordon de la série Les Mystères de l'Ouest.

jeudi 9 octobre 2008

CE N'EST QU'UN FILM, INGRID (EPISODE 5)

Ingrid se demande si l'expression boursière « Bear Market » (Bear = ours), utilisée pour désigner un marché baissier, signifie qu'à la fin on a le droit de manger l'ours si l'ours ne nous mange pas avant.

LA CONQUÊTE DE L'OUEST

The Guardian a confirmé ce que le toujours excellent journal britannique appelle: « le secret le moins bien gardé de la télévision »: Jane Tranter, contrôleur de la BBC pour la fiction, quitte son poste pour devenir Vice-présidente de la programmation pour la branche production nord-américaine de BBC (http://www.guardian.co.uk/media/2008/sep/22/janetranter.bbc). Jane Tranter a plus que contribué à faire des fictions de la Beeb le principal produit d'exportation de la Corporation, avec des séries comme le nouveau Doctor Who, Life on Mars ou MI-5 (http://thierryattard.blogspot.com/2008/08/ce-nest-quun-film-ingrid-episode-4.html). Maintenant, Ben Dowell pose la question à £ 100 000: De quelle manière le départ de Jane Tranter va t'il affecter l'offre fiction de la BBC, particulièrement avec une redevance plus basse qu'espérée? (http://www.guardian.co.uk/media/organgrinder/2008/sep/22/bbc.television)

Jane Tranter sera remplacée par Ben Stephenson, responsable des commandes de dramatiques. Il y a eu des rumeurs selon lesquelles la BBC aurait essayé de convaincre Jane Featherstone, co-fondatrice de la compagnie de production Kudos (MI-5, Les Arnaqueurs VIP...), de prendre le job. Mais nous apprenons de Tara Conlan, une de nos signatures favorites, que Featherstone vient d'être nommée directrice de la création de Kudos, tandis que Stephen Garrett, co-fondateur de la compagnie, devient président exécutif - en charge du développement international et stratégique (http://www.guardian.co.uk/media/2008/oct/08/independentproductioncompanies.television).

ABSOLUMENT... PAS?

Nous verrons d'ici deux ou trois semaines ce qu'il advient du remake américain de Life on Mars , mais voici maintenant que le réseau Fox travaille sur un remake de la mythique sitcom britannique Absolument fabuleux (Absolutely Fabulous, 1992-2005) par l'équipe qui s'occupe du sympathique Mon oncle Charlie. C'est la troisième tentative de refaire Ab Fab, avec le film français de 2001 et un projet sans suite d'ABC piloté par Roseanne Barr, et dans lequel Carrie Fisher était impliquée.

Votre humble accroc au lait Nestlé étant trop jeune pour la sénilité (40 ans la semaine prochaine), reportez vous à http://thierryattard.blogspot.com/2008/08/le-jeune-barnaby-jones-raconte.html pour avoir son opinion non sollicitée sur les remakes. Ce qui est amusant, c'est que je vois que cette version de la Fox a attiré l'attention du multi-talentueux Lee Goldberg (http://www.leegoldberg.com/about.html), auteur, scénariste, producteur, Historien et expert de la télévision, enseignant, etc - un homme souvent mentionné ici(http://leegoldberg.typepad.com/a_writers_life/2008/10/absolutely-scary.html). Nous vous recommandons A Writer's Life (http://leegoldberg.typepad.com/), son blog, ainsi que son site officiel (http://www.leegoldberg.com/index.html).

15 MINUTES DE CELEBRITE...

Bon, euh, comment présenter ça... les très gentils responsables de Beans on Toast, le site français de Doctor Who, ont publié le mois dernier un entretien avec votre serviteur - consultant pour le doublage français de la saison 3 de la nouvelle série de Doctor Who: http://www.doctor-who.fr/d_itw_attard.php.

mardi 30 septembre 2008

BLAXPLOITATION 70’S SOUL FEVER ! (JULIEN SEVEON/BAZAAR & CO)

A Melvin VAN PEEBLES

Le cinéma américain n’a jamais été aussi bon et créatif que dans la décennie 1970-1980, lorsque la société américaine était plongée dans le fiasco vietnamien et les dérives de l’ère Nixon : science-fiction dystopique, manifestes militants, thrillers paranoïaques et sagas familiales sans concessions constituaient l’ordinaire du spectateur comme du cinéphile.

« MGM s’est lancé sur le marché. 20th Century Fox pensait faire la même chose. Toutes les majors, qui avaient été incroyablement productives devant le siècle, se retrouvaient menacées par l’avancée de la télévision. » (William Marshall, Page 21)

Hollywoodland n’était pas devenue l’usine à « franchises » qu’elle est aujourd’hui et le cinéma était encore le miroir de son temps, comme lorsque Mabuse était l’incarnation des préoccupations des Allemands (http://thierryattard.blogspot.com/2008/05/strange-case-of-dr-mabuse_15.html). A côté d’un cinéma de genre angoissé produit par une industrie cinématographique américaine k.o. debout face aux made for tv movies et au flair des décideurs de la télévision du moment, s’est épanoui un phénomène commercial et ethnique essentiellement développé par les studios pour une catégorie de la population qui n’avait pas bénéficié jusqu’alors de tant de « sollicitude » : la Blaxploitation.

IN LIVING COLOR

En ces temps où l’édition française va mal et l’édition spécialisée hexagonale encore plus, Bazaar & Co (http://www.bazaar-and-co.com/) offre une bouffée d’oxygène aux cinéphiles comme aux journalistes cinéma avec une exploration éditoriale du cinéma de genre à faire rêver les habitués des ouvrages anglo-saxons sur le cinéma, sous la direction du journaliste et spécialiste Julien Sévéon. La collection Cinexploitation de l’éditeur démarre avec un premier volume prometteur : Blaxploitation 70’s Soul Fever !, écrit par Sévéon.

Paradoxe de cette collection, son opus inaugural est consacré à ce que l’auteur qualifie lui-même en introduction de « non-genre » : la Blaxploitation (contraction de Black et d’Exploitation), un type de films produit dans les années soixante-dix pour le public afro-américain, avec dans les rôles principaux des acteurs noirs, la couleur des interprètes étant le seul point commun d’œuvres de styles hétérogènes : policier, thriller, film d’horreur, drame, chronique sociale, comédie voire porno.

« Il faudra le succès de quelques films plaçant dans les rôles principaux des Noirs n’ayant rien d’Oncle Tom pour que le monde du cinéma se mette à changer. Oh, pas sur le fond, car Hollywood est et restera toujours un monde blanc. Mais dans la forme en tout cas. » (Page 5)

Dès le début de l’Histoire du cinéma américain émerge une production afro-américaine, désireuse de réagir aux stéréotypes étalés à l’écran : les Race Movies. Les frères Noble et George Johnson fondent en 1916 la Lincoln Motion Picture Company (Noble, également acteur, sera la vedette des films du studio), Oscar Micheaux suit leurs traces. Ce cinéma parallèle a ses propres stars : Lorenzo Tucker – « le Valentino noir » (découverte de Micheaux), Bee Freeman – surnommée « la Mae West sepia », ou le cow boy chantant Herb Jeffries, suffisamment bankables, pour que des producteurs blancs s’intéressent à ce marché. Les Race Movies prospèreront en marge du système Hollywoodien jusque dans les années 1950.

LE NOIR LEUR VA SI BIEN

« Ce qu’Hollywood a fait, c’est supprimer le message politique et rajouter la caricature. C’est ainsi que la blaxploitation est née. » (Melvin Van Peebles, Page 21)

Il faut attendre la fin de la décennie 1960 pour que des films comme Putney Swope (1969), de Robert Downey Sr. – le père de l’interprète d’Iron Man, ou Le casse de l’oncle Tom (Cotton goes to Harlem, 1970), de l’acteur, réalisateur et scénariste noir Ossie Davis, posent les bases du phénomène Blaxploitation. Mais c’est Sweet Sweetback's Baadasssss Song (1971), de Melvin Van Peebles (cf. http://www.avclub.com/content/node/22997), qui au grand dam de son auteur est considéré comme son déclencheur. Réalisateur indépendant, écrivain, acteur, journaliste européanophile et francophile, Van Peebles a même travaillé pour le célèbre magazine français Hara Kiri et réalisé en France deux petites productions : Cinq cent balles/The Story of a Three-Day Pass (1963) et La permission (1968), où apparaissent les visages familiers de Pierre Doris et Christian Marin. Accessoirement il est le père de l’acteur Mario Van Peebles [lequel demeurera à jamais Sonny Spoon, prince des détectives pour l’auteur de cet article, NDA].

Co-finançé par un prêt de la star noire Bill Cosby, Melvin Van Peebles tourne Sweet Sweetback avec un budget estimé de $150 000 et son film rapporte plus de 15 millions, s’arrogeant même la première place au Box Office dans certaines grandes villes américaines. Hollywood surfera sur la vague et comme l’explique Mario Van Peebles dans une interview commune avec son père menée par Nathan Rabin en 2004 : « Ils ont pris Shaft, qui avait été écrit pour un détective blanc, l’ont transformé en noir, puis ils ont fait ce qui a été appelé plus tard blaxploitation » (http://www.avclub.com/content/node/22997).

Adapté d’un roman d’Ernest Tidyman intitulé Les Nuits rouges de Harlem, Shaft (1971) est réalisé pour la MGM par Gordon Parks, reporter photographe pour Life Magazine, romancier puis réalisateur. Richard Roundtree, dans le rôle du privé hardboiled John Shaft, devient le prototype du héros de la Blaxploitation sur la musique extraordinaire composée et interprétée par Isaac Hayes. Le film fait un malheur et engendre deux suites : l’hyper bondien Les nouveaux exploits de Shaft (Shaft’s Big Score, 1972), où Shaft affronte l’acteur Joseph Mascolo (dans le rôle de Gus… Mascola !) – le futur Stefano Dimera du soap Des jours et des vies, ainsi que Shaft contre les trafiquants d’hommes (Shaft in Africa, 1973). Richard Roundtree reprend même le rôle en 1973 pour une courte série télé, forcément lissée mais très sous-estimée, puis en 2000 dans le sympathique film réalisé par John Singleton avec Samuel Jackson dans le rôle de son neveu homonyme.

PAM, JIM, FRED, RUDY ET LES AUTRES…

« NAACP (1) et CORE (2) – C’est eux qui ont créé ce terme : black exploitation. Il faut que ce soit bien clair et retenu. Ca ne venait pas de la presse blanche… Qui était exploité ? Tous ces acteurs noirs étaient payés. Ils avaient un boulot. Ils faisaient leur travail. Le public n’était pas exploité. Il venait pour voir sur l’écran ce qu’ils désiraient voir. » (Fred Williamson dans le documentaire Baadasssss Cinema, 2002)

Blaxploitation 70’s Soul Fever ! de Julien Sévéon nous offre un voyage joyeux, éclairé et passionnant (avec de nombreuses illustrations dont pas mal de superbes affiches en couleurs) dans un univers efficace et pittoresque peuplé de déesses et de dieux. Pamela « Pam » Grier, déesse parmi les déesses du Panthéon noir de la Blaxploitation (terme qu’elle déteste, comme beaucoup des protagonistes de cette période) est lancée en 1971 par le producteur Roger Corman avec The Big Doll House, point de départ d’une surréaliste série de films de prisons pour femmes tournée aux Philippines. Ce sont des films comme Coffy, la Panthère noire de Harlem (Coffy, 1973), Foxy Brown (1974) ou Friday Foster (1975) qui feront d’elle une icône. Autre femme fatale du phénomène Blax, Tamara Dobson dans le rôle de Cleopatra Jones, pour Dynamite Jones (Cleopatra Jones, 1973) et sa suite, Cleopatra Jones and the Casino of Gold (1975). Foxy Brown comme Miss Jones laisseront des traces dans la culture populaire, que ce soit avec le Jackie Brown (1997) – de Quentin Tarantino (avec Pam Grier dans le rôle-titre), ou le personnage de Foxxy Cleopatra interprété par la chanteuse Beyoncé dans le troisième Austin Powers en 2002.

Du côté des dieux, la légende du football américain Jim Brown, avait déjà une respectable carrière cinématographique (Les douze salopards, Destination Zebra Station polaire…) avant même que sa popularité n’explose avec la Blaxploitation et des chapitres glorieux de son Histoire, comme Slaughter (1972) ou Gunn la gachette (Black Gunn, 1972). Dans Les démolisseurs (Three the Hard Way, 1974), réalisé par Gordon Parks Jr et écrit par le tandem de scénaristes Eric Bercovici et Jerry Ludwig (la série L’Homme de Vienne, 1972), Jim Brown fait équipe avec deux autres stars du cinéma d’action noir : Fred « The Hammer » Williamson (Tommy Gibbs dans Black Caesar et sa suite, Hell Up in Harlem – réalisés par le grand Larry Cohen en 1973), lui aussi issu du football américain et qui sera également réalisateur, scénariste et producteur, ainsi que le champion de karaté Jim Kelly remarqué l’année précédente dans Opération Dragon.

L’inclassable Rudy Ray Moore (http://www.zzzlist.com/celebs/Features/Dolemite/Rudy%20Ray%20Moore.htm), danseur, comique de stand-up précurseur de Richard Pryor, est un chanteur, acteur et producteur américain, connu aux Etats-Unis pour son flamboyant personnage Dolemite – développé pour la scène et ses albums. En 1975, le « Big Bad Pimp » (maquereau) devient le héros d’un film à sa gloire, Dolemite, réalisé par D’Urville Martin et écrit par l’acteur Jerry Jones d’après une histoire de Moore (qui compose la bande originale). Ce passage au grand écran est suivi d’une suite, The Human Tornado, en 1976. Rudy Ray Moore utilisera un autre de ses personnages, Petey Wheatstraw, le gendre du diable, pour son quatrième film (Petey Wheatstraw, 1977).

Julien Sévéon célèbre la Blaxploitation : ses stars, ses seconds couteaux bourrés de talent (Sid Haig, Antonio Fargas…), ses héros méconnus (Christopher St John, réalisateur et scénariste en 1972 de Top of the Heap, et père du Neal Winters des Feux de l’Amour (3)), ses filiations étrangères (un remake Shaw Brothers de Coffy) ou étranges (les films de Max Henri Boulois), sa musique (Isaac Hayes, également acteur, mais aussi Marvin Gaye, Herbie Hancock ou encore Curtis Mayfield), ou ses héritiers (les Gangsta Films). Amateurs éclairés, spécialistes, cinéphiles bercés de souvenirs de vidéo-clubs ou visiteurs de passage, empruntez donc les rues de la Blaxploitation 70’s Soul Fever ! à bord d’une Cadillac Eldorado. John Shaft sort d’une bouche de métro… Des questions ?

Blaxploitation 70’s Soul Fever ! de Julien Sévéon (Bazaar & Co/19,50 euros)

(1) National Association for the Advancement of Colored People: Association nationale pour l’avancement des gens de couleur.
(2) Congress of Racial Equity.
(3) L’auteur de cet article est un incurable et notoire amateur de « Beaux drames de l’après-midi ».